Plan masse |
Dossier réalisé par Karine DANA La transformation de l’hôtel-dieu, fermé
depuis 2010 pour inadéquation avec les exigences hospitalières d’aujourd’hui,
est l’occasion de revenir sur cet îlot institutionnel de 300 mètres de long
aujourd’hui privatisé. Sa reconversion s’est appuyée sur la capacité
intrinsèque de ce patrimoine à s’ouvrir à la ville et accueillir de nouveaux
programmes. « Quelles étaient les intentions des architectes qui sont
intervenus avant nous ? » se sont d’abord demandé les maîtres d’œuvre. |
« C’est le monument qui commande », explique Didier Repellin, architecte en chef des Monuments historiques qui a entrepris la restauration et la réhabilitation de l’Hôtel-Dieu en binôme avec les architectes Albert Constantin et Claire Bertrand (AIA associés). Il s’est agi en effet de comprendre et d’interpréter tous les savoirs en place pour définir les logiques d’interventions, entre diagnostics et prescriptions. À partir de documents historiques, gravures, photographies et récits, l’équipe est ainsi remontée aux positions des architectes emblématiques de l’Hôtel-Dieu – Jean et Ferdinand Delamonce, Antoine Picquet et César Laure, Jacques-Germain Soufflot, Paul Pascalon Jean-Gabriel Mortamet. Elle a ainsi pris le parti de comprendre d’abord le potentiel structurel et patrimonial pour imaginer un nouveau programme, et non d’assujettir l’îlot existant à un nouvel usage.
En rupture avec les logiques de
boîte dans la boîte, de doublage et de cloisonnement sollicitées au siècle
dernier pour répondre aux besoins du XXe siècle
en termes de séparation des malades et d’hygiénisme, la nouvelle
programmation du Grand Hôtel-Dieu s’est appuyée sur les fonctions et la
capacité de sa structure – 300 mètres de
façade en pierre ne souffrant d’aucune fissure, plafonds à la française,
grandes portées, volumes intérieurs de 7 mètres sous plafond pour les
parties des XVIIe et XVIIIe siècles. Et c’est autour
de ses trois dômes marquant chacun un temps de l’histoire que les architectes
ont imaginé de nouvelles activités – le grand dôme de Soufflot transformé
en Hôtel, le dôme des Quatre
Rangs en Cité internationale de la gastronomie et le Dôme
Pascalon en bureaux et commerces.
La principale gageure a
été de reconnecter ce monolithe de 2 hectares au tissu urbain et d’envisager
une porosité et une capillarité nouvelles. Implanté sur la presqu’île de Lyon,
face au quai Jules-Courmont, entre les rues de la Barre au sud,
Childebert au nord et Bellecordière à l’ouest, le Grand Hôtel-Dieu s’adresse
aujourd’hui à la ville avec ses longues galeries et ses huit points d’entrée,
dont sept sont dédiés au public alors qu’un accès unique, jusqu’alors, le
desservait. Ses cours et jardins – jusqu’ici envahis par les voitures –
lui ont été restitués, aménagés en lieu de détente et plantations d’apothicaires, selon la
tradition des botanistes lyonnais. Ils sont autant
d’espaces privés-publics appropriables et protégés, offrant de nouvelles manières
de traverser la ville.
Entre le grand paysage du Rhône et le tissu dense de la presqu’île,
le Grand Hôtel-Dieu agit en effet tel un filtre urbain. Une cinquième façade conçue par l’agence
AIA se destine aujourd’hui à fabriquer un « arrière » quand celles de
l’Hôtel-Dieu étaient historiquement tournées sur le Rhône. Abritant trois
nouveaux corps de commerces et bureaux, elles contribuent à affirmer la
nouvelle transversalité de l’ensemble urbain et engagent d’autres pratiques
avec la rue Bellecordière. Autre pièce de raccord, la verrière de la cour du Midi
qui n’apportait jusqu’à présent aucune qualité d’espace public est aujourd’hui dédiée aux
commerces et restaurants. Dans la lignée des trois dômes de l’Hôtel-Dieu,
cette large couverture reprend la volonté de travailler les grandes hauteurs
libres et de chercher les relations avec le ciel.
Par ses alternances d’espaces intérieurs et extérieurs, ses enchaînements
de salles en plein air, ses quatre dômes, ses arcades et multiples entrées, le Grand
Hôtel-Dieu peut devenir le vecteur d’une nouvelle urbanité. Porté par Eiffage
Immobilier, il est aussi la plus grande opération de reconversion privée
d’un monument historique en France. Soumis à un bail à construction, il demeure
néanmoins la propriété des Hospices civiles qui percevront un loyer sur quatre-vingt-dix
ans. Très peu courant en France, ce montage permet à la collectivité de garder
la maîtrise du devenir de son patrimoine en soumettant son développeur à des
conditions d’entretien, de restauration et de ré-usage en termes de
programmation et d’ouverture au public.
[ Maître d’ouvrage : Eiffage Construction, désigné lauréat de la consultation. Il en a
confié la réalisation, pour son compte, à Eiffage Immobilier associé à Générim.
Eiffage a signé le bail à construction pour une durée de 99 ans. Les Hospices civils
de Lyon (HCL) récupéreront l’usage du bâtiment au terme du bail. En juin 2015,
Eiffage a cédé le bail à Crédit Agricole Assurances pour l’intégralité du site,
excepté pour les volumes de la Cité internationale de la gastronomie qui ont
été cédés à la Métropole de Lyon.
Maîtres d’œuvre : Architecte mandataire : AIA Architectes (Albert
Constantin et Claire Bertrand) ; Architecte en chef des Monuments historiques :
Didier Repellin – RL&A
Architecte décorateur pour l’Hôtel InterContinental :
Jean-Philippe Nuel
BET structure monument historique
et verrière : AIA Ingénierie
BET structure bâtiments neufs :
Betrec
BET
Façades neuves : Arcora

Fluides : Tem partners
Paysagistes :
AIA Territoires
Surface : 51 500 m2 (40 000 m2 de
bâtiments réhabilités et reconvertis + 11 500 m2 de
constructions neuves)
Programme : commerces de moyennes surfaces, boutiques et restaurants : 17 100 m2 ;
hôtel 5 étoiles InterContinental Resort de 138 chambres : 13 500 m2 ;
bureaux : 13 600 m2 (neufs : 6 600 m2,
dans bâtiments anciens : 7 000 m2) ; Centre de
conventions : 2 900 m2 ; Cité de la gastronomie :
3 600 m2
 ; 11 logements : 800 m2
 ; espaces extérieurs : 8 000 m2
Coût :
180 millions d’euros HT
Calendrier : concours, 2010 ; livraison première tranche, novembre 2017 ;
ouverture au public, 26 avril 2018 ; livraison totale, fin 2018 ]
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