La maison japonaise : entre chaos et pureté

Rédigé par Olivier NAMIAS
Publié le 22/05/2011

SkyTrace de Kiyoshi Sey Takeyama à Tokyo

Dossier réalisé par Olivier NAMIAS
Dossier publié dans le d'A n°201 Enseignant, architecte et chercheur, Yann Nussaume a résidé environ cinq ans au Japon, et publié de nombreux ouvrages sur l'architecture japonaise*. Entre-deux, tradition, développement durable, originalité…, il explique les facteurs qui contribuent à rendre la maison japonaise contemporaine si différente, et revient sur ce qu'elle peut apprendre à l'architecture occidentale.

DA : Revues spécialisées, livres, sites Internet publient régulièrement des projets de maisons individuelles en provenance du Japon. Ces exemples sont toujours étonnants, radicaux, originaux. L'Archipel serait-il la terre promise de l'habitat individuel ?

Yann Nussaume : Si le rêve du Japonais est certes la maison individuelle, il ne faut pas se laisser abuser par les images et penser que ces exemples soient représentatifs de la production architecturale nipponne en matière d'habitat individuel.

J'ai mené il y a quelques années, avec une étudiante, une étude1 sur la maison de constructeur au Japon. La répartition entre les maisons d'architecte et les maisons traditionnelles – construites en bois par des constructeurs locaux – ou manufacturées par des fabricants industriels était similaire à celle du marché français. C'est-à-dire que le marché occupé par des architectes indépendants ne représentait que 5 % à 8 %. La population japonaise étant plus nombreuse que la nôtre, la durée de vie des constructions assez courte, le rythme de renouvellement plus rapide, on peut avoir le sentiment que le contexte japonais est plus favorable à l'éclosion d'une construction individuelle de qualité, mais ce n'est pas si simple.

Je ne suis pas certain qu'il faille y voir le signe d'une sensibilité particulièrement élevée des Japonais pour l'architecture. On avait surtout observé une production de logements équivalente à quatre fois celle de la France pour une population qui ne compte que le double. Les maisons individuelles représentaient 60 %, un chiffre relativement similaire à celui de notre pays.


DA : À quoi ressemble la maison de constructeur japonais ? Est-elle une solution économique ?

YN : Ces maisons sont identifiables à leurs références occidentalisantes, plus ou moins inspirées de modèles occidentaux. Il en existe une grande variété. Il faut savoir qu'au Japon, contrairement à ce qui se passe en France, la maison sur catalogue n'est pas la plus économique. Elle est produite par de grands conglomérats (Sekisui, Daiwa…) qui possèdent des laboratoires d'études comparables au CSTB. Elle profite donc de recherches internes très importantes sur le parasismique, l'acoustique, l'accessibilité pour les handicapés. C'est un produit d'assez bonne qualité, ce qui explique son prix relativement élevé.

Une personne qui cherchera une solution d'habitat économique se tournera plutôt vers des solutions de type maisons « poteaux-poutres Â» en bois, réalisées par des artisans locaux (environ 60 % du marché). Elles peuvent être 40 % à 70 % moins chères que celles des industriels. Il y a également les maisons en « pré-cut Â» bois et des packages importés de pays étrangers.


DA : Qu'est-ce qui explique tout de même cette créativité exacerbée dans les 5 % à 8 % dévolus à la maison d'architecte ? Est-ce une moindre emprise des réglementations ?

YN : Avant de répondre à cette question, il me paraît important de mentionner que la créativité n'est pas réservée uniquement aux architectes. On reste toujours en admiration face aux maisons traditionnelles japonaises qui se sont élaborées progressivement par l'intermédiaire du savoir-faire des artisans : charpentiers, jardiniers… Naturellement, des érudits ont inspiré ces architectures, mais elles sont surtout le reflet de recherches de solutions techniques et esthétiques mises en place au cours du temps. Elles soulignent le lien subtil entre la société japonaise et son environnement.

Concernant la réglementation actuelle au Japon, elle est plus lâche que la nôtre sur certains sujets – comme par exemple la thermique – et plus rigoureuse sur d'autres. La prise en compte du risque sismique est très contraignante pour les architectes, notamment au niveau structurel. Elle interdit désormais le mélange de matériaux ou l'utilisation du bois en centre-ville, l'incendie étant souvent la suite logique d'un séisme. Sur d'autres points, on a l'impression que l'architecte se met d'accord avec son client pour passer outre certains dispositifs de sécurité : je pense à ces maisons aux escaliers vertigineux par leur balancement et l'absence de protection ; aux toitures accessibles où l'on a omis d'installer la moindre rambarde (comme la Roof House réalisée en 2001 par l'agence Tezuka Architects), ce qui serait totalement impossible en France. Cette liberté est peut-être un point fort.

