Patrimoine émotionnel - Entretien avec Eva Prats et Ricardo Flores, Flores i Prats arquitectes

Rédigé par Natalia PETKOVA
Publié le 01/04/2024

© Judith Casas

Article paru dans d'A n°315

Une panoplie impressionnante de dessins, de maquettes et d’objets collectionnés au fil des années peuple l’atelier – un ancien appartement donnant sur le noyau gothique de Barcelone â€“ de Flores i Prats. En conversation avec Natalia Petkova, les associés (Ricardo Flores et Eva Prats) retracent les origines de leur intérêt précurseur pour la réhabilitation des édifices et des sites délaissés, les conditions de recherche au sein de leur pratique et la manière dont ils les ont présentés à l’occasion de la dernière Biennale d’architecture de Venise.

 

D’a : Vous avez été tous les deux diplômés en 1992, vous Eva de l’ETSAB – l’école d’architecture de Barcelone â€“ et vous Ricardo de la faculté d’architecture de Buenos Aires. Comment les questions de patrimoine et de mémoire étaient-elles abordées dans ces écoles ?

EP : À Buenos Aires et à Barcelone, aucun de nous n’a suivi de cours sur la transformation des bâtiments existants.

RF : En fait, ces cours ne figuraient pas dans nos programmes. Travailler avec des bâtiments existants sous-entendait à l’époque une approche classique de la restauration. Mais cela ne nous intéressait pas et ce n’est pas ce que nous faisions dans notre pratique.

EP : Nous avons été initiés à la réutilisation adaptative des bâtiments par le biais de nos premières commandes et par les concours auxquels nous avons participé. Parfois, nous avons pensé que c’était un handicap de ne pas avoir suivi de formation en matière de conservation, mais en fin de compte nous avons appris en faisant. Nos clients ont également aiguisé notre sensibilité en partageant ce qu’il était selon eux important de conserver dans les bâtiments existants sur lesquels nous travaillions.

 

D’a : Aujourd’hui, de nombreux architectes et étudiants en architecture associent votre travail à ces thèmes de patrimoine et de mémoire, en grande partie grâce à la manière dont vous les avez présentés dans des publications, des conférences et des expositions. Lorsque vous avez créé votre agence, en 1998, quelle importance avaient ces thèmes pour vous ?

RF : Comme vient de le dire Eva, nos premiers projets portaient sur l’adaptation programmatique de bâtiments, en commençant par une commande à Palma de Majorque pour transformer une ancienne minoterie en un petit musée. Puis il y a eu le Casal Balaguer à Palma et les jardins Fabra & Coats à Barcelone sur un ancien site industriel. Ces projets nous mettaient au défi d’examiner ce que nous pouvions conserver de l’existant pour l’adapter aux nouveaux usages. Notre approche consiste à faire fonctionner l’ancien pour les nouvelles générations. C’est quelque chose de plus facile à formuler aujourd’hui et c’est ainsi que nous l’avons présenté à la Biennale mais, à l’époque, nous travaillions de manière empirique. Nous avons alors commencé à (...)

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