N° 276 - Novembre 2019

« Ami de la vertu plutôt que vertueux »

Le flot de discours bien-pensant sur la transition écologique et le monde merveilleux d’un environnement décarboné vous soûle ? Il y a de quoi ; d’autant que ceux qui prêchent le plus fort ne sont pas toujours les plus vertueux. Et pourtant, alors que les solutions pour parvenir à ce changement font régulièrement leurs preuves, seule l’isolation thermique des bâtiments – neufs ou rénovés – a fait de considérables progrès. La raison est connue : non seulement le tissu industriel du secteur du bâtiment en avait la capacité, mais il y a en plus trouvé un intérêt inespéré pour vendre davantage de produits. Mais dès lors qu’il faut modifier en profondeur les structures de production, de distribution des matériaux et former une main-d’œuvre à de nouveaux savoir-faire, les progrès ne sont plus à la hauteur des enjeux.
Les architectes, Ordre en tête, se sont en partie convertis mais peinent à mettre en œuvre leurs nouvelles valeurs face aux lobbies industriels, à la règle du moins-disant et à une réglementation plus propice à faire vendre des produits standardisés qu’à faire réfléchir. Si la construction en bois progresse, concevoir des projets en pierre ou en terre relève encore de l’exploit.
Au moment où la RT2020 va entrer en application, il va leur être difficile de faire comprendre que leur rôle ne se limite pas au choix de matériaux et à l’application servile de règles complexes que bientôt seuls des experts sauront réaliser. Une opération comme Europacity, aussi vertueuse soit-elle en termes d’émission de CO2, ne sera jamais réellement vertueuse si par son implantation elle détruit tout le territoire qui l’environne.
Et c’est bien de cette dimension holistique que les architectes doivent d’abord définitivement prendre conscience avant de parvenir à en revendiquer la maîtrise et à convaincre de son importance majeure face aux enjeux climatiques.

1. Nicolas Boileau, « Épîtres ».

En pisé mais pas sans béton : pour le groupe scolaire Miriam-Makéba à Nanterre (TOA architectes), la réglementation n’a pas permis de considérer les murs en pisé comme suffisamment stables alors que le procédé a fait ses preuves depuis des millénaires.

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