Pour se développer, les compagnies minières privées devaient assurer deux fonctions de base : extraire et exporter le charbon et, en complément, loger les mineurs et leurs familles. Pour cela, elles ont dû construire des fosses bien sûr, des lignes de chemin de fer, édifier des terrils, mais également un nombre très important de cités minières. Aujourd’hui encore on dénombre 563 cités minières, plus de 80 000 logements, des écoles, des salles des fêtes, des équipements sportifs, des pharmacies, dispensaires, hôpitaux… Tout une série d’équipements que les compagnies minières ont construite pour attirer, fidéliser et s’assurer la disponibilité de leur main-d’œuvre. Outre ce patrimoine bâti, les éléments néonaturels, notamment des bassins d’affaissement induits par une exploitation intensive, ont transformé la nature des sols jusqu’à en modifier l’hydrologie de surface, inversant des cours d’eau, créant de vastes zones humides.
Une armature territoriale atypique
Pour autant, le territoire du bassin minier tel qu’inscrit sur la liste du patrimoine mondial n’est pas une collection de sites exceptionnels qui seraient déconnectés les uns des autres. Ce sont en effet les liens entre les fosses, les cavaliers1, les cités, les espaces de productions, mais aussi les confrontations entre les paysages préexistants et ces témoignages de l’exploitation minière qui révèlent l’impact qu’a eu la mine sur le territoire. Ainsi, le paysage du bassin minier prend tout son sens quand on l’envisage d’une part à toutes les échelles, de la maison au « quartier minier » au « grand paysage », et dans toutes ses dimensions, bâties et néonaturelles, exceptionnelles et plus banales, reconverties et en devenir. Se dessine alors un paysage culturel en évolution au cœur duquel vit plus d’un million d’habitants. Le périmètre inscrit sur la liste du patrimoine mondial devait être forcément plus restreint car extrêmement sélectif, mais il porte les valeurs exceptionnelles et universelles d’un territoire plus vaste encore.
La treille minière, un nouvel imaginaire territorial
Face à un héritage minier foisonnant et dispersé, comment rendre lisible et visible ce paysage culturel vivant ? Comment mettre en évidence l’importance des liens au-delà de la valeur intrinsèque des éléments ? Comment faire en sorte qu’ils soient pris en compte dans les projets d’aménagement et pour la planification urbaine ?
C’est pour répondre à ces objectifs que la notion de treille a été imaginée. Issue d’ateliers collaboratifs organisés dans le cadre d’une étude sur la qualification et la protection des paysages miniers menée avec le paysagiste Pierre-Yves Pasco et l’architecte et urbaniste Anne Gentil, elle est porteuse d’un nouvel imaginaire territorial : les cités minières représentent les grappes, les terrils et tous les espaces néonaturels sont les feuilles et l’ancien réseau de voies ferrées en est les rameaux. La treille s’étend et se connecte aux centres urbains et aux réseaux classiques de circulation.
Loin d’une image abstraite, la treille minière est (...)