Architecte : Atelier Kempe Thill Rédigé par les architectes Publié le 12/03/2017 |
LOGEMENTS AVEC JARDINS D’HIVERS
En janvier 2012, l’Atelier Kempe Thill a gagné le concours lancé par le bailleur social public, Paris Habitat, pour la construction de cinquante appartements, un cabinet de dentiste, un centre de Protection Maternelle et Infantile et un parking souterrain situés à la Porte de Montmartre à Paris. Les appartements font partie de la catégorie du PLI et du PLA, c’est-à-dire bénéficiant du financement le plus faible du parc social. Le site se trouve dans une ancienne zone industrielle en mutation le long du boulevard périphérique. On y trouve des complexes immobiliers datant des années 1960 qui sont amenés à être remplacés par du logement contemporain dans les années à venir. Paris fut une grande source d’inspiration, du fait que le projet se trouvait dans la capitale même, remarquable par son histoire, tout particulièrement celle du XIXe siècle.
Les questions qui sont soulevées ici sont : Quel serait la typologie la plus adéquate pour le logement urbain dans le contexte français ? Quel serait un mode de vie, diffèrent de “l’Existenzminimum”, porteur de véritables qualités substantielles et cohérentes pour devenir la base d’un prototype à développer pour le XXIème siècle ?
Une typologie qui utilise systématiquement le jardin d’hiver possède ce potentiel. C’est pour cela qu’il est devenu la base conceptuelle de notre projet. En dehors de ses qualités d’espace de détente, la raison de ce grand potentiel réside dans la capacité du jardin d’hiver à répondre à une série de fonctions : à l’échelle du climat, il fonctionne comme un espace tampon qui vient capter l’énergie solaire ; d’un point de vue acoustique, il absorbe les nuisances sonores du trafic routier ; et sur le plan spatial, il constitue non seulement une extension largement vitrée à l’intérieur des appartements, mais aussi un espace qui confère un degré d’intimité supplémentaire important dans les conditions françaises. Le jardin d’hiver peut également être lu comme l’interprétation contemporaine des balcons filants que l’on retrouve dans de nombreux bâtiments typiques des boulevards haussmanniens.
COMPACITÉ ET QUALITÉ
C’est pour les raisons évoquées précédemment que nous avons décidé de prendre pour concept de base le jardin d’hiver. Il a donc fallu trouver une typologie capable de répondre à ce concept de la manière la plus conséquente d’un point de vue économique et architectural. Cette typologie est retrouvée sous la forme d‘un bloc compact, une villa urbaine de 19 mètres de largeur sur 20 mètres de longueur. Deux de ces bâtiments sont regroupés ensembles, séparés par une cour commune. On trouve au soubassement, en dessous des deux volumes, un parking qui s’étend sur l’ensemble du projet. Les équipements publics sont placés au rez-de-chaussée de chaque bâtiment. Du premier étage au cinquième, les appartements s’organisent autour d’une circulation centrale. En termes de budget, cette typologie très compacte permet de placer des jardins d’hiver avec des portes coulissantes en verre tout autour de l’ensemble du bâtiment. La profondeur des jardins d’hiver varie selon les besoins de l’intérieur des appartements. Les séjours obtiennent ainsi un jardin d’hiver plus large afin de pouvoir positionner de petites tables et des chaises, ceux des chambres sont plus petits ; on pourrait y mettre une chaise et des pots de fleurs etc.
Quasiment tous les appartements ont une orientation en angle avec un premier jour dans toutes les cuisines.
À LA RECHERCHE D’UN PROTOTYPE SYSTÉMATIQUE
L’intention pour l’organisation spatiale du bâtiment était de trouver un prototype pour le logement urbain français en général et spécialement pour la ville de Paris : une conception intégrée où la partition des appartements, les parkings, la structure et toutes les autres exigences techniques forment une synthèse organique inséparable.
Par conséquent, le but était de trouver une forme rectangulaire qui convienne pour une typologie homogène capable de s’adapter à différentes situations. Les murs porteurs devaient descendre les charges directement du toit aux fondations de manière à éviter le surcoût de lourdes superstructures.
On trouve ses principes dans le projet construit dans le volume situé au nord du projet. Dans la partie sud, il était en fait plus pratique en termes d’exigences programmatiques de couper le bâtiment diagonalement tout en gardant la même longueur du côté de la rue Maurice Grimaud. Cette étape a permis d’étendre le programme d’une manière logique sur l’ensemble du projet, et la cour s’ouvre sur les bâtiments voisins à l’ouest.
Pour atteindre un système rationnel, avec des étages de même taille et organisé de manière similaire malgré toutes les normes du Plan Local d'Urbanisme (PLU), il a fallu réduire l’épaisseur des dalles structurelles à 20cm, sans aucune couche de ciment supplémentaire ni de chape nécessaires pour les normes acoustiques.
