Architecte : Tectoniques Rédigé par les architectes Publié le 11/03/2020 |
Depuis le début de sa formation, l’agence Tectoniques développe une technique de construction en filière sèche. Elle s’exprime sous de nombreuses formes, en particulier autour des solutions bois. Pour compléter cette expertise, les architectes explorent régulièrement de nouvelles expériences, parfois à l’opposé de leurs habitudes, à petite échelle, pour enrichir un travail de recherche sur les relations entre modes constructifs et expression architecturale.
C’est le cas de la Maison P., construite en béton coulé en place, à l’ancienne et à l’inverse des préceptes habituels des architectes. Nous sommes là face à une maison tellurique, qui émerge de la terre, suit fidèlement la pente du terrain et sa forte déclivité, utilise la matière, en épaisseur, dans une mise en œuvre traditionnelle.
Le propriétaire d’une maison bourgeoise de la
fin du 19e siècle à Saint-Cyr-au-Mont-d’Or souhaitait changer de cadre de vie. Sur
le même terrain, dominant les Monts du Lyonnais et à côté de l’ancienne
bâtisse, il a fait construire une villa contemporaine dans laquelle il habite
depuis peu.
Une maison tellurique
En contrepoint de la maison existante, dressée à l’aplomb de la rue, la construction neuve se fond dans la pente du terrain. Elle ne s’érige pas et n’est pas visible depuis la chaussée. Elle semble devenir un double inversé, comme si elle émergeait du sol et de la terre. Cette apparente « disparition » s’accompagne d’une forte matérialité. Elle est très singulière par sa forme et sa texture.
Sa géométrie est simple, brute, et présente un
grand parallélépipède rectangle évidé de deux terrasses. Il n’y a aucun
compromis ni intention décorative. Sa beauté plastique vient de cette sobriété.
Le dépouillement accentue son caractère dense et massif. Son aspect rugueux et
rustique complète le dispositif et confirme la minéralité tellurique de
l’ensemble.
L’iceberg
Enchâssée dans le sol, c’est une maison iceberg dont le volume d’espace enterré est plus important que celui qui reste visible. Cette configuration aura nécessité des fondations spéciales, véritables travaux de génie civil, avec des berlinoises de 8 m de haut pour tenir la colline derrière le mur. In fine, le terrain reconstitué est maintenu le plus haut possible et passe au plus prés des fenêtres.
Malgré cette opération de ré-enterrement,
l’édifice reste très ouvert sur le paysage, avec de belles vues à chaque niveau
et des terrasses qui projettent les espaces vers le lointain. Il y a un effet
inversement proportionnel entre la stratégie d’enfouissement et l’ambiance
intérieure recherchée et obtenue.
Béton
doré
La Maison P. est construite à l’ancienne. Le béton a fait l’objet d’une mise au point avec l’entreprise Lafarge. Il s’agit d’un béton blanc coloré de pigments ocrés, utilisant des agrégats plus gros, moins d’eau et vibré à la main, dans la recherche d’une matière épaisse et imparfaite. Des banches traditionnelles en bois de 50 cm de haut sont posées en couches verticales successives sur la périphérie complète de la maison. Un détail constructif : des clavettes ont été volontairement choisies en acier pour qu’elles forment des points de rouille lors du retrait des éclisses. Ces petites marques régulières ponctuent délicatement le béton et restituent l’histoire de cette construction.
Cette fabrication in situ a été longue,
laborieuse avec beaucoup de main d’œuvre. Tout est hors norme :
l’épaisseur des voiles, la masse de béton utilisée, le temps nécessaire.
La
maison escalier
La maison se déploie sur quatre plateaux.
De haut en bas, chacun est dédié à un usage : stationnements,
suite parentale, chambres enfants, pièce de vie et dépendances.
