Jeu de construction MAT, composé de plaques de béton, poutres de bois de chêne et briques de terre. |
Qu’il s’agisse d’architecture ou de design, l’agence Mutations Architectes – lauréate des Ajap 2016 – défend une approche du projet qui implique l’usager et l’encourage à poursuivre l’aventure. Nous avons questionné l’un de ses trois membres fondateurs sur les modes opératoires engagés à l’occasion de la production de trois pièces singulières : une table, un lavabo et un jeu de construction. Ce dernier sera exposé à la Cité de l’architecture jusqu’au 9 avril 2017 à l’occasion de l’exposition collective Ajap 2016 qui présentera le travail de 20 équipes de maîtres d’œuvre. |
En quoi vos approches de l’architecture et du design peuvent-elles se répondre, voire se compléter ? Tant dans le projet architectural que dans l’objet de design, nous apprécions l’aspect expérimental. Ce qui a pour conséquence un réel intérêt pour les imperfections, les aspérités, les imprévus qui racontent l’histoire de l’objet et des humains qui le font. La boîte de jeu de construction en bois, béton et terre crue fait de son utilisateur un expérimentateur de la matière et de sa mise en œuvre, qu’il appartienne au monde de la construction ou qu’il soit néophyte. Les pièces de bois de ce jeu sont issues de la récupération de parquet sur chant ou de parquet industriel. Pour les pièces d’argile, nous avons déjà constitué un stock issu des forêts franciliennes mais il se révèle pour l’instant trop hétérogène.
Quels enjeux constructifs testez-vous à travers ce travail sur l’objet ? Nous favorisons les assemblages en appui simple, la simplicité constructive et la lisibilité afin de privilégier une forme de do it yourself à partir de la pièce livrée. Nous cherchons à ce que chacun soit en mesure de reproduire lui-même l’objet et de l’améliorer. En ce sens, nous procurons aux utilisateurs les plans, axonométries, écorchés ou quantitatifs qui nous ont permis de le réaliser. La table avec son assemblage de bois à clavettes ne requiert qu’un maillet pour être montée et démontée rapidement. Ce faisant, l’usager comprend la fonction de chacune des pièces qui, somme toute, restent des tasseaux de bois standard qu’il lui est possible de remplacer, de rallonger, de raccourcir. Librement inspirée des systèmes de construction des temples japonais qui encaissent sans broncher les tremblements de terre siècle après siècle et dont on remplace certaines pièces régulièrement sans dénaturer le principe général, cette table, haute, longue ou basse vous demande juste de la réajuster de temps à autre.
Quel est votre lien aux industriels, artisans et entreprises ? Nous avons conscience d’être architectes et non pas artisans ou encore ingénieurs travaillant dans le cadre d’une chaîne industrielle. Nous ne pourrons jamais rivaliser avec le savoir et l’expérience des gens du métier, dont nous sommes souvent envieux, tapis derrière nos ordinateurs, et à qui nous devons laisser le plus souvent le soin de réaliser ce que l’on conçoit. En revanche, nous estimons qu’il y a un juste milieu entre l’achat passif des fournitures industrielles et sérielles qui nous sont proposées et la réalisation d’un objet, à façon, par des artisans. Ce juste milieu pourrait être celui où chacun bricole à la mesure de son talent grandissant, produisant les objets dont il a réellement besoin et se soustrayant à la dictature des normes qui ne l’intéressent guère. Le lave-main en béton, par exemple, est livré sans garantie. Et pourtant, une batterie de tests lui a permis de valider une étanchéité satisfaisante de plus de 24 heures sans que le niveau d’eau ne baisse, grâce à son coffrage lisse qui ferme les pores du béton. Les fixations en attente ou les réservations pour la robinetterie répondent aux exigences du plombier qui le mettra en place. C’est un travail d’équipe. Comme le soulignait élégamment un garagiste, dans le bâtiment, tout est affaire de débrouillardise, de mise au point de détail unique, de bricolage au sens noble du terme, de prouesse d’inventivité. A contrario, en mécanique, dans la majeure partie des cas, il faut attendre patiemment la livraison de la pièce de la Suzuki Bandit qui fait défaut. Cette passivité nous est insupportable ! Nos pièces ont donc à cœur de s’adapter à l’usage (changeant ?) qu’en voudrait faire leur propriétaire et non pas de rendre ce dernier esclave de ces petites choses qui nous entourent. |
> Autres produits dans la même catégorie |
VOIR ÉGALEMENT
>> Actus brèves
Lors de la dernière Paris Design Week, les designers Claire Renard et Jean-Sébastien Blanc, cofond… [...] |
La Villa Noailles, modèle de l’architecture moderne conçue par Robert Mallet-Stevens, accueille … [...] |
La designer et chercheuse Lucie Ponard explore les paysages qui l’entourent et métamorphose les t… [...] |
À l’occasion du Fuorisalone, l’exposition Alcova présentait à quelques kilomètres de Milan,… [...] |
Pour ses nouveaux espaces de bureaux à la carte à Louvain-la-Neuve, en Belgique, Silversquare a s… [...] |
Surélévation d’un terminal des années 1930, cette opération montre qu’une entreprise a le … [...] |
Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :
Vous n'êtes pas identifié. | |||
SE CONNECTER | S'INSCRIRE |
> Questions pro |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 4/6
L’apparente exhaustivité des rendus et leur inadaptation à la spécificité de chaque opération des programmes de concours nuit bien souvent à l… |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 3/6
L’exigence de rendus copieux et d’équipes pléthoriques pousse-t-elle au crime ? Les architectes répondent. |