Si la halle de Mandailles-Saint-Julien (Cantal), malgré son existence encore brève, mérite toute sa place dans ce palmarès, c’est tant pour l’élégance de sa forme, la justesse de son implantation et la précision de son exécution que pour le type d’exercice de l’architecture dont elle est le produit et l’exemple. Fondateur en 2000 de l’Atelier du Rouget, dans le bourg cantalien du même nom, Simon Teyssou fait de l’architecture hors des sentiers métropolitains, ne cessant depuis vingt ans de répondre à une commande dispersée, diverse, souvent modeste, dans cette région essentiellement rurale. 

Avec sa haute toiture en acier Corten ondulé, à mi-chemin entre le hangar agricole et le temple grec, la nouvelle halle de Mandailles-Saint-Julien est en fait la partie la plus visible d’un projet qui, par petites touches, rend à lui-même ce minuscule village prisé par le tourisme vert : relocalisation et paysagement du stationnement, aménagement de nouveaux cheminements piétons le long du cours d’eau, reconversion de l’ancienne école en station d’accueil pour les randonneurs et construction de cette halle polyvalente à la place d’anciens terrains de tennis désaffectés. 

Accueillant tour à tour les marchés, les événements festifs et communautaires et les pique-niques à l’abri de la pluie ou du soleil, cette belle nef de 7 m par 21 m est couverte par une structure en lamellé-collé de douglas local qui revisite la « charpente à couple » des granges-étables de la région. Nulle nostalgie passéiste dans cette inscription dans les traditions, que l’architecte combine du reste avec l’usage du béton armé et de l’acier, mais un localisme revendiqué, une volonté de remettre en mouvement un paysage étouffé par l’accumulation non coordonnée de logiques contradictoires.
Adepte de ce qu’il appelle la « soustraction positive », Simon Teyssou multiplie ce type de projets où, avec souvent peu de moyens, il réinvente des modes de construction en circuit court pour concurrencer les standards constructifs industriels, remet en cohérence des territoires rendus illisibles par des décennies d’incurie, refaçonne le sol de villages que l’enrobé et l’asphalte avaient noyé. Enseignant phare du master EVAN (Entre ville, architecture et nature) de l’Ensa de Clermont-Ferrand qu’il dirige depuis 2019, il ouvre une voie qui fait des émules dans les nouvelles générations de praticiens, ramenant l’architecture là où elle n’était plus.

Maîtres d'ouvrages : Communauté d’agglomération du bassin d’Aurillac (CABA)
Maîtres d'oeuvres : Atelier du Rouget Simon Teyssou & associés (mandataire) – Atelier de Saint-Céré Mathieu Bennet & associés – BET 3B (bois), EUCLID (BET TCE)
Surfaces : 200 m2 (halle), 345 m2 (pôle d’accueil)
Coût : 1,4 million d’euros HT
Date de livraison : 2019