Pierre-Olivier Deschamps |
Photographe de presse, Pierre-Olivier Deschamps effectue régulièrement des incursions dans l’architecture, posant son regard sur des objets aussi divers que les musées en chantier, le patrimoine moderne, le Versailles caché ou les habitats des SDF dans la ville… |
Pierre-Olivier Deschamps débute la photographie dans une période faste : au journal Libération en 1981, alors que le quotidien, porté par l’arrivée de la gauche au pouvoir, lance une nouvelle formule octroyant une large place à l’image. Il intègre dès sa fondation l’agence VU’, créée en 1986 par le directeur du service photo du même Libération ; il en est toujours membre. Sa participation à VU’ permet de multiplier les sujets et les reportages, de travailler sur d’autres temporalités que celle de la photographie de presse quotidienne. Il réalise toutes sortes de travaux : reportages, portraits d’acteurs et de célébrités du cinéma ou même de l’architecture, comme Charlotte Perriand. Mais toujours dans un esprit un peu décalé, exprimé par des décadrages, l’utilisation de l’open flash, le format carré.
Très impliqué dans la presse, le photographe, qui possède également une formation de studio, va profiter d’une collaboration soutenue avec Elle Décoration pour renouer avec la photographie d’espace, qu’il avait déjà approchée en photographiant les spectacles de théâtre. « J’avais d’abord beaucoup travaillé dans la photographie de théâtre, mais j’étais plus intéressé par le travail de mise en scène de mouvements que par les acteurs eux-mêmes. Pour le magazine Elle, je pensais au départ travailler sur pied, en “faisant la bulle”, comme disent les gens de cinéma, c’est-à-dire en restant droit et orthogonal, mais j’ai privilégié un regard plus subjectif et plus humain, un regard qui acceptait des lignes de fuite, qui donnait l’impression que quelqu’un était entré dans un intérieur de façon légère, plutôt qu’un regard trop architectural, trop arrêté. »
En 1999, Marie-Claude Beaud, conservatrice du Mudam, le musée d’Art moderne du Grand-Duc Jean à Luxembourg, lui demande de suivre le chantier du bâtiment dessiné par Ieoh Ming Pei pour accueillir cet élément majeur de la politique culturelle du grand-duché. La mission se déroule sur dix ans. « Ça a été un moment important dans ma relation à l’architecture, car je me suis confronté réellement au travail d’un architecte connu et reconnu. Les images devaient être exposées, mais servir aussi d’archives au musée, de support de communication ou être intégrées dans des publications. Ce n’était pas un travail centré sur l’homme dans le sens des acteurs du chantier, il ne s’agissait pas de montrer le coulage du béton ou le montage d’un échafaudage. C’était en fait un travail portant davantage sur les formes qui parfois se révélaient – un escalier qui apparaissait soudain derrière, pour se masquer à nouveau. Selon les phases du chantier, le bâtiment disparaissait sous des échafaudages, des bâches, sous une espèce de chaos. Il fallait profiter des moments d’ouverture durant lesquels les choses redevenaient visibles, avant qu’elles ne se renferment », explique le photographe.
DE MULTIPLES « RÉSIDENCES »
En 1999, François Pinault annonce la création d’une Fondation Pinault à Boulogne-Billancourt. Commissionné par lui-même, Pierre-Olivier Deschamps réalise une série d’images dans l’île Seguin, en préalable à ce qu’il espère être le début d’un travail de suivi plus large, comparable à celui du Mudam. « J’ai essayé d’avoir une grille d’analyse particulière de ce lieu abandonné après soixante-dix ans d’activité, l’usine était un peu un millefeuille qui ne laissait plus transparaître grand-chose de ce qu’avait été l’automobile. Un des critères de ma grille d’analyse était d’éviter de tomber dans l’abstraction ; dans ce genre de lieu, on peut très vite décliner à l’infini la tache de peinture, l’abstraction de l’écaille, du reflet, etc. J’ai systématiquement tenu à ce que, dans ces images, le lieu soit tout de suite lisible, que l’on comprenne le sol, la perspective, que l’on ait d’entrée de jeu une image naturelle qui donne aussi un aspect documentaire. »
On connaît la suite : le retrait de Pinault fera des images de Seguin la première pierre photographique d’un édifice jamais bâti. Des projets éditoriaux, dont les travaux d’illustration pour l’ouvrage Architectures, version imprimée de la série documentaire réalisée par Richard Copans et Stan Neumann pour Arte, donneront à Pierre-Olivier Deschamps l’occasion d’autres incursions dans le monde de l’architecture. Mais c’est par un travail plus proche du reportage qu’il aborde de biais le thème de l’habiter dans ce qu’il a de plus tragique. La série baptisée de façon provocante Résidence s’attache à décrire ou à révéler la présence des SDF à travers les traces d’occupation qu’ils laissent dans l’espace public. Une série loin du spectaculaire, où le spectateur doit chercher les signes de la présence des sans-abri dans des images d’apparence banale. « Un travail que je considère comme très violent. On peut exposer votre visage, mais personne n’est habitué à ce que l’on photographie sa chambre, son lit… L’endroit où l’on dort, c’est la plus importante des sphères de l’intime, et il y a une violence dans le fait que 10 000 ou 30 000 personnes dans la rue à Paris ont leur résidence exposée aux yeux de tous. » Bien que récompensée par le prestigieux World Press, la série n’a été pour l’instant publiée par aucun magazine.
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