Ensuite, les architectes japonais sont astucieux et savent trouver les ruses pour maintenir des coûts de construction bas en dépit d'une réglementation contraignante. Il ne faut pas non plus être naïf : la qualité des projets de nos confrères japonais est aussi largement due au travail de très nombreux stagiaires dans les agences. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder la multitude de maquettes que certaines agences reconnues produisent lors de la création d'une maison.


DA : Quels rapports les architectes entretiennent-ils avec leurs clients ?

YN : Les Japonais sont peut-être plus aventureux et font peut-être davantage confiance aux architectes. Le client qui va faire la démarche de travailler avec un architecte va le choisir pour son style, qu'il est censé connaître, et l'architecte fait un peu figure de maître. Les valeurs ne sont pas les mêmes : l'idée d'exploit est assez forte dans l'architecture japonaise ; l'architecte est censé donner le meilleur de lui-même, et le client supposé lui laisser les moyens d'atteindre cet sorte d'idéal, permettre la réalisation d'un travail parfait. D'où le vÅ“u des architectes japonais de trouver des clients aventureux. Mais qui ne rêve pas, en France ou au Japon, de trouver des clients aventureux avec de l'argent, pour tenter des projets originaux ?

Notons que cet amour du travail bien fait est partagé par les entreprises et la volonté commune d'atteindre l'exceptionnel. Les architectes semblent leur faire plutôt confiance, les rapports sont assez différents de ceux que l'on connaît en France. La notion de sinistre n'est pas non plus la même, le travail des architectes s'inscrit dans la vision d'un monde vivant en mutation et les clients sont probablement moins sensibles à l'idée que leur bâtiment, une fois construit, doive être totalement immuable. Dans un pays en proie à des tremblements de terre assez fréquents, une telle compréhension n'est pas étonnante. Au Japon, une maison perd rapidement de la valeur au cours des années.


DA : Ce qui est également frappant dans les maisons japonaises dessinées par les architectes, c'est leur aspect totalement inédit. Entretiennent-elles un rapport, même lointain, avec la tradition – pour reprendre ce lieu commun qui veut souvent que la culture japonaise ait su allier modernité et tradition – ou se positionnent-elles en rupture totale ?

YN : Il existe à mon sens une grande continuité entre la maison japonaise traditionnelle et la maison japonaise contemporaine. Le lien entre l'ancien et le nouveau s'est construit progressivement, au fur et à mesure que les architectes japonais ont redécouvert l'architecture traditionnelle et, au-delà, les caractères spécifiques de l'espace japonais. Tout un groupe d'architectes peut être crédité de cette redéfinition de la maison japonaise : par exemple Kiyoshi Seike, Kazuo Shinohara, Tadao Andô ont su retrouver dans leur architecture les thèmes de la maison japonaise sans passer par les formes, en opérant sur la continuité spatiale, la sensation de profondeur, la composition par division de l'espace plutôt que par addition.

À partir des années 1960-1970, Kazuo Shinohara a vraiment favorisé le passage de formes et d'espaces traditionnels vers une certaine abstraction. On peut le voir dans la Umbrella House (1961), la House in White (1966)… Il a été le professeur de toute une génération qui a débuté dans les années 1970. Un architecte comme Toyô Itô a fait réfléchir sur l'importance de la légèreté et des éléments climatiques dans la notion japonaise d'habiter. Des architectes comme Shigeru Ban ou Kengo Kuma ont poussé des recherches étonnantes en déclinant l'utilisation de divers matériaux.


DA : Et aujourd'hui ?

