Architecte : Koko Architecture Rédigé par Olivier NAMIAS Publié le 05/10/2012 |
L'ouverture en mai 2012 du musée maritime de Tallinn est un événement. D'abord parce que l'institution, qui cherchait un point de chute depuis 1935, était arrivée à bon port. Mais surtout parce qu'elle marquait la réouverture d'un bâtiment hors normes, un hangar à hydravions achevé en 1917 présentant trois coupoles en béton d'une finesse et d'une portée exceptionnelles pour l'époque.
À peine inventé, le béton armé a été mis au service d'ouvrages utilitaires. Mur de soutènement, ponts, silos à grains, ces constructions fonctionnelles avaient en commun leurs dimensions monumentales. Elles ont exercé une grande fascination chez les architectes. Les hangars à dirigeables d'Orly, conçus par l'ingénieur Freyssinet, ont hanté les livres d'architecture bien après leur destruction, en 1944. Moins connu sous nos latitudes, l'ancien hangar à hydravions de Tallinn n'en est pas moins fascinant. Il est parvenu jusqu'à nous en dépit d'une histoire mouvementée, débutant dans une Estonie alors russe. Le tsar Nicolas II approuve en 1911 la construction de deux hangars identiques, au sein de la forteresse Pierre le Grand, un bastion avancé sur la route maritime de Saint-Pétersbourg. Cinq ans en plus tard, un appel d'offres est lancé auprès de onze entreprises de construction locales et étrangères. Il sera attribué à l'entreprise danoise Christiani & Nielsen, qui couvrira le rectangle de 116 x 35 mètres du hangar par trois coupoles en béton de 35 mètres d'ouverture pour huit centimètres d'épaisseur.
En avance sur son temps
Il faudra attendre une vingtaine d'années pour voir le type de structure mis en œuvre par Christiani & Nielsen sur d'autres bâtiments. En 1945, le hangar est intégré dans une zone militaire soviétique devenant inaccessible aux civils. Son retour sous la houlette de l'État estonien sera définitivement entériné en 2000. En 2006, il autorise l'installation du Musée maritime national, qui cherchait un toit depuis 1935. Les travaux débutent juste à temps pour sauver les coupoles. Faute d'entretien, les ferraillages étaient exposés à l'air et avaient considérablement rouillé. Un hiver de plus et les coupoles s'effondraient.
La reconversion des hangars en musée nécessitait d'importantes interventions sur le gros œuvre. C'est sans doute pour cette raison, et aussi parce que le bâtiment se suffisait en lui-même, que les architectes de l'agence Koko ont axé une bonne part de leur projet sur la scénographie, après la réhabilitation, longue et compliquée, des ouvrages de voûtes. La trace la plus visible de leur intervention est l'installation en façade de portes métalliques de 45 mètres de long et pesant chacune 32 tonnes, des pièces monumentales qui évoquent les grandes portes des hangars d'aviation. Habituellement fermées, elles s'ouvrent cinq minutes toutes les heures pour permettre au visiteur de redécouvrir le hangar sous la lumière naturelle.
Légendes détaillées :
Le nouveau musée : Le nouveau musée maritime de Tallinn a ouvert ses portes sous les coupoles d'un hangar complètement rénové. Du béton THP a été utilisé pour ragréer les surfaces externes de ces ouvrages, qu'il fallait éviter de surcharger par un apport de matériau. Il a été appliqué à la main par une armée d'ouvriers. Une mousse polyuréthane projetée sur l'intrados des coupoles renforce l'isolation thermique de la couverture.
Les portes métalliques s'ouvrent cinq minutes toutes les heures : Les architectes ont choisi de faire le noir complet dans la salle, afin de concentrer l'attention du public sur la scénographie. Toutes les heures, les grandes portes métalliques s'ouvrent pendant cinq minutes pour laisser entrer la lumière naturelle et redonner une perception du bâtiment proche de son état d'origine, tout en dégageant la vue vers les vieux bateaux à quai.
L'ancien hangar à hydravions : Intégré dans une base militaire très confidentielle – la frontière maritime de l'empire soviétique sur la Baltique –, le bâtiment, bien invisible, était étudié et cité en exemple par des universitaires estoniens $(voir Heinrich Laul en 1962, Jevgeni Kaljundi en 1979)$. Il aurait également influencé Ove Arup, qui travailla à partir de 1922 dans les branches allemande et anglaise du constructeur danois qui avait réalisé l'ouvrage.
Le sous-Marin Lembit : La pièce maîtresse du musée est le sous-marin Lembit, point de référence de toute la scénographie. Une passerelle figure le niveau de l'eau, permettant au visiteur d'aborder le sous-marin comme s'il était immergé. Les autres pièces du musée – bateau, avions – sont positionnées en fonction de cette ligne de flottaison virtuelle.
Maîtres d'ouvrages : Musée maritime d'Estonie
Maîtres d'oeuvres : Koko Architecture (Andrus Kõresaar, Raivo Kotov, Indrek Mikk, Margit Aule, Tõnis Savi) – Scénographie : Koko Architecture (Andrus Kõresaar, Olga Batuhtina, Margit Argus)
Entreprises : Ingénieurs chargés du suivi de la reconstruction : Karl Õiger
et Heiki Onton (Tallinn University of Technology) – BET :
structure, Neoprojekt et VMT Ehitus ; lumière, Ahto Kallas
(Moodne Valgustus) et Urmas Pastarus
Surface SHON : 8 000
m2
Cout : 13 million d'euros
Date de livraison : 2011
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N° 212 - Octobre 2012
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