ESPACES DE TRAVAIL - Pour une histoire critique de l’idéologie du bien-être au travail, entretien avec Benoît Heilbrunn

Rédigé par Karine DANA
Publié le 14/06/2019

Bureaux, ACDF

Dossier réalisé par Karine DANA
Dossier publié dans le d'A n°272

Bien-être et design sont aujourd’hui indissociables du monde de l’entreprise. Mais d’où vient cet engouement pour le bien-être et pourquoi est-il devenu si obsessionnel et tyrannique? Sur ces bases de questionnement, nous avons interrogé Benoît Heilbrunn, professeur de marketing à l’ESCP EUROPE, qui s’intéresse au design, à la culture matérielle et aux marques. Il a notamment publié L’Obession du bien-être (Robert Laffont, 2019) et Je consomme donc je suis (Nathan, 2013).

D’A : Comment situez-vous dans le temps l’avènement de l’idéologie du bien-être ? 


L’histoire du bien-être se situe à la croisée de trois champs historiques. Le plus important correspond à l’apparition au XVIIe siècle d’un nouveau rapport aux objets – plus nombreux et plus variés – et d’une nouvelle sensibilité à l’environnement. On s’intéresse à des choses peu dignes d’intérêt jusqu’alors : est-ce qu’il pleut? Ai-je bien dormi? La qualité de l’air de ma chambre est-elle bonne? Ce basculement marque la naissance de l’intimité. Cette dimension n’existait pas auparavant car, jusqu’à la Renaissance, les individus n’étaient jamais seuls, même pour dormir. La naissance de l’intimité a entraîné l’essor de la vie privée, du retrait en soi et de l’intériorité. Et ces dimensions rejoignent 

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