UNE VILLA URBAINE SUR COUR
La typologie du bloc compact est une nouvelle interprétation de la villa urbaine classique. C’est également la base d’une intégration dans la situation urbaine sensible à Porte de Montmartre où la densité requise est très élevée et où un bloc ouvert est très souhaitable pour permettre des vues vers le parc René Binet et ses alentours. Le programme public n'est pas le seul point d'ancrage du projet à l’espace urbain. Le projet n’est pas un seul bâtiment, mais un petit ensemble de deux volumes, ce qui lui donne une dimension singulière. Formellement ouvert, il est une entité forte ancrée dans son contexte. L’espace entre les deux bâtiments crée une cour collective. Cette cour est un accès d’une part vers les deux bâtiments, d’autre part vers les fonctions communes telles que la conciergerie, un espace multifonctionnel pour les habitants, mais aussi les parkings à vélo ainsi que les locaux poubelles, orientés vers la cour. Dans ce sens, la cour peut également être utilisée pour des activités, spécialement dans l’espace multifonctionnel. La cour est aménagée de deux grands bacs plantés, séparés par une promenade. Ces bacs ont une hauteur suffisante pour également servir d'assises. Afin d’assurer la sécurité du projet, la cour est séparée de la rue par une clôture de 4 m de haut, comparable aux clôtures en fer des anciennes demeures parisiennes.
DES APPARTEMENTS GÉNÉREUX AVEC DES PETITES SURFACES
La principale question pour l’organisation des
appartements fut : comment donner à ces très petits appartements un caractère
spatial généreux et ouvert ?
Quasiment tous les appartements sont orientés en angle, il n’y a pratiquement pas d’appartements mono-orientés. La partition des appartements est organisée de la manière la plus systématique possible. Les chambres à coucher sont disposées sur le côté le plus court du bâtiment vers la cour, les séjours sont quant à eux tournés vers la rue et les parcelles avoisinantes. Le cœur spatial de la plupart des appartements se trouve dans la cuisine à l’angle de l’immeuble, conçue comme la prolongation de l’espace à vivre. Cet emplacement a été choisi car il est l’espace le plus noble de l’appartement en référence à la passion des Français pour la cuisine. La cuisine est séparée du séjour par des portes coulissantes légères. Grâce à cela, un effet panoramique a pu être créé, donnant à l’espace du séjour une générosité visuelle. Les angles sont libérés de colonnes structurelles, ce qui leur donne un aspect très ouvert. Les jardins d’hiver qui se déploient aussi le long des angles accentuent encore plus cet effet.
Tout l’effort a été concentré pour créer une façade qui soit la plus ouverte possible et donner aux appartements une connexion visuelle généreuse avec les jardins d’hiver.
Les jardins d’hiver sont pourvus de façades entièrement en verre, du sol au plafond, afin d’atteindre une générosité maximale. Du point de vue de la sécurité incendie, les jardins d’hiver sont considérés comme des espaces intérieurs. Cela signifie qu’une distance de 60cm de matériaux de façade non combustibles doit être respectée. Cette distance pourrait être atteinte par l’addition de tous les éléments verticaux et horizontaux comme l’épaisseur de la dalle ou la légère surélévation d’un détail de pied du garde-corps.
UNE MATÉRIALITÉ LÉGÈRE
La matérialité du projet tente de capter fidèlement l’esprit français en usant de matérialités modernes et légères, voire dans un style moderne. L’emploi massif du verre et de voiles ondulés ainsi que le béton apparent des jardins d’hiver sont les éléments principaux qui composent ce projet. Le bâtiment est organisé horizontalement et les angles ouverts visuellement confèrent de la qualité spatiale aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Inconsciemment, cette matérialité industrielle, qui rend le projet en apparence globalement indépendant de l’artisanat, fut d’un grand secours lors de l’exécution, très aventureuse.
La façade constitue une interface entre l’espace public et les appartements privés. Elle représente et exprime la vie qui se cache derrière d’une manière directe. Même si les appartements sont couverts avec le verre des portes coulissantes, la clarté formelle depuis l’espace public est assurée.
Les détails du bâtiment sont conçus de manière lisse afin de créer autant que possible une tension visuelle entre le verre et tous les autres matériaux. Ainsi, les angles en verre du rez-de-chaussée qui assurent l’aspect ouvert sont accentués et continuent aux étages supérieurs avec les portes coulissantes du jardin d’hiver. Les tôles ondulées et la clôture de la cour sont sur sur le même nu que le verre pour unifier les deux bâtiments et réduire l’effet quasi-inévitable de collage de différents matériaux.
Les tôles ondulées sont de couleur champagne tout comme l’aluminium des cadres de fenêtres. La couleur a été choisie pour donner une image plus noble au logement social, encore ancré dans le modernisme des années 50, et contrebalancer l’image pauvre et stigmatisée des logements sociaux.
Site : Porte de Montmartre, Paris, 18ème arrondissement
Programme : 50 appartements avec jardins d'hiver, cabinet de dentiste, centre de protection maternelle et infantile et parking souterrain de 31 places
Maîtres d'ouvrages : Paris Habitat OPH
Maîtres d'oeuvres : Atelier Kempe Thill ; Architectes associés : Fres Architectes ; Plan urbain : Atelier Choiseul ; Architecte Paysagiste : Christine Dalnoky ; Ingénierie énergie et environnement : ALTO Ingénierie ; Ingénierie structure : VP&Green; Economie : Bureau BMF
Entreprise générale : Outarex
Surface bâtie : 5 598 m2 (brut, compris parking)
Coût : 7 300 000 €
HT ; 1304 €
HT/m2 brut
Date de livraison : Mai 2016
Maître d’ouvrage : IMMOBILIERE 3F / EPA ORSAEquipe de maîtrise d’œuvre :ARCHITECTE : DE JEAN … [...] |
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