En matière de politique environnementale ou de logement, lorsqu'un ministre dégaine son objectif chiffré, il faut redouter le pire pour l'architecture : objectifs 500 000 logements, objectif 150 000 logements démolis, engagement division par 4 des émissions de gaz à effet de serre(GES) à l’horizon 2050... Non qu'il ne faille se réjouir de telles promesses (elles ne sont d'ailleurs jamais tenues), mais craindre que les moyens employés pour y parvenir ne se préoccupent guère de critères urbains et architecturaux. Il est vrai que les effets de la qualité d'un bon projet se jugent à moyen et long terme, c'est à dire au-delà de la durée moyenne d'un ministère ou d'un mandat.
Lorsqu'en 2003 la France s'engage pour la division par quatre des émissions de GES à l’horizon 2050 –l'objectif « facteur 4 »– le secteur du bâtiment est évidemment l'un des plus concerné. Moins dans la construction neuve, qui ne représente qu'une part infime de la consommation énergétique, que dans le parc existant où l'essentiel reste à faire. Pour répondre à la batterie de normes thermiques à atteindre, les industriels développent des produits et des procédés souvent efficaces. Ceux-ci n'ont en eux-mêmes rien de condamnables mais, mis entre toutes les mains, notamment entre celles dont l'unique but est d'atteindre la cible permettant de décrocher un label et une subvention, ils risquent bien de conduire à une irrémédiable détérioration du cadre bâti.
La réhabilitation, pas plus que la construction neuve, ne se réduit à des interventions fonctionnelles et techniques. On sait que l'application stricte des normes peut produire des résultats en contradiction avec ses intentions initiales. En réhabilitation, la prise en compte et l'interprétation subtile du contexte urbain, patrimoniale ou sociologique sont autant les conditions d'un projet réussi, d'un projet qu'il ne faudra pas entièrement réhabiliter à nouveau lors du prochain objectif fixé par un ministère.
Emmanuel Caille
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