Les 100 000 pavillons vendus chaque année en France sont construits sans architectes – comme ils l'ont toujours été. La peste pavillonnaire continue ainsi de détruire inexorablement les terres arables. Les maires des petites communes, sous le contrôle d'aménageurs et de bureaux d'études peu scrupuleux, ont mis en place une implacable mécanique que rien ne semble pouvoir arrêter. La résistance de quelques architectes, pour nécessaire qu'elle soit, reste dérisoire. Qui peut cependant croire encore que l'abaissement du seuil de recours obligatoire à l'architecte pourrait faire changer les choses ? N'est-ce pas plutôt en renforçant, voir en imposant l'accord des architectes conseils, notamment lors de l'élaboration des PLU d'intercommunalité, puis dans leur application, que l'on pourrait freiner la destruction de nos paysages tout en refondant un lien entre architectes et habitants ?
À l'autre bout de la chaîne de production pavillonnaire, la question de leur architecture reste entière. Depuis Prouvé, quelques architectes s'intéressent régulièrement à la préfabrication modulaire de maisons, mais aucun projet n'a jamais véritablement abouti. On doit sans doute cet échec – et le manque d'intérêt des architectes – aux maigres perspectives de développement économique qu'elle génère pour eux. Élaborer un système de préfabrication modulaire est une tâche forcément plus complexe qu'un projet traditionnel, il demande davantage de temps et, surtout, ne peut se faire sans le partenariat d'entreprises, de bureaux d'études et probablement sans la promesse d'une commande, comme l'État avait su le faire dans les années de reconstruction.
Avec la préfabrication, les architectes devraient sûrement ranger leur prétention à signer une « maison d'architecte » mais ils pourraient se réapproprier la maîtrise constructive de la conception des maisons tout en offrant une prestation beaucoup moins chronophage pour eux et donc moins onéreuse pour le client. Ils pourraient aussi offrir un haut niveau de performance en termes de durabilité. Le moment n'est-il pas venu de lancer un grand concours ?
Emmanuel Caille
> Questions pro |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 4/6
L’apparente exhaustivité des rendus et leur inadaptation à la spécificité de chaque opération des programmes de concours nuit bien souvent à l… |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 3/6
L’exigence de rendus copieux et d’équipes pléthoriques pousse-t-elle au crime ? Les architectes répondent. |