LA SITUATION

Intercalée entre Bayonne, ville historique, et Biarritz ville balnéaire, Anglet a une identité beaucoup plus floue. Ce territoire, traversé par l’ancienne RN 10 et l’autoroute A 63, a tous les attributs de la ville diffuse : urbanisation pavillonnaire décousue, consommatrice de foncier, voirie labyrinthique et essentiellement dédiée à l’automobile,  soit des éléments structurants difficilement repérables. Ici, le modèle est la maison individuelle avec jardin ou le petit collectif avec parc arboré, un système expansif qui, petit à petit, a englobé plusieurs villages, comblé les espaces naturels pour ne préserver que le littoral.

ARCHITECTURE ET TOPOGRAPHIE

L’architecture du projet est un pari sur la pertinence d’une approche sculpturale dans un milieu ouvert. Elle repose sur deux fondements essentiels : la prise de possession d’un site et l’ancrage du projet, la recherche d’une plastique et de dispositifs attentifs à des appropriations multiples du bâtiment qui va au-delà des usages conventionnels.

Dans sa conception, le projet s’est construit selon des allers et retours constants entre différentes questions urbaines, qu'elles soient symboliques, spatiales ou fonctionnelles.

Alors que le dossier du concours simulait une implantation dans la partie haute du terrain, nous avons fait le choix d’ancrer le projet au niveau le plus bas, position qui présentait plusieurs atouts. La hauteur du projet était un véritable enjeu, et ne pas dépasser le faîtage de la villa Quintaou était un objectif. En plaçant la scène au niveau de l’esplanade du marché, il devenait possible de respecter cet objectif tout en ménageant un accès direct à la scène et une hauteur sous gril conforme au programme.

Cette implantation avait aussi pour avantage d’affirmer la présence du projet à l’angle des rues et de renforcer son impact le long de la rue Albert Le Barillier, de manière à accentuer son caractère structurant.

L’architecture d’un théâtre doit assurer un rôle urbain et offrir un dispositif qui concrétise cette idée d’espaces, intérieurs comme extérieurs, permettant de nouveaux types de spectacles et de relations avec le public.

Le projet est un paysage de bois qui se parcourt. Le bois - du Red Cedar non traité - enveloppe l’ensemble du volume, en façade et en sur-toiture comme en plancher circulable et gradins. La peau extérieure est réalisée en épaisses planches de bois brut, posées avec des jours irréguliers. Devant les parties vitrées, ces jours sont plus nombreux et plus larges afin de laisser passer la lumière et de ne pas obstruer la vue. L’utilisation du Red Cedar est un choix collectif opéré en concertation avec la maîtrise d’ouvrage après la mise en place in situ sur plus d’un an d’échantillonnage de plusieurs essences de bois traitées ou naturelles.

Le volume est construit comme un pliage de plans qui partent du sol pour se développer dans l’espace. Ce principe permet d’adapter le projet à la déclivité du terrain et de créer des continuités de surfaces et de plans inclinés qui construisent progressivement le volume. C’est aussi une manière de négocier la question de l’impact en milieu peu dense d’un volume opaque et imposant inhérent à la construction d’un théâtre.

Ces surfaces se prolongent sur le sol par des cheminements, rampes, escaliers, ou parvis qui mettent en relation l’équipement avec le reste du quartier.

LA « MACHINE A SPECTACLES»

La volonté d’ouverture vers la cité, vers les différents publics et vers les différents acteurs (professionnels ou amateurs) de la pratique théâtrale ou musicale est transcrite dans le projet par les inflexions de son architecture qui dessinent sa relation dynamique à la ville et au terrain, en s’enroulant autour de ce qui est au cœur du bâtiment : l’espace scène / salle.

A partir de ce cœur, l’organisation est conditionnée par la séparation et l’évidence des différents flux – public, artistes, techniciens, personnel de gestion avec des entrées dédiées suivant les différents niveaux, en relation directe avec l’extérieur.

