Il concentre à lui seul tout l’opprobre des architectes : il a détruit le paysage des campagnes et des banlieues, pousse sans égard pour son environnement, génère des déplacements et des infrastructures énergivores, flatte le narcissisme et l’égoïsme de ses propriétaires ; kitsch, il n’a ni les qualités des architectures sans architectes que célébrait Rudofsky ni celles qu’un bon architecte est susceptible de lui offrir. Vous l’avez reconnu, c’est le rêve des Français, ce pavillon que les pages de d’a et son atrabilaire éditorialiste ne cesse de vilipender depuis des années.
Mais ces petits « mon-chez-moi » sont là par millions et l’on imagine difficilement une politique de type ANRU finançant leur destruction. Les réquisitoires – et encore moins notre condescendance – n’ont jusqu’à présent pas permis d’endiguer ce déferlement. Le temps ne serait-il alors pas venu de poser un regard, si ce n’est bienveillant, au moins libéré de tout jugement esthétique ou moral ? Car le plus sûr moyen de freiner l’artificialisation des sols par les métastases du pavillonnaire n’est-il pas d’intensifier et de valoriser les territoires où il s’est déjà implanté ?
Cette suburbia qui semble, à tort, avoir échappé à tout contrôle, peut-elle encore être transformée pour retrouver toutes ces qualités urbaines que nous lui dénions ? Oui, répondent des équipes d’architectes comme Iudo ou Villes Vivantes en France, MétamorpHouse en Suisse ou Landconvertor en Angleterre. Elles ont décidé d’élargir le champ d’intervention de leur savoir-faire purement architectural et s’interrogent sur les potentialités spatiales, foncières, financières et programmatiques de ces paysages. Le dossier de ce numéro de rentrée leur est consacré. Nous espérons qu’ils sauront vous convaincre qu’une ville pavillonnaire est possible.
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