CONTEXTE
À l’heure du réchauffement climatique, la Villa Troglodyte se devait d’être économe et de respecter les enjeux environnementaux actuels en exploitant les énergies naturelles, la géothermie, l’énergie solaire et la récupération d’eau de pluie. La construction d’une Villa Troglodyte pose la question du rapport de l’homme à la nature, de la nature à la culture : comment installer une maison dans un rocher, un paysage, sans l’altérer, en respectant ses volumes, ses failles et sa végétation ? L’enjeu est de faire entrer la maison dans le paysage pour conserver le caractère et la force de la roche, qui nourrissent le confort intérieur. Ainsi, le projet se construit à l’envers : il est sculpté dans la masse. L’espace est obtenu par évidement, non par la construction. De ce fait, il faut aller chercher la lumière, cadrer les vues sur les perspectives choisies, réconciliant l’habitat troglodyte et la lumière naturelle, tout en préservant l’écosystème du site (prélèvement, déplacement et réimplantation à l’issue de la construction). Plus qu’une simple maison, la Villa Troglodyte est l’occasion d’une réflexion fondamentale sur l’espace et l’énergie. Le projet lance ainsi des pistes d’étude sur ce que pourrait être l’habitat de demain.
LA LUMIÈRE
L’idée de la grotte est proche : traverser le rocher, c’est passer de la lumière à l’obscurité. On entre dans la maison par une faille dans le rocher. Une passerelle donne ensuite accès à une grande salle surplombant un bassin, métaphore d’un lac souterrain. La lumière filtre par une autre grande faille qui se développe sur la hauteur de la maison et organise un parcours reliant les pièces entre elles. Les pièces de vie ont des percements qui traversent le rocher pour trouver la lumière . Toutes les fenêtres ont des cadrages particuliers selon qu’il s’agisse du séjour ou des chambres. Elles font corps avec le rocher, comme des tableaux ; elles créent un dialogue entre la nature et le construit. Elles sont autant de cristaux qui éclairent la ville et accentuent le caractère minéral de la composition. La lumière naturelle revêt une importance d’autant plus particulière dans la Villa Troglodyte car elle contribue de manière significative aux économies d’énergie et au confort.
LE PLAN
La maison s’organise sur 5 niveaux. Depuis la rue, on accède au hall de plain-pied par une passerelle surplombant la piscine. Depuis l’entrée, le vide et les planchers de verre offrent des perspectives sur toute la maison. Le séjour et les trois chambres se situent aux étages supérieurs, accessibles par un escalier qui s’installe dans la grande faille de la maison. Un ascenseur vitré dessert également les niveaux supérieurs.
Rez-de-chaussée bas
Le niveau de la piscine et du sauna : on accède à la plage par l’escalier venant du rez-de-chaussée. La piscine est dessinée comme une île et les parois de la pièce figurent celles d’une grotte aux formes courbes et aléatoires d’un rocher.
Rez-de-chaussée haut
Le niveau de l’entrée : on accède à la maison par une passerelle surplombant la piscine. Cet étage accueille également un parking pour une voiture électrique. Le hall jouit de l’éclairage naturel des planchers vitrés de l’étage. Ces verrières garantissent, en isolant le volume de la piscine des autres pièces de la maison, un bon confort hydrothermique.
Au niveau 1
Le niveau du séjour et de la cuisine : le séjour s’ouvre sur une grande terrasse délimitée par le rocher reconstitué. Les vues offrent des échappées visuelles vers la mer. La terrasse est agrémentée de jardinières qui masquent le soutènement de l’immeuble voisin.
Au niveau 2
Distribuées par l’escalier central, on trouve deux chambres dont la Master bedroom. Celle-ci dispose d’un dressing et d’une grande salle de bain. Une terrasse prolonge la chambre : sa forme s’inscrit dans le dessin général du rocher.
Au niveau 3
Une grande chambre possédant elle aussi une terrasse s’installe dans le dessin général du rocher.
LE ROCHER
Dès sa genèse, le rocher existant est le cadre dans lequel s’inscrit le projet. Il devait être conservé. Dans les niveaux supérieurs, il est recomposé avec une texture identique au rocher existant. La stratification en plis obliques existante a été poursuivie. Elle a permis notamment d’intégrer les terrasses en traitant les garde-corps en enrochements. L’ensemble est structuré autour d’un pli vertical principal qui prend appui sur une rupture de géométrie du bâtiment. En scindant le volume en deux, il permet d’éviter un effet de massivité et d’intégrer discrètement les percements des fenêtres et des baies vitrées. Les formes dessinées, la sculpture et la patine en continuité du rocher existant, ainsi que la végétation recréée, donnent alors l’image d’un rocher naturel avec ses failles, ses cavités et sa force. De plus, la présence de multiples poches de plantations variées offre un environnement propice à la réinstallation de la faune et la flore locale.