YN : Récemment, à travers les travaux d'architectes comme Kazuo Sejima, Ryue Nishizawa et la nouvelle génération en germe, on observe également une architecture moins articulée, qui ne fonctionne pas à partir d'une logique hiérarchique d'un tout avec des parties. La culture japonaise traditionnelle hante les logiques spatiales contemporaines, mais c'est la même chose dans notre culture. Les notions spatiales japonaises de oku (« l'espace le plus intérieur Â»), de ma (« espace Â») ont fait réfléchir de nombreuses personnes au cours des dernières décennies, en pointant notamment l'importance de la phénoménologie. Par exemple, la notion d'espace a été développée après la Seconde Guerre mondiale par l'historien Mitsu Inoue, après sa lecture de l'ouvrage Espace, temps, architecture de Siegfried Giedion qui avait mis en avant l'idée « d'espace mouvement2 Â». Par la suite, Günther Nitschke, en 1966, dans un numéro de la revue Architectural Design, avait souligné l'importance du lieu dans la compréhension de la notion d'espace nippon. Plus tard, à la fin des années 1970, Arata Isozaki avait organisé une exposition itinérante sur le $ma$ en mettant en évidence son sens par l'importance des transformations des activités des habitants dans l'espace plus que par ses dimensions. Le concept schématique de la Primitive Future House et la Final Wooden House (2008) à Kumamoto, de Sou Fujimoto – où les assemblages spatiaux ne prédéfinissent pas les fonctions et les utilisations mais laissent aux habitants des lieux à investir et définir – me semblent faire écho à cette vision de l'espace.

Lorsqu'on regarde l'architecture contemporaine, il est clair qu'elle s'imprègne au plus profond d'elle-même d'un certain rapport au monde nippon, transposé d'une manière contemporaine. Il y a beaucoup à apprendre de cette transposition. Lorsque les Occidentaux regardent l'architecture japonaise, ils ont tendance à opposer la tradition à la modernité, ce qui serait compris comme l'influence occidentale. Pourtant, inversement, lorsque nous regardons l'évolution de notre architecture occidentale au XXe siècle, nous comprenons ses transformations plutôt comme une évolution et non comme l'influence d'autres cultures comme celle du Japon. Pour ma part, je pense qu'il existe des influences mutuelles, mais que l'architecture japonaise, comme la nôtre, reste profondément en lien avec la logique de son milieu.


DA : Autre signe de continuité, le peu de cas que la maison japonaise semble faire des questions de confort. La célèbre maison construite par Sejima, avec ses parois en métal de 18 millimètres, ne semble pas être une merveille d'isolation thermique, pas plus que la maison traditionnelle avec ses shoji. Comment expliquez-vous cela ?

YN : La notion de confort est liée à celle de milieu3 (fûdo) définie par Augustin Berque comme la relation d'une société à son environnement, dépendant des phénomènes trajectifs4 entre culture et géographie5 et posant la question de l'habiter. Ce géographe spécialiste du Japon explique que « la langue japonaise lie plutôt l'habiter (sumai) à des images de transparence et d'apaisement : celle de l'eau qui, s'immobilisant, achève de se purifier6 Â». Il souligne les différences par rapport aux liens de parenté que l'on trouve dans la pensée européenne avec les mots habere, habitus, habitare et plus spécifiquement entre have, behave, inhabit et une idée d'appropriation du monde à l'homme et celle d'appropriation de l'homme au monde.

Dans l'idée de l'habiter en France, on ressent un certain désir de confort lié à l'idée d'assurer l'« assise existentielle Â» de l'habitant. Au Japon, il y a davantage une coexistence, une recherche d'harmonie entre l'habitant et l'environnement. L'espace intérieur est un espace de pureté par rapport à un espace extérieur « chaotique Â», et l'ensemble est nature. On le retrouve chez certains architectes tel Tadao Andô : l'intégration de phénomènes naturels comme « la lumière qui a été rendue abstraite Â» (chûshôka sareta hikari), « l'eau qui a été rendue abstraite Â» (chûshôka sareta mizu), « le vent qui a été rendu abstrait Â» (chûshôka sareta kaze) purifient le lieu continuellement. Il existe probablement ici un lien étroit à établir avec le shintoïsme. Pour conclure, on peut se demander si le plus important est d'avoir chaud, ou s'il faut au contraire préserver un contact avec le froid pour éviter de couper l'habitant du monde extérieur.


DA : Pouvez-vous revenir sur l'entre-deux, une notion selon vous fondamentale dans l'architecture japonaise ?

