Double déferlante sur la Serpentine Gallery

Rédigé par Marie-Anne DUCROCQ
Publié le 20/06/2019

L'architecte à côté de son pavillon

Une vague d’ardoise, de la main de l’architecte japonais Junya Ishigami, couvre les Kensigton Gardens à Londres depuis hier, pour la 19e édition du pavillon de la Serpentine Gallery. Une seconde déferlante, faite d’accusations s’abat sur la direction de l’institution qui serait impliquée  dans des affaires douteuses. Cette année 2019 marquerait-t-elle un tournant décisif dans l’histoire de la Serpentine Gallery, et signerait-elle la fin des fameux pavillons ?

Junya Ishigami aime évoquer, pour décrire son pavillon, les « shakkei Â», jardins japonais où le paysage qui se découpe en arrière-plan se fond en-même temps avec celui du jardin. Il voulait en faire de même dans les Kensigton Gardens, le toit de la Serpentine Gallery émergeant derrière la mer d’ardoise du pavillon. Une série de fins poteaux vient soulever un large toit ondulant de 62 tonnes, sur lequel s’empilent des plaques d’ardoise de Cumbria. « Je voulais créer un pavillon qui semble ancien, primitif. (…) On trouve des toits en ardoise partout dans le monde, comme ça, tout ceux qui viennent ici pourront s’identifier à cette forme basique, archétypale Â». Les élans poétiques de l’architecte ont toutefois été freinés par la législation locale, les désillusions de ce genre devenant habituelles pour les japonais venant construire en Europe. Il a fallu augmenter le nombre de colonnes et ajouter des murs de contreventement en polycarbonate qui viennent altérer la fluidité de l’espace, voulue initialement par l’architecte.


Les désaccords qui ont opposé les fabricants locaux et l’architecte japonais sont bien peu de choses au regard de l’affaire qui s'est déclarée lors de l’ouverture du pavillon. Le jour-même de l’inauguration, la directrice Yana Peel démissionnait, après avoir été accusée, dans les pages du quotidien britannique The Guardian, d'être copropriétaire du NSO Group, une compagnie israélienne produisant des logiciels d’espionnage. Peel a justifié sa démission en déclarant qu’elle ne voulait pas que ces « attaques personnelles Â» aient des répercutions sur l’institution qui a connu quelques troubles ces derniers mois .La Serpentine Gallery a en effet été accusée d'avoir accepté des fonds de la part de la famille Sackler, impliquée dans la crise des opioïdes aux Etats-Unis, et avec laquelle elle s’est empressée de couper toute relation. Ishigami fait également l’objet d’accusations, pour des faits toutefois moins compromettants. On lui reproche de ne pas rémunérer tous ses employés. Le japonais se défend en affirmant que le travail gratuit des stagiaires au Japon est monnaie courante. 


Les troubles de cette 19e édition pourraient marquer un tournant dans le programme de l’institution. Un article du journal The Guardian va jusqu’à envisager que la Serpentine Gallery abandonne ses « structures innovantes accueillant des summer parties pour sponsors Â» pour se tourner vers d’autres activités plus utiles…  


Pour lire l'article publié dans The Guardian :  : https://www.theguardian.com/artanddesign/2019/jun/18/serpentine-pavilion-2019-review-junya-ishigami 

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