Vue d'ensemble de l'étagère "Construction" avec Martin Szekely de dos, 2015, bambou et laiton |
Dans l’ancienne
prison Boulan, qui servait jusqu’alors de réserves au musée des Arts décoratifs
et du Design de Bordeaux, sont présentées du 26 avril au 16 septembre
prochains une quarantaine d’œuvres du designer Martin Szekely sélectionnées
suivant un titre-thématique transversal : « Construction ». |
Six ans après la dernière
exposition phare du designer au Centre Pompidou intitulée « Ne plus dessiner », qui marquait une
forte volonté de revenir à un état primal du meuble, l’exposition « Construction » organisée par le madd-bordeaux s’attache à présenter
le travail de Martin Szekely comme une recherche constante d’élémentarité et de justesse.
« Nous voulions montrer aux visiteurs l’importance de l’œuvre de Szekely,
très peu connu du grand public, sans pour autant être rétrospectif. « Construction »
est un thème transversal à toute sa démarche qui est
de l’ordre de la concentration et de la moins-disance. À force de remonter à
l’essence même de toute pièce de mobilier, d’aller jusqu’aux limites de ce que
peut apporter un matériau, d’atteindre une telle précision dans la conception
de chaque plan, il se dégage une beauté accessible à tous, portée par
l’efficacité constructive », nous explique Constance Rubini,
commissaire de l’exposition et directrice au musée des Arts décoratifs
et du Design de Bordeaux. Sélectionnées
pour mettre en évidence cette approche, les œuvres choisies sont scénographiées
par le designer lui-même dans ce nouveau lieu
d’exposition qu’est l’ancienne prison Boulan, située à l’arrière de l’hôtel de
Lalande où se trouve le musée. Les œuvres qui appellent le plus de modularité
et d’extensivité sont situées dans les cours centrales : les pièces Opus (2016), Unit (2011), Construction (2015) ou encore Heroic Shelves 365 (2009) y sont exposées en très grande dimension. Dans les
cellules jouxtant ces volumes, des pièces plus circonscrites telle que la
chaise Cornette
(autour de 1978), la chaise Cork
(2000), Manière Noire (2013) ou l’Armoire (1999). Dans l’une des alvéoles
également, la pièce The Drawers and I
– un grand mur de collections, constitué uniquement de tiroirs
superposés et juxtaposés de différentes profondeurs – vient tout
juste d’être produite par Szekely. Tirant parti de la rudesse d’espaces encore
non réaménagés, le designer s’est attaché
à montrer son mobilier de manière franche et directe, créant ainsi une relation
d’immédiateté avec le public : des pièces telles quelles dans un lieu tel quel. « Il
y a une quête d’essentialité dans le travail de Szekely qui cherche à aller au
plus près de la définition d’une table, d’une chaise, d’une étagère en gommant
tout superflu. Cette condition extrême fabrique une dimension ornementale
intéressante, non décorative mais issue des assemblages et des contrastes de
surfaces », ajoute la commissaire. Elle précise que le travail du designer
sur ses nombreuses pièces développées avec des industriels, tel que le verre
Perrier ou le mobilier JCDecaux, sera également présent, hors les murs de cette
exposition, celle-ci étant plus précisément dédiée à ses expérimentations pour
des galeries. Plage de silence Cette recherche intime, au
plus près de l’acte de fabriquer, conduit le designer à jouer avec
cet essentiel. « Refroidir, ce pourrait être un mot d’ordre
en ces temps de surchauffe où tout semble vouloir – et devoir –
solliciter les sentiments, les sensations et l’affect. N’aurions-nous pas, au
contraire, de plage de silence et d’espace pour le retrait ? Les meubles,
par leur nature ordinaire, remplissent parfaitement ce rôle.
C’est ce rôle que je rappelle : je mets en
évidence leur origine, leur définition, leur mise en œuvre et leur destination »,
dit Martin Szekely. Son approche du
monde par soustraction est une manière de revenir à l’essentiel, au fragile, mais
aussi d’introduire de l’inquiétude dans les positions d’équilibre, de risquer
par la matière. Cette attitude est particulièrement
lisible dans ses réalisations d’étagères qui expriment les lois du contreventement. Chacun des assemblages engendre
un pas, un décalage, un triangle laissé visible, et chaque plan traduit un état
de souplesse, de minceur et de légèreté issu d’une quête d’optimisation absolue
de la matière. Il n’est d’ailleurs pas étonnant que le designer
s’intéresse de près aux matériaux composites : « Dans le passé, les objets étaient le plus souvent soit
mono-matières (terre, cuir, bois, pierre…), soit faits de matériaux juxtaposés
ou assemblés. Ces dernières années a eu lieu une révolution : l’avènement
de la colle, qui a permis d’envisager les “matériaux composites” (fibre de
carbone et résine, nid-d’abeilles en aluminium et feuilles d’aluminium, plâtre
haute densité, latté de bambou…). Un matériau composite surpasse en solidité la
résistance de chacun de ses composants pris isolément. De leur cohésion résulte
un matériau inédit, pourvu de qualités nouvelles. Cela revient à envisager une
infinité de possibilités pour chacun des cas. Ainsi, nous pouvons penser le
matériau en fonction de l’objet à réaliser, et non plus adapter l’objet au
matériau existant, ce qui modifie en profondeur l’approche du projet », explique
Martin Szekely à Constance Rubini lors d’une conversation
épistolaire provoquée pour l’occasion, et qui constituera une pièce maîtresse
du catalogue Construction associé à
l’exposition du musée des Arts décoratifs et du Design de Bordeaux. |
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