LE SITE - LA MÉDINA
CasArts est comme une «médina culturelle» : une médina imaginaire et réelle que l’on perçoit comme un lieu «d’identité culturelle», un lieu nouveau et vivant au coeur de la grande composition institutionnelle qu’est la place Mohammed V. Comme le programme remplit tout le site dévolu, le projet doit nécessairement s’avancer sur la place. L’étalement horizontal du programme est en effet une nécessité absolue qui conduit à juxtaposer les deux théâtres et leurs annexes. Ceci lui confère une présence telle sur la place que celle-ci devient son méchouar, une belle continuité s’installe entre la ville et le projet. Sur la place Mohammed V, grande et imposante composition institutionnelle, la culture doit jouer comme un contre point vivant. L’idée de la médina ouvre un nouveau thème, attire et rend curieux à la fois.
LES PAVILLONS
La présence de CasArts sur le grand rectangle de la place apparaît constituée de «pavillons» habités au sol de cafés et librairies. L’un des pavillons est une grande porte. Ouverte, entre ouverte. La porte est ici la poétique de l’attente, l’attraction de la curiosité. Voit-on une entrée vers le théâtre intérieur ou l’ouverture prochaine d’une scène vers l’extérieur ? Ce «pavillon» porte est un lieu de séjour public, une grande ombrière où l’on vient s’abriter, un lieu d’entrée exceptionnel, mais c’est aussi une scène de Théâtre : les portes s’écartent en roulant parfois et libèrent la grande ombrière totalement sur la place. La scène de spectacle apparaît et la moitié de la place peut être investie par des spectateurs de plein air.
CasArts est un dispositif scénographique urbain transformable. Les portes accueillent une scène mobile pour des représentations et spectacles à 6000 personnes tournés vers la place.
Aussi, l’architecture sur la place est une chorégraphie sculpturale vivante, une scénographie, habitée au sol de la vie permanente des cafés, librairies, et rendez vous à l’ombre. Aux volumes purs et simples qui apparaissent de prime abord, au dehors, s’oppose la richesse de l’intériorité enveloppante, la fraicheur de l’ombre le jour, la douceur de la lumière le soir. Entre les pavillons, des entrées multiples s’ouvrent, fines, ombragées, attirantes vers le dedans.
LE PASSAGE - LES PILLIERS
Une fois entré, on découvre un passage d’ombre, de coques voutées, lieu intime et grand à la lumière tamisée, dans lequel le public pénètre de partout et que la ville traverse d’est en ouest. Le visiteur, le passant, le spectateur est d’abord étonné de découvrir une verticalité ascensionnelle, un changement de lumière, de température, et l’air rafraîchit. Ce passage distribue tous les lieux et est le carrefour public. On y trouve la vente des tickets, l’accès aux salles et foyers, aux lieux d’évènements, aux côtés intérieurs des cafés et librairies, à l’administration, et, discrètement au quartier des artistes (loges, répétitions, etc.). Le lieu joue ici avec l’air, et est adapté au climat. Il crée des courants de convexion qui abaissent la température et bénéficient aux foyers. Ce thème de la simplicité extérieure de l’architecture qui introduit peu à peu au mystère de la richesse intérieure, à l’ombre, au clair obscur, à un enchaînement de lieux que l’on découvre peu à peu, est une leçon universelle de l’architecture marocaine (les casbahs, le palais de Bahia).
L’AUDITORIUM
Les auditoriums seront des hauts lieux de la ville. Pour le théâtre c’est le lieu d’une rencontre toujours renouvelée entre un texte, une parole sonore et une assemblée qui l’écoute. Pour la musique, à l’époque de l’enregistrement, la salle de musique devient le lieu de la performance vivante, de l’événement partagé dans l’instant par un auditoire passionné. Toutes les sensations physiques, cénesthésiques, et lumineuses des auditeurs concourent au plus haut point à l’attention et l’écoute, à la vision. La salle doit porter et permettre cette émotion partagée entre auditeurs, mais aussi entre les artistes et le public : proximité, visibilité, capacité d’un spectateur et de l’artiste à ressentir tout l’auditoire autour de la performance, sont les atouts d’une grande salle. Dans une belle salle les sensations du vaste et de l’intime, curieusement, doivent cohabiter, se succéder selon les points de vue.
Offrir les meilleures conditions de vision et d’écoute est crucial, or les deux salles doivent ici permettre la présentation de programmes très différents, entre la musique symphonique ou traditionnelle, acoustique sans amplification, et les shows ou comédies musicales qui utilisent l’amplification. Pour l’acoustique amplifiée, le son est contrôlé par le système et la salle doit être assez absorbante. Pour l’acoustique naturelle, la question est beaucoup plus délicate. La salle devient un instrument de musique, de son, comme une guitare ou un piano. Elle s’entend et les acousticiens jouent «avec» son acoustique. Il est facile de rater l’acoustique d’une salle. Beaucoup de salles ont une acoustique médiocre, et ceci est difficilement réparable. La géométrie, les dimensions et les matériaux sont cruciaux, et nous avons ici appliqué, avec Xu Ya Ying, les paramètres idéaux pour assurer la bonne acoustique. La vie des artistes, des techniciens, le travail de préparation des répétitions, des installations de décors, etc., la capacité d’enseigner les arts du théâtre, tout cela est rendu le plus efficace possible par le quartier des artistes que nous proposons, reliant les deux salles de théâtre et la ville.
Maîtres d'ouvrages : Casablanca Aménagement S.A. / Egis Bâtiments International
Maîtres d'oeuvres : Christian de Portzamparc architecte mandataire // Cabinet Rachid Andaloussi, architecte partenaire au Maroc // Theatre Projects Consultants, scénographie // Xu-Acoustique, correction acoustique // Acoustique & Architecture, isolation acoustique / Méristème, paysagiste // Light it be, éclairagiste // Ingerop, ingénierie fluides et structure // Arcora, ingénierie façades // Vulcanéo, sécurité incendie et coordination SPS
Surface SHON : 20 245 m2
Date de livraison : 2021