Architecte : Bernard Desmoulin Rédigé par Emmanuel CAILLE Publié le 01/11/2003 |
La ville de Sarrebourg dispose de collections qu'il fallait regrouper et mettre en valeur : une importante collection archéologique, composée d'objets préhistoriques, gallo-romains et mérovingiens provenant de fouilles locales ; une série de faïences et de porcelaines de Niderviller du xviiie siècle ; enfin, quelques œuvres de Marc Chagall, dont la célèbre tapisserie La Paix.
Une salle, réservée aux expositions temporaires, permettra de confronter régulièrement les collections avec des œuvres contemporaines ou à l'actualité des fouilles archéologiques. Le musée s'inscrit, par ailleurs, dans une zone d'aménagement concerté (ZAC), située en plein centre ancien. Il permet de relier, au sein d'un parcours piéton, la bibliothèque et la vieille chapelle des Cordeliers en contrebas, bâtiment qui abrite de grands vitraux réalisés par Marc Chagall. L'histoire et le patrimoine sarrebourregeois deviennent ainsi un fil thématique autour duquel peut se redéfinir un quartier jusqu'ici délaissé. Face à l'entrée du musée, une opération concernant des logements devrait prochainement compléter cette requalification et refermer le quadrilatère du cœur de l'îlot.
Le musée constitue donc une étape à mi-parcours de la chapelle et de la placette de la bibliothèque, qui se clôt par le portail de l'hôtel des Saintignon. L'importante déclivité du terrain transforme ces lieux en une suite de terrasses, reliées par des pas-d'âne, multipliant ainsi les points de vue en surplomb.
Le bâtiment, conçu par Bernard Desmoulin, est composé de trois volumes accolés dont un, plus long, dégage un angle intérieur qu'occupe un bassin. Leurs formes rudimentaires, évoquant de vieilles halles, sont magnifiées par l'emploi de deux matériaux de nature opposées : un béton brut, clair, remarquablement réalisé dans des banches en planchettes de bois, et du cuivre légèrement préoxydé. La texture du béton utilisé pour les façades du plus grand volume et en soubassement des deux autres renforce leur massivité tout en les rendant lumineux grâce à sa faculté d'accrocher la lumière. De connotation plus précieuse, le revêtement en cuivre des façades et des toitures absorbe la lumière pour la restituer dans des moirages de teintes sombres et denses. Par ce simple jeu de contraste, où chaque matière tire parti de l'autre, le musée exprime l'hétérogénéité et la complémentarité de ses collections : des vieilles stèles gallo-romaines aux faïences à glaçures stannifères. Avec l'emploi d'une palette plus large de matériaux, on retrouvera ces mêmes variations évocatrices à l'intérieur du bâtiment.
La réussite urbaine du projet tient, en partie, à la façon dont les espaces publics extérieurs prolongent le volume du bâtiment avec un même langage de matériaux et de formes. Les sols et les contreforts du parking vers la bibliothèque sont traités en béton désactivé et béton-planchette identique à celui du musée, les pas-d'âne et les rives du bassin sont recouverts de la même pierre basaltine que le hall d'entrée. La placette au bassin ne constitue pas un vide résiduel entre deux bâtiments mais un « intérieur urbain », un volume dont le plafond serait le ciel délimité par la ligne des faîtages. Cette impression d'intériorité est renforcée par le contraste entre les façades, presque aveugles, des pignons sur rue et la façade, entièrement vitrée, à l'intérieur de l'îlot. Le musée s'ouvre progressivement au visiteur : ainsi, la façade intermédiaire, longée par le pas-d'âne menant à l'entrée, est déjà percée de quelques fenêtres, celles de la salle de conférence et de l'administration. Une fois sur la placette, la façade vitrée et son reflet sur l'eau du bassin nous introduisent déjà dans l'intimité du musée.
Le hall d'entrée devient ainsi un lieu intermédiaire entre l'espace public et les salles d'exposition : on y retrouve en effet le béton-planchette et la basaltine. La continuité entre le dehors et le dedans est encore renforcée par les vibrations de lumière, provenant du bassin, qui se reflètent sur le plafond. Plus que la façade vitrée, ce sont ainsi les volumes du hall, et notamment son imposant escalier hélicoïdal, qui forment la véritable façade du musée.
Le bâtiment repose sur un socle en partie encastré dans le terrain en pente où sont placés l'ensemble des réserves et des laboratoires. À partir de l'entrée, le musée se décompose en trois volumes accolés, dont le dernier, plus long et plus haut, comporte un second étage. Le premier en entrant accueille une salle de conférence et une salle d'exposition temporaire. Dans les deux autres parties, se développe un parcours chronologique qui, à travers l'histoire du pays de Sarrebourg, s'achève avec les œuvres de Chagall. Le passage à l'étage se fait par le grand escalier hélicoïdal, à partir duquel on découvre progressivement la grande tapisserie La Paix.
La muséographie et les soclages ont été conçus par Bernard Desmoulin en collaboration avec la conservatrice, Dominique Heckenbenner. La difficulté tenait à l'hétérogénéité des collections ; assez naturellement, la taille des salles et le choix des matériaux employés permettent à la fois de singulariser certains espaces ou de créer des continuités. Les salles archéologiques occupent le rez-de-chaussée. Les plus grandes pièces sont rassemblées dans le grand volume de la halle centrale. Le sol, de type industriel, est en résine coulée anthracite (Rinol) ; les murs de béton, que l'architecte a finalement laissés bruts, sont microbillés sur certaines parties ; les socles sont en béton-planchette, et l'éclairage est naturel. Tout ce vocabulaire, rudimentaire mais soigneusement mis en œuvre, ainsi que la forme de la salle, qui évoque les hangars, confèrent au lieu des qualités propres à l'environnement de fouilles archéologiques. Les plus petites pièces – outils, flèches ou bijoux –, sont placées dans le prolongement de cette grande salle dans le troisième et plus grand volume du musée ; ils occupent cependant des espaces plus petits, puisque cette partie du bâtiment est recoupée en deux niveaux. Dans la suite du parcours muséographique, les matériaux s'adaptent aux collections pour parvenir, avec les faïences, à un environnement plus domestique : parquet de chêne, murs peints dans une très douce polychromie, tables en bois de wengué, éclairage artificiel. L'inox est utilisé seulement pour les vitrines, certains piétements ou des tables dans l'ensemble du parcours. Celui-ci, malgré l'hétérogénéité des échelles et des matières, demeure fluide et homogène grâce, d'une part, à la simplicité du vocabulaire de formes, exempt de tout maniérisme, et, d'autre part, au dialogue qu'il entretient avec l'environnement urbain proche, à travers quelques fenêtres judicieusement placées. Devant ces collections, qui témoignent d'une histoire millénaire, les images récurrentes de la ville qui nous parviennent au détour d'une vitrine nous donnent l'échelle du temps tout en replaçant ce patrimoine au cœur d'une cité vivante.
Maîtrise d'ouvrage : ville de Sarrebourg.
Maîtrise d'œuvre : architecte (muséographie, soclage et signalétique), Bernard Desmoulin, avec Christian Dagand ; éclairagiste, R.Belle ; BET, Betci.
Entreprises : gros œuvre et béton : CGS Piccin ; couverture et façades cuivre : Giessler ; menuiseries
extérieures : Helluy ; métallerie, verrières : Lefèvre ; peinture : Bertolani.
Coût des travaux : 5,3 millions d'euros hors taxes pour 3 350 m2 shon, le mobilier, la muséographie, la signalétique et les aménagements extérieurs.
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