Le hall d’entrée largement vitré sur le parvis, est légèrement surélevé par rapport à l’esplanade, offrant au bar restaurant une vaste terrasse protégée. Des spectacles et événements extérieurs peuvent être organisés sur le parvis, sous le porte-à-faux du foyer utilisé comme une scène extérieure, ou sur la terrasse publique installée au-dessus de la salle de répétition. A l’extrémité de la terrasse, des gradins (300 places) ménagent une transition avec la partie haute du volume qui contient la grande salle de théâtre. Les jours de marché on peut y installer un orchestre ou une fanfare, qui contribuent à l’atmosphère festive, créant ainsi une interaction avec le marché.

LES GRANDES SALLES

Un des objectifs majeurs de l’architecture des salles est de conjuguer l’unité, l’organisation globale et la qualité spatiale du bâtiment avec les fonctionnalités particulières requises pour les différentes formes de spectacles envisagées.

Ainsi le plateau de la scène et le parterre bas sont au même niveau. La forme du gradinage et l’implantation des fauteuils sont élaborées avec un algorithme à pas variable qui permet de limiter la hauteur globale et d’optimiser la visibilité de l’ensemble des places.

La salle est composée d’un parterre de 450 places et d’une bergerie de 350 places. Son dessin dissymétrique allie recherche de compacité (réduire la profondeur), visibilité homogène et fluidité des accès (niveau haut et bas du parterre, foyer haut).

Le tracé du profil du plafond découle des nécessités techniques et acoustiques, réflexion vers la scène et absorption en fond de salle, il intègre dans son mouvement les différentes passerelles techniques. La passerelle de milieu de salle est à l’aplomb de la bergerie et permet l’installation d’une tenture de réduction de jauge.

Pour parfaire l’acoustique de la salle, les parois latérales sont habillées d’un parement de modules losangés en relief. Ces « Ã©cailles Â» ont été préfabriquées en atelier à partir d’une modélisation et d’une découpe de panneaux de MDF à la machine numérique. La modélisation acoustique a permis de déterminer l’orientation optimale du relief.

Les écailles sont entièrement fermées en partie basse, pour la réflexion au niveau des spectateurs, et elles sont de plus en plus ouvertes vers le haut. Combinées à un système de rideaux à l’arrière, ces ouvertures sont en mesure de modifier l’acoustique de la salle sans modifier son aspect visuel. Lorsque les rideaux sont descendus, la salle est plus absorbante pour un usage de musique amplifiée, rideaux relevés elle est plus réverbérante.

Texte rédigé par Herault Arnod

Maîtres d'ouvrages : Mairie d’Anglet

Maîtres d'oeuvres : HERAULT ARNOD (Architectes mandataires) ; FORGUE (ingénieur économiste) ; BATISERF (Structures) ;  INEX (Fluides) ; LASA (Acoustique) ; DUCKS (Scénographie) ; FRANCK TALLON (Graphiste : Mur Bavard et Lettres Sculpture)

Entreprises : VRD, Exedra ; STRUCTURE, Altuna y Uria - Cance ; ETANCHEITE - FACADES-SUR TOITURE, DL Pyrennes ; MENUISERIES EXTERIEURES - SERRURERIE, Cance ; CHAPE DECORATIVE, CDI ; MENUISERIES BOIS - AGENCEMENT - CLOISON DOUBLAGES - PLAFONDS, Atrium ; REVETEMENTS DE SOL, Aquisol ; PEINTURE, Atlantic revêtement ; CHAUFFAGE - VENTILATION - PLOMBERIE, Spie ; ELECTRICITE, Ineo ; ASCENSEUR, Kone ; AUDIOVISUEL - ECLAIRAGE SCENIQUE, Audiotel ; SERRURERIE SCENIQUE, Caire ; FAUTEUILS, Jezet seating
Surface SHON : 3 608 m²

Cout : 9,45 M€ HT - Scénographie et extérieurs compris
Date de livraison : décembre 2013