Plan du centre de Cergy : projet lauréat de reconversion de la poste de l'AUC avec Quadral promotion |
En totale mutation, La Poste voit le courrier qui était sa raison d’être descendre à 20 % de ses activités et se recentre notamment sur l’aide à la personne et la distribution des colis. Que fait-elle de ses locaux pléthoriques désormais inutiles et souvent placés en cœur de ville ? L’appel à projets lancé par Poste Immo face à la gare de Cergy-Pontoise, « ville nouvelle » des années 1970, nous permet d’analyser un exemple concret. |
Que reste-t-il de Cergy-Pontoise ? Les villes nouvelles créées en 1965 par Paul Delouvrier, savamment mises à distance de la capitale pour leur permettre d’accéder à une certaine autonomie, sont désormais absorbées par l’urbanisation continue du Grand Paris. Le centre de cette agglomération qui s’étend autour d’une anse de l’Oise reste cependant toujours marqué par un modernisme radieux rappelant à la fois BrasÃlia et la Défense : des dalles jetées comme des îles de béton au milieu des champs cultivés et reliées par des passerelles piétonnes. Au-dessous d’elles se sont glissés les zones de services et les parkings innervés par le réseau routier. Tandis qu’au-dessus s’élève une collection d’objets célibataires : la pyramide inversée de la préfecture conçue par Henry Bernard (1970), l’imposante tour EDF (1974) qui repose en porte-à -faux sur un pied – un tour de force réalisé par Renzo Moro – et la tour des Jeunes Mariés (1972) aux formes rondes de Martine et Philippe Deslandes. Plus tard la ville s’étendra et réactivera les maisons en bande et les crescents des villes thermales anglaises pour former un Bath trash et prolétarien.
Mais revenons dans le
centre, à la sortie de la gare de ce satellite de la métropole. Où, comme dans
un film de science-fiction, le nouvel arrivant est livré sans repères à la
circulation automobile intense du niveau technique sans comprendre
immédiatement comment atteindre la ville administrative qui flotte quelques
mètres plus haut. C’est au-delà de la vaste esplanade conçue par l’agence Richez
qui unifiera toutes ces voies filant parfois sur des altimétries différentes
que se dressent les locaux abandonnés du tri et des bureaux de la poste. Ils
forment une barrière infranchissable interdisant l’accès direct depuis la gare
au centre commercial des Trois-Fontaines (Vasconi & Pencreac’h, 1973) et
aux autres commerces qui fleurissent sur la dalle centrale.
Un appel à projets a donc
été lancé par Poste Immo, propriétaire du foncier, et l’agglomération de
Cergy-Pontoise invitant des équipes composées de promoteurs et d’architectes,
comme dans les nouvelles procédures qui se généralisent après « Réinventer
Paris » à réfléchir à peu de frais sur la programmation et sur la réponse
architecturale à apporter. Les participants devaient essentiellement proposer
des logements et des locaux annexes tout en conservant dans la mesure du
possible ce patrimoine architectural très spécifique. Chaque équipe a donc été
amenée à revenir sur ses propres outils conceptuels pour trouver une solution Ã
ce dilemme. Ainsi l’AUC sauvegarde intégralement la barre de bureaux lancée sur
ses hauts pilotis pour jouer ensuite sur la sédimentation et le collage
théorisé par Colin Rowe. Les Norvégiens de Snøhetta, qui promeuvent une architecture tellurique et massive,
détruisent sans remords ces constructions aériennes et hors sol, à mille lieues
de leurs fondamentaux, pour mieux s’ancrer sur la terre ferme. Jean Mas et ses
associés de 2/3/4 cherchent à proposer une architecte simple et « puissante »
trouvant ses sources dans la « Forme forte » de Martin Steinmann.
Quant aux agences d’Erik Giudice et de Valero Gadan, elles préservent une
partie la barre existante et l’intègrent dans une nouvelle pièce urbaine.
Mais que faire du
dénivelé de 7 mètres qui coupe la future place de la dalle du centre
commercial ? Les équipes l’ont considéré comme un relief naturel, une
situation que l’on retrouve souvent à Paris, que ce soit à proximité de Montmartre
ou des Buttes-Chaumont. Leurs constructions s’échancrent pour laisser filer des
parcours qui savent indiquer clairement aux piétons la direction à suivre sans
avoir recours à une quelconque signalisation.
COLLAGE
Maîtrise
d’ouvrage : Quadral Promotion (lauréats)
Maîtrise d’œuvre : l’AUC architectes
urbanistes
Sans doute l’équipe conceptuellement la mieux
armée pour répondre à cette demande très spécifique. La barre suspendue des
années 1970 est conservée dans son intégralité. Les allèges opaques de ses
fenêtres sont supprimées pour que les vues de l’intérieur correspondent à la
promesse de la façade : une carte perforée d’ordinateur vintage dont les
vides rectangulaires alternent en quinconce avec les pleins. La structure en
béton du centre de tri est mise à nu et complétée par une travée supplémentaire
plus haute qui s’étend sur l’emprise de l’ancienne passerelle lancée au-dessus
des voies. Cette nouvelle structure est agrémentée de balcons qui rappellent
les plateformes techniques en porte-à -faux des Magasins généraux de Pantin
(1930). Au nord-ouest, deux immeubles de logements ont été ajoutés. Ils densifient
l’opération tout en montant en gradins pour éviter de projeter leurs ombres
portées sur leurs voisins. L’ensemble s’organise autour d’un square qui
pourrait évoquer ceux d’Alphand tandis que l’escalier en diagonale invite le
public sortant de la gare à se diriger directement vers le centre commercial.
