L’effroi ou la fascination ressentis devant les mutations incontrôlées du monde, la tentation d’un retour à une vérité originelle et à des valeurs qui dépasseraient les contingences historiques est récurrente. Des Indiens et Tahitiens des Lumières aux Nambikwaras de l’ethnologie moderne, le bon sauvage est cet être mythique dont l’observation et la représentation que l’on s’en est faite a servi à mieux nous connaître. L’architecture aussi s’est construite son mythe de la cabane primitive, cherchant à légitimer des valeurs qui seraient l’essence même de son art. Ces théories ayant fait long feu et les derniers sauvages ayant été Macdonaldisés, les architectes ont cessé d’y faire référence. Mais toujours en quête d’une forme d’innocence, d’expression primitive débarrassée de toute scorie culturelle, certains d’entre eux ont trouvé dans les formes modernes de la misère humaine quelque matière à refonder le monde. Du nomadisme des réfugiés aux stratégies de survie dans les décharges de Lagos, l’extrême dénuement des victimes du capitalisme sans limite a pu ainsi devenir un gage d’authenticité. Si la validité d’une démarche scientifique s’accommode mal des bons sentiments, la fascination morbide pour la misère confine souvent à la complicité. De cette ambiguïté, l’exposition Mutations en 2000 tirait à la fois sa force et ses limites. En la prolongeant par une série d’expositions intitulées faire habiter l’homme, là , encore, autrement, le centre d’architecture arc en rêve de Bordeaux explore toujours le monde sans a priori mais en essayant aussi de redonner la parole à ceux qui veulent agir sur le réel. D’une ambition démesurée par ce qu’elles embrassent (Est – Ouest / Nord – Sud !) mais modestes dans la conscience des solutions qu’elles proposent, ces expositions, dont rend compte ce numéro, sont avant tout d’indispensables outils de prospectives. Emmanuel Caille
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