Façade du groupe scolaire Antoine-de-Ruffi, Tautem |
Retour d'expérience sur le groupe scolaire Antoine-de-Ruffi (TAUTEM Architecture, architectes mandataires – BMC2 Architectes, architectes associés) Situé dans le quartier Euroméditerranée de Marseille, le groupe scolaire Antoine-de-Ruffi livré en janvier dernier permet aux architectes de l’agence TAUTEM architecture de revenir sur l’expérience de l’emploi d’un béton bas carbone. Pensé pour s’inscrire comme un monument au sein d’un quartier très dense, le bâtiment blanc déploie des façades monolithiques côté rues et élève ses colonnades dans le ciel. |
Suite à un concours gagné en 2017, cette école de 22 classes tout juste livrée portait dès ses origines des ambitions qui allaient au-delà de celles de la RE2020. « Le maître d’ouvrage Euroméditerranée nous a donné d’importants moyens pour un projet de groupe scolaire, au regard de la situation générale à Marseille », reconnaît l'architecte Adrian Garcin. Pour ce projet, l’agence TAUTEM (mandataire) et l'agence BMC2 Architectes (associés) ont été épaulés par le BET structure Best Portefaix. « Au départ, l’usage du béton bas carbone était une contrainte imposée par le maître d’ouvrage, il fallait obtenir le niveau E3C1. Cela nous a aussi permis d’atteindre des objectifs élevés : c’est la première école labellisée Bâtiment durable méditerranéen (BDM) niveau argent. » Dans ce quartier très dense en pleine mutation – « le parc habité » comme l’avait nommé Yves Lion –, avec des tours de 17 à 20 étages, il fallait faire exister ce bâtiment en R+4 sur sa parcelle en équerre, et donc concevoir un projet monumental marquant l’entrée de la ZAC. Le contexte marseillais Si au départ seuls les planchers sont prévus en bétons bas carbone – et le reste en ciment blanc –, l’entreprise Travaux du Midi propose de réaliser les façades, poteaux, planchers et toutes les parois intérieures laissées nues avec le même matériau, pour des questions d’économie. « On souhaitait que le béton soit uniforme pour l’ensemble du projet, et non mettre en œuvre par exemple du béton bas carbone uniquement sur les murs périphériques, poursuit Adrian Garcin. Nous avons mixé avec d’autres matériaux : en cœur d’îlot, on a des grands murs-rideaux en aluminium très vitrés et des façades à ossature bois protégées par le béton, non exposées aux intempéries. » Les architectes soulignent la pertinence du choix des matériaux de construction dans le contexte spécifique de Marseille : la proximité des hauts-fourneaux de Fos-sur-Mer permet de fournir les laitiers nécessaires à la composition des bétons bas carbone. Les fines et graves sont issues de carrières toute proche (carrières Bronzo Perasso de Sainte-Marthe). « Les granulats et sables très blancs ont permis d’éclaircir la couleur du béton, ajoute Florence Rommel de l'agence TAUTEM. Ainsi, le bâtiment ne paraît pas gris mais pierre, entre le blanc nacré et le beige du sable de calcaire coquillé, sans colorant ni adjuvant. Un ciment blanc aurait coûté plus cher, avec de la chimie dedans. Cette teinte nous permet d’être raccord avec les silos de farine Francine juste à côté et de créer une harmonie avec les quartiers des 2 e et 3e arrondissements de cette ville très minérale. »
Pas un, mais deux bétons Le béton a pu être réalisé à même le chantier dans une centrale installée en plein centre de la cour de récréation, « ce qui a évité le ballet incessant des camions toupies », poursuit Florence Rommel. Côté avenue Salengro et rue Urbain-V, l’école déploie des façades monolithiques protectrices épaisses de 1 mètre en raison du système de double mur GBE®, déjà expérimenté par l’agence sur un précédent projet de médiathèque à Frontignan. « Ce mur amène de la complexité dans la réalisation, avec des temps de coulage trois fois plus longs par rapport à un béton classique », poursuit Adrian Garcin. Un premier voile porteur de 20 cm, un isolant rigide mis avant le coulage, et un voile de parement de 13 cm pour l’aspect béton extérieur sont tous les trois coulés en même temps. « Cela apporte de l’inertie et du confort d’été : la masse protège de la chaleur, du bruit de la ville dense, juste à côté des puces de Marseille. » Si le béton bas carbone coulé côté rue est fourni par Lafarge, celui des colonnades est fourni par Cemex. Positionnés sur une trame de 120 cm, les poteaux hexagonaux eux aussi coulés en place s’élancent vers le ciel de Marseille, jouant avec la course du soleil. Retour d’expérience « Au début, on avait un peu peur qu’il s’agisse d’un béton moins qualitatif, reconnaît Adrian Garcin. Le béton est beau, ce n’est pas un béton au rabais parce qu’il est bas carbone. En revanche, il met plus de temps à sécher. L’entreprise a dû positionner des bandes chauffantes sur les prédalles pour accélérer la prise du béton. Nous avions des contraintes de délais à respecter pour la livraison du projet. Au décoffrage, des taches bleues violets sont apparues en raison des laitiers, mais ont disparu au bout de quinze jours. » Si les architectes précisent que ce type de béton est 40 % plus cher au mètre cube qu’un béton traditionnel, ils ont trouvé ce matériau en adéquation avec les conditions climatiques de Marseille qui excluent de construire en bois. « On est une agence attachée au béton, et le bois peut se mixer avec. On va mettre de plus en plus de bois dans nos projets mais nous ne nous voyons pas construire un bâtiment tout en bois dans le Sud de la France. On aimerait tous s’ouvrir à d’autres matériaux – comme la terre crue ou la pierre massive qui entrent dans notre écriture architecturale –, mais nous sommes encore aujourd’hui confrontés à des problèmes de coûts. |
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