La barre hors sol accueille désormais de petits
appartements peu cloisonnés dont les cuisines ouvertes et la hauteur sous
plafond inhabituelle (2,90 m) donneront aux habitants l’impression
d’occuper par effraction des espaces de bureau. Des jardins partagés compensent
en toiture l’absence de balcons – leurs plantations voudraient donner Ã
cette construction des airs de temples antiques envahis de végétation et de lavandières
peints par Hubert Robert au XVIIIe siècle.
Cafés, restaurants, bureaux espaces et de
coworking s’immiscent dans la structure du centre de tri et de son extension. Une
programmation qui vise à réactiver, à l’échelle de l’opération, les fondamentaux
de la ville nouvelle qui revendiquait son autonomie par rapport aux cités-dortoirs
de la proche banlieue parisienne.
PLEINE TERRE
Maîtrise
d’ouvrage : Groupe Pichet
Maîtrise d’œuvre : Snøhetta / Parc Architectes / Taktyk Landscape + Urbanism
Les Norvégiens de Snøhetta et leurs associés français ont d’abord cherché Ã
retrouver le vrai sol de la ville puis à modifier son skyline en faisant table
rase des constructions existantes. Quatre blocs de logements s’élèvent ainsi en
prenant directement appui sur un espace public qui prolonge le parvis de la
gare et pénètre dans le cœur de l’îlot. Ils esquissent une architecture oblique
qui, avec ses profondes loggias, rappelle les constructions pyramidales de Jean
Balladur pour La Grande-Motte et dialoguent sur un pied d’égalité avec les
silhouettes atypiques des constructions iconiques du quartier : la tour
des Jeunes Mariés qui s’élance derrière eux et, au loin, la préfecture. Ces
blocs sont occupés à chaque niveau par quatre logements qui s’insèrent dans les
angles de manière à pouvoir bénéficier de deux orientations et qui s’équipent
de jardins suspendus. L’ensemble s’organise autour d’un canyon dont le fond en
pente douce, planté de hauts arbres enracinés en pleine terre, supporte un
cheminement en zigzag qui permet de rejoindre la partie supérieure de la dalle.
Un parcours vert ponctué de commerces et d’équipements annexes qui prennent
naturellement place dans les pieds d’immeubles.
FORME FORTE
Maîtrise d’ouvrage : Kaufman &
Broad
Maîtrise d’œuvre : Ateliers 2/3/4
L’immeuble existant considéré comme un
« verrou urbain » est impitoyablement sacrifié pour permettre la
« réconciliation » du sol naturel et de la dalle. Le nouveau
dispositif architectural peut ainsi opérer sans résistance une rotation de 90°
par rapport à l’ancien pour s’aligner en limite de la ville haute et définir
clairement la nouvelle esplanade de la gare en affirmant son parallélisme avec
la barre de la CAF qui, en face, attend sans impatience sa reconversion.
Le projet a au moins pour lui la simplicité.
Deux typologies – un plot collé à un immeuble désaffecté en instance de
réhabilitation et un U ouvert sur l’intérieur de l’îlot – s’affirment
de part et d’autre d’un grand escalier droit. Ce dernier est placé dans l’axe
du square du Diapason et permet une mise en scène de la tour des Jeunes Mariés
qui s’élance à l’arrière-plan. Tandis que la cour de l’immeuble en U
cherche à lui accorder une valeur d’intimité rappelant celle des traboules
lyonnaises.
Les logements souvent mono-orientés se
caractérisent par de profonds balcons. Tandis que, sur la future place, une
colonnade formant socle accueille, sur trois niveaux, restaurants, commerces et
espaces de coworking.
PIÈCE URBAINE
Maîtrise d’ouvrage : Léon Grosse
Immobilier / Redman
Maîtrise d’œuvre : Erik Giudice
Architecture / Valero Gadan & associés
Une proposition dense et verticale qui parvient
à conserver une grande partie de l’immeuble de la poste (89 %) en
l’intégrant dans une nouvelle forme urbaine. À la barre de bureaux existante,
reconvertie en logements, viennent ainsi s’adjoindre deux extensions
perpendiculaires qui esquissent un plan en S. La première, posée au
nord-est sur la dalle, forme un arrière-plan pour l’escalier qui traverse
l’îlot en biais afin de rejoindre le mail des Cerclades. La seconde s’aligne
sur la future place, un dispositif renforcé par le plot contenant un hôtel qui
vient en appoint de l’autre côté de l’escalier. Quant au socle, il est
réhabilité pour accueillir des activités permettant d’arrimer efficacement la
dalle au sol réel.
La partition musicale formée par les hautes
fenêtres en quinconce de l’immeuble vintage sert de base au dessin des
nouvelles façades. Ainsi celle de l’immeuble de logement en reprend le rythme
syncopé avant que ne s’y superposent les creusements aléatoires des loggias et
la scansion lente des colonnes de balcons. Celle de l’hôtel repart plus
simplement des fenêtres qu’elle étire pour définir une composition plus basique
qui sait monter en attique pour partiellement dévoiler le jardin luxuriant qui
pousse en toiture.
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