Un grand escalier relie l’ensemble avec trois volées droites. La première, la plus haute, est extérieure. Les deux suivantes sont intérieures. L’escalier permet de passer de la rue au jardin en traversant toute la maison. Il offre une perspective et une promenade qui parcourt tous les espaces, de part en part et de haut en bas.
Des terrasses plantées accompagnent les
deux niveaux intermédiaires qui semblent ainsi, depuis des cadrages choisis,
être à hauteur de jardin alors que le « vrai » jardin est en fait
tout en bas, dans le prolongement de la maison. La
pièce principale est la pièce la plus éloignée de l’entrée, les voitures sont
sur le toit. Au premier abord, depuis la rue, la maison n’existe pas.
L’escalier est avant tout un espace de découverte à la descente, la
colonne vertébrale de la maison et son cœur.
Extérieur
rugueux, intérieur doux
La combinaison de matérialités très contrastées est l’essence même du projet. La maison est tout d’abord constituée d’un béton rustique, épais, texturé, qui semble juste sorti de terre. Sa couleur rappelle la pierre dorée du Beaujolais qui donne son nom aux Monts d’Or dans lesquels nous nous trouvons.
Ce brutalisme
est compensé par une ambiance intérieure très douce et très
sophistiquée, avec des matériaux nobles soigneusement mis en œuvre. Les
matériaux intérieurs sont peu nombreux et précieux. Le béton toujours brut et présent
est accompagné de chêne pour les menuiseries et les parquets, d’épicéa blanchi
pour les plafonds et d’acier ouvragé pour toute la serrurerie. D’un point de
vue structurel, la maison est portée par ses deux façades et un grand voile
intérieur.
Intensité
intérieure
L’ambiance intérieure est lumineuse, claire
et spacieuse. De grandes baies vitrées occupent toute la largeur de la façade
Ouest. Le projet profite au maximum du site dans lequel il s’installe et tire
parti de la pente vers la vallée. Les fenêtres sont dessinées sur un dispositif
particulier : deux parties côte à côte
assurent distinctement la vue et l’éclairage ou la ventilation naturelle.
La plus grande est vitrée et ne s’ouvre que verticalement pour ne pas encombrer
l’espace. La plus petite, occultée par un volet de bois, s’ouvre dans
l’épaisseur du mur.
Maîtres d'ouvrages : Privé
Maîtres d'oeuvres : Tectoniques architectes, Sandrine Ligonnet (paysagiste), Tectoniques ingénieurs
Entreprises : SC Bat (maçonnerie), Ferlay (menuiserie), Ceser (serrurerie), Michel (électricité), Loison (CVC), RPC (piscine)
Surface SHON : 226 m² SDP
Coût : NC
Date de livraison : automne 2019
Maître d’ouvrage : IMMOBILIERE 3F / EPA ORSAEquipe de maîtrise d’œuvre :ARCHITECTE : DE JEAN … [...] |
Maîtres d'ouvrages : ELOGIE-SIEMPEquipe de maitrise d'œuvres :ARCHITECTE : DE JEAN MARIN ARCHITECT… [...] |
[ MOA : SPL Pariseine - MOE : Architectes: Chartier+Corbasson architectes ; Architecte du patrimoin… [...] |
[Architecte mandataire + paysage : 4_32 architecte - BET Structure et Fluides : Iliade i… [...] |
Maîtres d’œuvre : Figures (Charlotte Billon, Thomas Bouchet, Brice Launay, avec Victorien Pouria… [...] |
Lieu : Rue Buzenval, Paris (20) Maîtrise d’ouvrage : Elogie-Siemp Maîtrise d’œuvre : N… [...] |
Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :
Vous n'êtes pas identifié. | |||
SE CONNECTER | S'INSCRIRE |
> Questions pro |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 4/6
L’apparente exhaustivité des rendus et leur inadaptation à la spécificité de chaque opération des programmes de concours nuit bien souvent à l… |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 3/6
L’exigence de rendus copieux et d’équipes pléthoriques pousse-t-elle au crime ? Les architectes répondent. |