YN : Au Japon, on ne « colle Â» pas à la maison de son voisin, sans doute pour deux raisons liées aux incendies et aux tremblements de terre. Cette séparation fait normalement une cinquantaine de centimètres, mais elle peut être réduite s'il y a accord entre voisins. Elle peut paraître ridicule. Elle reste importante, car elle permet d'effectuer les travaux d'enduit, assure la ventilation et autorise surtout l'ouverture sur le voisin en créant des espaces d'entre-deux. Mal exploitée, cette opportunité se traduit par une fenêtre ouvrant sur un mur ; mieux traitée, elle permet l'installation de jardins, favorise des jeux de lumière qui apportent un éclairage naturel dans les pièces. Ces espaces prolongent visuellement les intérieurs et créent des phénomènes de profondeur. C'est un élément spatial essentiel qui donne l'impression que les espaces ne sont jamais clos, on retrouve ici l'idée de Mitsu Inoue « d'espace mouvement Â». Des espaces très petits prennent ainsi une dimension autre. L'architecte ne pense pas la maison comme un bloc sur un terrain, mais prend en compte la globalité de la parcelle, qu'il redécoupe avec une succession de pleins, de vides, de minijardins. C'était sans doute lié à la manière dont les charpentiers agençaient traditionnellement leurs plans, et cela perdure dans l'architecture contemporaine. Cela peut même aller très loin : la Moriyama House (2005) de Ryue Nishizawa est découpée en blocs comprenant les différentes pièces, et la parcelle ouverte sur l'espace public peut même être traversée par les passants. Ce serait inconcevable en France !


DA : Sur le plan urbain, quel est le rapport de ces maisons avec le contexte ?

YN : Cette question repose celle du contexte au sens large. Si l'on ne prend pas en compte les spécificités culturelles, on ne peut rien comprendre. Le village traditionnel japonais n'est pas organisé autour d'un centre, mais selon un chemin, une progression menant à un sanctuaire au pied de la montagne. Cela est bien expliqué par un texte de l'architecte Maki Fumihiko publié en langue occidentale en 1979 dans le Japan Architect7. Il était apprécié d'avoir au fond de son jardin, au-dessus de sa palissade, une vue sur les montagnes ou les collines environnantes.

Aujourd'hui, dans les villes, ce rapport direct à la montagne est difficile, les grands bâtiments masquent le paysage. Cette rupture a conduit les gens à s'enfermer dans leur parcelle et à ne pas dialoguer avec leur environnement direct. De plus, il faut comprendre qu'au Japon le contexte reste incertain et que les constructions se renouvellent assez vite, sans préjuger de leur importance architecturale. Des bâtiments autant publiés que le Kirin Plaza (1987) ou le Syntax (1990) de Shin Takamatsu ont été démolis vingt ans à peine après leur construction, alors qu'ils constituaient des bâtiments-phares de leur époque.


DA : Quelle idée les architectes japonais se font-ils de la pérennité ? Sont-ils tentés de recourir à des matériaux qui assureraient la longévité de leurs constructions ?

YN : Certains architectes japonais se font un plaisir de construire en béton pour que leurs bâtiments durent un certain nombre d'années. Inversement, d'autres se font un plaisir de savoir que leurs bâtiments seront démolis, d'autant plus qu'ils savent que ces destructions entretiennent le marché de la construction. Cette notion de renouvellement est très présente dans la culture japonaise, elle est perceptible à travers des logiques de nettoyage saisonnier qui sont des formes de purification de la maison. Elle participe à une vision du contexte moins matérielle que la nôtre, qui accorde moins d'importance aux bâtiments, à la matérialité et davantage aux espaces, en privilégiant les éléments naturels, comme le vent, la pluie, des souffles qui régénèrent la maison.

La géographie physique encourage aussi le sentiment de l'éphémère : un peuple qui subit régulièrement des tremblements de terre ne peut qu'avoir conscience de l'aspect passager de l'existence et des choses. Lorsque j'observe les villes et la réglementation japonaise, j'ai également le sentiment que l'on est davantage dans une logique de forêt où chaque arbre/édifice ne doit pas déranger et nuire au voisin que dans notre logique de gabarit. Cela participe également à donner cette sensation d'éphémère car on ressent une sensation de discontinuité.


DA : Comment la réglementation prend-elle en compte les questions liées au développement durable ? De nouvelles normes peuvent-elles changer cette architecture peu isolée, transparente, ouverte ?

YN : Sans être à proprement parler en retard, les Japonais ne s'inquiètent pas comme nous de ces questions-là. Les consommations des logements sont beaucoup plus élevées qu'en Europe. Les réglementations thermiques restent douces par rapport aux nôtres : il est difficile pour un Japonais de transformer une maison en quelque chose d'hermétique, même si cela arrive progressivement avec la diffusion de la climatisation. Il y aura peut-être un après-Fukushima, incitant à davantage de frugalité énergétique.

