Le volontarisme au risque de l’échec
Les échecs récurrents des politiques d’aménagement des territoires périurbains depuis cinquante ans ne sont pas sans provoquer un certain découragement. La création de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine témoigne certes d’une prise de conscience de l’ampleur des difficultés à résoudre. Cependant, de toutes parts nous parviennent les cris d’alarme d’urbanistes et d’architectes qui voient les intentions initiales de l’Anru détournées de leurs objectifs et la contradiction de plus en plus manifeste de ses applications avec l’autre grande politique gouvernementale : le Grenelle de l’environnement.
Le mal-être réel ou supposé des habitants de ces quartiers, l’exaspération due à la persistance des problèmes, la pression médiatique et le calendrier électoral ont suscité une exigence de résultats concrets et rapides. Des élus plus ou moins bien intentionnés ou avides de gratifications élyséennes ont enfourché ce cheval de bataille. Ils se sont mis à démolir et à reconstruire en faisant du chiffre, comme on le dit de la police, oubliant que l’urbanité relève de valeurs autrement plus complexes. La justesse de son avènement est affaire de professionnels et, surtout, nécessite un temps d’écoute et d’étude incompressible.
On éprouve quelque lassitude à constater que l’analyse des multiples dysfonctionnements liés à la ville et à l’architecture nous ramène presque toujours à l’incompétence des élus locaux. Force est de constater que les opérations les plus réussies de l’Anru – car il y en a – n’ont pu se faire qu’avec l’appui de maires éclairés. Les opérations exemplaires que nous vous présentons dans cette édition s’inscrivent d’ailleurs souvent dans des projets antérieurs à la mise en place de l’Anru. Elles sont menées par des architectes aux analyses et aux pratiques parfois fort différentes mais qui, de Jam à l’AUC, chacun à sa manière, révèlent la richesse et l’incroyable potentialité de ces territoires.
Emmanuel Caille