Culmunication
Culture de la communication ou communication de la culture? La confusion est à son comble. Depuis longtemps, la communication ne se limite plus à son rôle de diffusion. Si « le medium est le message », selon la célèbre formule de McLuhan, la puissance d'émission du message tiens désormais lieu de réalité sans autre forme de légitimité que sa propre hégémonie.
On se plaignait il y a encore peu de la technocratie des énarques, mais ce sont maintenant les conseillers en communication qui deviennent Premier ministre. À l'omnipotence du sachant succède l'omnipotence du communicant. L'exemple venant d'en haut, le phénomène peut ensuite se décliner à toutes les strates administratives, qu'elles soient publiques ou privées. En période pré-électorale, l'arbitraire des nominations préventives s'intensifie. Au royaume du bunga-bunga, Silvio Berlusconi vient ainsi de nommer son ami Giulio Malgara à la tête de la Biennale de Venise. Ce publicitaire dont personne n'a entendu dire qu'il ait un jour porté un quelconque intérêt à la culture, n'a d'ailleurs jamais exercé d'activité qui soit liée aux domaines artistiques, à moins de considérer comme un art la technique de l'audimat. Giulio Malgara, le bienheureux impétrant, est en effet le « créateur » d'Auditel. Cette société a développé un système pour relever le taux d'audience des programmes audiovisuels italiens, taux dont on connait l'extrême volatilité corrélative à la taille des tours de poitrine. Nous avons souvent dénoncé dans ces pages certaines dérives de la Biennale d'architecture de Venise lorsque l'agitation promotionnelle cache la vacuité des contenus. Comment désormais ne pas s'interroger sur son avenir? Mais il est vrai qu'à force d'utiliser les Giardini et l'Arsenal comme tête de gondole pour leur propre communication, beaucoup d'architectes ne devraient pas être trop dépaysés.
Emmanuel Caille