Tétanisé par la laideur des entrées de villes, nous n’avons pas vu à temps combien c’est le territoire français dans son ensemble qui était lui aussi contaminer, comme par métastase, par la transformation brutal des paysage. Si nos grandes ville bénéficie depuis longtemps d’une ingénierie urbaine aux compétences requises, rodés à l’organisation de concours de maotrise d’œuvre, qu’en est-il des petites villes, des bourgs et des campagnes? Les CAUE et les architectes-conseils font un travail de fond précieux mais n’ont malheureusement qu’un rôle de conseil et sont généralement peu entendu. Seuls les ABF ont quelque autorité mais uniquement dans leur périmètre d’intervention. L’aménagement est donc laissé aux mains d’élus démunis, dépourvus de compétences et soumis à la vive pression des intérêts locaux, qu’il s’agisse de développement économique ou d’intérêts purement personnels (« Je veux mon pavillon ! »). Réagir globalement est d’autant plus difficile qu’on ne peut plus aujourd’hui opposer rural et urbain, tant ces territoires, que l’on qualifiait autrefois de ruraux, ont évolué de manières parfois très opposées les uns des autres, autant d’un point de vue économique, démographique que culturel.
La situation est, à bien des égards, désespérante et l’opposition récurrente des Français à l’interdiction de l’artificialisation des sols ne porte pas à l’optimisme. Le dernier rapport du CNOA révèle par ailleurs que, comme existent des déserts médicaux, de véritables déserts architecturaux apparaissent désormais. Il n’y a par exemple plus que 13 architectes en Haute-Marne...
Malgré ce sombre tableau, la résistance s’organise ; le pavillon français de la Biennale de Venise en 2016, fort judicieusement baptisé « Nouvelles richesses », montrait ce renouveau d’agence souvent jeunes qui décidaient volontairement d’opérer dans ces territoires délaissés. Nous publions maintenant régulièrement leur travail dans ces pages et le Prix d’architectures les a plusieurs fois récompensées. Mais ce que nous avons surtout voulu montrer dans ce numéro, c’est que, loin d’appliquer une méthodologie copiée – mais en plus modeste – sur celles développées dans les métropoles, ces agences inventent leurs propres stratégies ; davantage d’écoute, de dialogue, d’empirisme, de flexibilité, de prise en compte du temps long : des processus de projet qui peuvent s’accorder à chaque spécificité locale. Faisons un vœu : et si c’était au sein de ces pratiques que se forgeait le renouveau de la profession d’architecte ?
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