1. Titre emprunté à une série de films d’architecture initiée par Wim Wenders en 2010, invitant divers réalisateurs à filmer des bâtiments contemporains « comme s’ils pouvaient parler ».

Lancé en 2021, le concours pour la rénovation énergétique du bâtiment de Pierre Eldin, construit en 1977 et caractérisé par sa trame carrée en béton préfabriqué, la géométrie à facettes de ses bow-windows et ses toits-terrasses, a mobilisé trois équipes d’architectes : l’Atelier Julien Boidot associé à l’agence BAST, Pierre Bernard et le duo Stéphanie Dadour et Florian de Pous. Chacune d’entre elles a offert une réponse très distincte à la question que les lauréats résument ainsi : comment le patrimoine bâti moderne peut-il s’inscrire dans une démarche durable et qualitative qui réponde aux enjeux environnementaux contemporains sans dégrader son esprit originel et les qualités initiales de son architecture ? Ce réajustement offre une opportunité rêvée de réinterpréter cet héritage.

Et si l’équipe Julien Boidot/BAST conserve tous les ajouts successifs de l’existant qu’ils complètent par des rideaux thermiques, modifie la géométrie des façades côté ateliers et apporte une couverture rétractable en ETFE dans l’espace central, celle de Pierre Bernard propose un retour à l’architecture d’origine en travaillant essentiellement sur l’enveloppe extérieure et en isolant par l’intérieur avec des doublages en bois. Par sa réponse extensive et pragmatique, l’agence Dadour de Pous continue pour sa part le projet moderniste et l’idée de prolifération sur laquelle il repose, refusant toute fascination vis-à-vis de l’existant ou remodelage. Ils semblent ainsi opérer un basculement majeur en transformant une trame essentiellement « structurelle », dont la réhabilitation thermique par la seule révision des façades a montré ses limites, en trame « environnementale », impliquant le vide, l’air et la lumière. Impalpable mais performante, cette « matière d’espace » est la matière première d’une architecture vivante, mise en œuvre ici.

Pour Stéphanie Dadour et Florian de Pous, toute démarche d’amélioration énergétique doit être sensiblement liée à la qualité d’usage et au plaisir d’habiter. Passifs ou actifs, les dispositifs mis en place ne pourront alors se légitimer que par leur capacité à créer des lieux de vie agréables. Cette vision fait écho à celle que Reyner Banham défendait en 1964 dans son célèbre ouvrage L’architecture de l’environnement bien tempéré : « L’architecture, en tant que service rendu aux sociétés humaines, ne peut être définie que comme production d’environnements adaptés aux déroulements des activités humaines. »

La qualité et la franchise des espaces d’origine de l’école – libres, lumineux et fluides – avaient été progressivement altérées par des (...)

Maîtres d’ouvrage : École nationale supérieure d’architecture et de paysage de Lille, ministère de la Culture

Maîtres d’œuvre : Dadour de Pous architecture, mandataire (Stéphanie Dadour et Florian de Pous ; Félix Roy, chargé de projet, Marie Ménissier, Agathe Convert, Ildut Lesteven, Julien Sage-Thomas, Lucie Perrier) ; paysagisme, Cyrille Marlin ; environnement, Atmos Lab ; CVC et électricité, Espace Temps ; structure, LBA ; acousticien, Gui Jourdan ; coordination-pilotage, Principat ; économie, DS2E

Surfaces : 6 132 m2 de surfaces existantes au sein du bâtiment Pierre Eldin concernées par l’optimisation énergétique de l’enveloppe

Coût : 3,4 millions d’euros HT (valeur janvier 2024)

Calendrier : projet concours, septembre 2021 ; études, octobre 2021-mai 2022 ; chantier, juin 2022-juillet 2023 

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