Il y a une tradition nationale selon laquelle tout le monde réclame des réformes et les conteste dès qu’elles sont engagées. La consultation sur le Grand Paris n’échappe pas à cette règle.
Depuis longtemps, hommes politiques, architectes, ingénieurs et urbanistes les plus avisés exigeaient une remise en cause des structures territoriales de la métropole parisienne et la mise en œuvre d’un projet qui engage de profondes mutations. La consultation sur le Grand Paris a eu le mérite de mettre les pieds dans le plat mais elle a très vite été la cible de sarcasmes. Beaucoup dénoncent l’usine à gaz ou l’opération de communication du président de la République. Elle est aussi probablement victime de la concurrence entre équipes et, plus sûrement, de l’aigreur de celles qui n’ont pas été retenues. Mais avant même son lancement, c’est la propre légitimité des architectes dans cette aventure qui avait été suspectée, notamment leur aptitude à penser l’échelle du grand territoire. Il est vrai qu’en France, le rôle qui leur est attribué est traditionnellement dévolu aux grands corps des Ponts et Chaussées. On agita non sans raison le spectre d’un geste Beaux-Arts ou d’une idée fumeuse, du genre habilement customisée pour finir dans les belles collections du Frac Centre en compagnie d’un dessin de Yona Friedman. Mais au-delà de cette caricature, les enjeux devant lesquels sont placées ces équipes d’architectes (néanmoins pluridisciplinaires) les obligent à repenser leur fonction et leur mode d’intervention au sein de notre société. Même si l’on attend d’elles des propositions concrètes, que ce soit sur la forme ou la place de l’anneau périphérique, les types d’habitat ou le nombre de lignes de tramway, ce n’est pas à l’aune de ces suggestions que nous pourrons juger de la pertinence de leurs projets à l’échelle de l’histoire. Cette consultation ne sera pas vaine si les équipes se montrent davantage capables de renouveler notre manière d’analyser le réel et de proposer, à partir de là , de nouveaux outils pour agir sur le monde de façon déterminante.
Dans l’impatience des résultats de la consultation, d’a s’est penché, en cette fin d’année, sur le périphérique parisien. Architectes, historiens, écrivains ou photographes posent aujourd’hui sur lui un regard différent. Modifier notre point de vue, c’est ouvrir de nouvelles voies, se détacher des affects inhibiteurs, s’autoriser à penser ce que l’on tenait pour impensable. Ce sont ces expériences que nous allons tenter de vous faire découvrir. EC