DÉMARCHE ÉCOLOGIQUE
Projet réellement atypique d’une part, la construction de la Villa Troglodyte dans l’environnement urbain très dense de la Principauté de Monaco s’accompagne, d’autre part, de hautes performances environnementales. Cela permet, au-delà de l’aspect purement architectural, de caractériser ce projet par une réflexion sur son impact, relatif à la préservation de la planète (changement climatique, effet de serre, couche d’ozone, consommation des ressources...) et sa capacité à proposer à ses occupants un environnement intérieur sain et confortable. Ces ambitions environnementales doivent être confrontées au contexte de la construction, et notamment son site, dont les caractéristiques présentent une complexité évidente (topographie hostile, nature du sol, masques solaires importants...), dont il convient de mesurer les effets sur la capacité du projet à maitriser ses impacts environnementaux. Le maître d’ouvrage a donc mis en place un véritable laboratoire environnemental en recherchant toutes les solutions techniques performantes en termes d’efficacité énergétique, de maîtrise de l’empreinte carbone et de neutralité environnementale. Le projet a obtenu plusieurs certifications environnementales et labels énergétiques. Il répond notamment aux exigences de la démarche Bâtiments Durables Méditerranéens (niveau OR) qui constitue un référentiel d’évaluation sur les aspects environnementaux, sociaux et économiques, ainsi qu’un système d’accompagnement humain et technique pour tous les acteurs du projet. Il permet ainsi au maître d’ouvrage de s’inscrire dans une démarche formelle de certification. Il s’agit de la première réalisation en Principauté à obtenir ce label au niveau OR. Afin que la reconnaissance de performance environnementale ne soit pas ambiguëe, et ce, quelle que soit la nationalité du preneur, la Villa Troglodyte a également obtenu la certification anglo-saxone BREEAM, au niveau « EXCELLENT ».
QUELS MOYENS ?
Au-delà des différents niveaux d’exigence qui s’appliquent à l’ensemble des thèmes environnementaux qui découlent des référentiels de certification visés, le projet s’articule autour des points remarquables suivants :
Un Bâtiment Basse Consommation avec le label EFFINERGIE + : la consommation d’énergie de la Villa Troglodyte est inférieure de 40 % à la consommation conventionnelle de base de la Réglementation Thermique Française.
Cet objectif est atteint au moyen de :
- Une architecture bioclimatique (compacité du bâtiment, grande efficacité des protections solaires en été et juste équilibre de surfaces vitrées entre apports de lumière naturelle et maîtrise des déperditions et des apports solaires).
- Une performance thermique de l’enveloppe du bâtiment (haut niveau d’isolation thermique sur les parois opaques et vitrées).
- Une recherche maximale de pénétration et de diffusion de la lumière naturelle (puits de lumière performants).
- Le recours aux énergies renouvelables disponibles sur le site (géothermie par sondes verticales et installation photovoltaïque) produit jusqu’à 1400kWh/an, permettant d’assurer la production d’une grande partie des besoins en électricité de la Villa.
- Des émetteurs de chauffage et de rafraichissement de type dalle active.
L’EAU
Dans un souci d’économie d’eau, une réflexion sur la collecte, la récupération et la réutilisation des eaux pluviales a également été menée. Les usages des eaux pluviales collectées pourront être dédiés aux châsses d’eau des toilettes du bâtiment, au nettoyage des espaces extérieurs et à l’arrosage des espaces verts, couvrant ainsi jusqu’à 40% des besoins de la consommation journalière. Les eaux pluviales seront collectées et stockées en sous-sol dans un ouvrage dont le volume est estimé à 3 m3. De plus, par la maîtrise de la ventilation du bâtiment (double-flux généralisé), le renouvellement d’air adapté à chaque type d’activité est assuré, avec une possibilité de filtration dépendante des conditions sanitaires de l’air extérieur. L’utilisation de matériaux de revêtement intérieur sans émission de formaldéhyde et de composés organiques volatiles (COV) complète le maintien d’une bonne qualité sanitaire de l’air. Enfin, le choix des techniques de rafraîchissement en échange avec le sol permet d’éviter les rejets de chaleur dans l’atmosphère de la Principauté et participe à la réduction de l’effet « îlot de chaleur » urbain tant redouté en climat méditerranéen.
LES MATÉRIAUX
Une des thématiques majeure de la démarche BDM porte sur la qualité et la source des matériaux utilisés lors de la construction. Pour les matériaux, des références saines, naturelles et recyclées ont été privilégiées, de provenance régionale en priorité. La structure est en béton Bas Carbone et le doublage utilise le liège varois, un isolant sain et naturel doté également de qualité d’isolation acoustique. Les revêtements muraux utilisent des peintures naturelles à la chaux et les parquets sont en bois recyclés issus de pieux immergés utilisés en fermes ostréicoles. Les portes et les escaliers sont également en bois massifs issus de forêts gérées de manière durable et responsable.
D’une manière générale, tous les matériaux utilisés répondent aux normes environnementales les plus strictes et font l’objet d’une Analyse du Cycle de Vie (ACV). Les parties du rocher excavées lors de la construction ont, quant à elles, été recyclées en granulats dans une carrière de la région. De plus, une attention toute particulière a été portée sur les espèces sensibles à préserver lors des travaux, notamment la campanule à racines épaisses, la doradille de Pétrarque et le caroubier.
Maîtres d'ouvrages : JB Pastor & Fils – M. Caetano
Maîtres d'oeuvres : Jean-Pierre Lott, Atelier Raymond
Paysagiste : Atelier Jacqueline Osty & Associés
BE gros oeuvre : E&G
BE CH-CVC-PB : Somibat
BE électricité : JB Pastor & Fils Électricité
HQE : Oasiis
Entreprise : JB Pastor & Fils
Surface SHON : 500m²
Date de livraison : 2019