En retour, on pourrait peut-être s'inspirer du Japon. Au lieu d'avoir des maisons compactes et totalement renfermées, sur le modèle des maisons suisses ou allemandes, on pourrait réfléchir à un habitat à gradient d'isolation variable, à l'image des poupée russes, avec un noyau central très isolé et des zones laissées à une plus grande liberté. La House N (2008) de Sou Fujimoto me fait un peu penser à un tel mécanisme, même si ce n'était pas son idée. Aussi, si des triples vitrages permettent des dimensions d'ouvertures importantes, ils coupent toutefois l'habitant du monde extérieur au niveau de la sonorité. Je ne pense pas que les Japonais puissent imaginer de telles ruptures. En France, l'idée est que l'intérieur de l'habitation soit porté à une température uniforme et égale pour tout le monde. Ce n'est peut-être pas négatif pourtant d'avoir froid ou chaud, de sentir et pouvoir écouter le monde.


DA : Une dernière leçon à tirer de l'architecture japonaise ?

YN : La question de transport des modèles passe toujours par une réinterprétation, une acclimatation à des sociétés spécifiques, qui font qu'on ne peut pas construire la même chose ici ou là-bas. Un mur de béton n'est pas le même chez Le Corbusier et Andô, même si le premier inspire le second : l'un affirme une matérialité, l'autre cherche plutôt la disparition. Cela étant dit, il me semble que certaines dispositions, comme les règles sur l'ensoleillement ou la ventilation, mériteraient d'être considérées dans le contexte français. Sur ce point comme sur la thermique, l'exemple japonais peut peut-être nous aider à réfléchir sur la manière de traiter autrement la question de la réglementation. Plus profondément, on sait que l'architecture japonaise a été l'une des sources d'inspiration de l'architecture moderne. Elle a participé à la dislocation de la boîte architecturale. De nos jours, en raison des normes thermiques, l'architecture française semble se refermer, pour des questions de coûts, vers l'utilisation de formes géométriques simples, un travail d'enveloppe et de jeux de façades.


Notes

1. Voir l'entretien avec Maud Badonnel, « Le cas du Japon Â», dans Yann Nussaume, La Maison individuelle, Paris, éditions du Moniteur, pp. 235-241.

2. Concernant le texte de Mitsuo Inoue, lire « De l'espace géométrique à l'espace mouvement. Le monde comme flux Â» dans Yann Nussaume, Anthologie critique de la théorie architecturale japonaise. Le regard du milieu , Bruxelles, Ousia, 2004, pp. 310-314.

3. Voir la traduction du livre de Watsuji Tetsurô par Augustin Berque, Pauline Couteau, Kuroda Akinobu, Fûdo, le milieu humain, Réseau Asie, CNRS, 2011.

4. Le paysage n'existe qu'en relation, dans un milieu qui n'est lui-même que relation. Il n'est pas « physique Â», il naît du regard, de la relation entre ce qui est « regardé Â» et le « regardant Â», qui le « regarde Â». C'est une réalité trajective, c'est-à-dire qui ne vaut qu'en tant qu'on la regarde comme telle (Augustin Berque, entretien avec Thierry Paquot, à retrouver sur <http://urbanisme.u-pec.fr/documentation/paroles/augustin-berque>).

5. Voir Augustin Berque, Le Sauvage et l'Artifice. Les Japonais devant la nature, Bibliothèque des sciences humaines, Paris, Gallimard, 1986.

6. Du geste à la cité. Formes urbaines et lien social au Japon, Paris, Gallimard, 1993, p. 71.

7. On trouve ce texte ainsi que celui de Mitsuo Inoue ou de Günther Nitschke dans Yann Nussaume, Anthologie critique de la théorie architecturale japonaise, op. cit.


> Yann Nussaume est professeur à l'école d'architecture de Rouen. Il encadre également des doctorants et il est codirecteur de l'équipe de recherche « Architecture, milieu, paysage Â» à l'École nationale supérieure d'architecture de Paris-La Villette. Parmi ses publications, on peut citer Tadao Andô et la question du milieu (Le Moniteur, 2000), Toyô Itô, structures légères, détails (Le Moniteur, 2003), Anthologie critique de l'architecture japonaise (Ousia, 2004), Construire en Chine (Le Moniteur, 2005), Tadao Andô (Hazan, 2009), De l'enseignement du paysage en architecture (éditions de La Villette, 2009).


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