N° 193 - Septembre 2010

Ectoplasmes

Alors que l’empire communicationnel s’étend inexorablement sur chaque parcelle de nos vies, il devient de plus en plus difficile de savoir à quelle aune évaluer la valeur des choses. Il nous appartenait autrefois de déchiffrer quel sens pouvait s’attacher à une architecture ou à une organisation urbaine. C’est désormais l’inverse qui semble se produire : le discours (qui prétend alors valoir pour le sens) paraît aujourd’hui précéder non seulement l’œuvre, mais sa commande. Est-ce par crainte de l’insignifiance des motivations et des raisons de bâtir ou de peur que leurs sens nous échappent ? Les villes cherchent maintenant à instituer de grands événements autour desquels fédérer une identité ou, tout simplement, justifier leur politique. À Shanghai, Venise, Bordeaux, Nantes ou Lille, biennales, foires ou expositions thématisées deviennent ainsi les outils et les vitrines de grandes parades rhétoriques. Les projets artistiques, architecturaux ou urbains sont alors sommés d’incarner une idée, un slogan qui pourra être réutilisé comme arme de communication. Manière habile d’attirer les investisseurs en conjurant le danger de la spéculation sauvage. La signification d’un édifice et le rôle politique qui lui est dévolu font bien sûr partie intégrante de l’architecture et de son histoire. Ce qui frappe aujourd’hui est peut-être moins l’intensité et la rapidité avec lesquelles on demande aux projets de délivrer des messages aptes à capter toutes les attentions médiatiques que leur funeste assujettissement à ces injonctions. Certains de ces rêves de gourous en marketing se réalisent ; d’autres, flottant comme leurs ectoplasmes, errent encore sur nos écrans. Un peu à l’image du décalage entre l’importance donnée aux flux de la finance mondiale, censés stimuler la croissance, et la capacité de production de l’économie, on peut s’interroger sur la réelle fonction de ce maelström de chimères discursives. Comme toute arme de rhétorique, elles sont ambivalentes. Maîtrisées et fondées sur une véritable éthique du projet, elles peuvent pourtant être porteuses d’une étonnante puissance d’invention.

Emmanuel Caille

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» Maxence Rifflet, l’image pensante texte de Jean-Paul Robert

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