Des vestiges datant du IXe siècle avant notre ère ont été découverts en Tunisie, et de nombreux monuments en pisé sont inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco : tronçons de la Grande Muraille de Chine, palais du Potala au Tibet et de l’Alhambra à Grenade, ksar d’Aït-Ben-Haddou au Maroc, etc. Les tulous du peuple Hakka, érigés au sud-est de la Chine entre le XVe et le XXe siècle, font partie des constructions les plus spectaculaires : ces maisons communautaires de plan circulaire, dont le diamètre peut atteindre 80 m, ont des murs d’enceinte d’environ 20 m de hauteur. En France, le pisé est présent dans le bassin de Rennes et au sud de Toulouse, mais le patrimoine est particulièrement riche en Auvergne-Rhône-Alpes, avec 40 % de l’architecture vernaculaire de certaines régions et plusieurs immeubles dans le centre de Lyon.
La renaissance internationale du pisé vers 1790 doit beaucoup à l’architecte-entrepreneur François Cointeraux, auteur de nombreux ouvrages traduits en plusieurs langues. Deux siècles plus tard, un autre pionnier, l’artiste et entrepreneur autrichien Martin Rauch, a révolutionné le pisé à la fois sur le plan technique et esthétique. La maison qu’il a construite pour sa famille en 2008 à Schlins, dans le Vorarlberg, est un manifeste pour la terre crue qui a fait le tour du monde. Le pisé est arrivé sur le devant de la scène quand des lauréats du prix Pritzker ont commencé à le mettre en œuvre : Wang Shu et Lu Wenyu pour la maison d’hôtes du campus de Hangzhou, en Chine ; Herzog & de Meuron pour la Maison des plantes de Ricola, près de Bâle, etc.
À cause de l’intensité du travail manuel qu’il demande, le pisé reste un matériau haut de gamme dans les pays industrialisés. La préfabrication vise une réduction des coûts et de la durée des chantiers, tout en améliorant les conditions de travail des ouvriers. Elle permet aussi de réaliser des bâtiments d’envergure en se libérant des contraintes climatiques : les chantiers en terre crue ont généralement lieu de mars à octobre. L’essor du pisé s’explique également par une communication croissante sur des exemples inspirants, comme les finalistes du TERRA Award1. On ressent par ailleurs les efforts de vulgarisation et de formation des acteurs de la filière : le laboratoire CRAterre2, AsTerre3 (Association nationale des professionnels de la terre crue) et le centre de recherche et d’expérimentation amà co4, qui fait un formidable travail de pédagogie. Le dernier frein à lever est celui de la réglementation…
1. terra-award.org
2. craterre.org
3. www.asterre.org
4. amaco.org