9. MYCKET, entretien avec Thérèse Kristiansson, Suède

Rédigé par Stéphanie DADOUR
Publié le 01/12/2018

Ouvrage coédité par Thérèse Kristiansson, Meike Schalk et Ramia Mazé.

Dossier réalisé par Stéphanie DADOUR
Dossier publié dans le d'A n°268

Des architectures plurielles


MYCKET, entretien avec Thérèse Kristiansson, Suède

 

MYCKEt a été fondé 2012 par Mariana Alves Silva, Katarina Bonnevier et Thérèse Kristiansson, qui ont ensuite été rejointes par Ullis Ohlgren et Anna-Märta Danielsson.

 


D’a : une partie de votre travail concerne le féminisme/queer et l’architecture : comment définissez-vous votre approche et que signifie-t-elle concrètement en termes d’espace et d’architecture ?


MYCKET a développé une pratique intimement liée à la matérialité et aux productions spatiales au sein d’un vaste réseau de collaborateurs. Nous aspirerons à mettre en pratique les perspectives féministes. MYCKET signifie « beaucoup » en suédois. C’est comme ça que nous faisons les choses – nous essayons toujours de tirer le meilleur parti de nos projets et avons des effets multiples. Cette approche fait également référence à la volonté de dépasser les limites de l’esthétique minimaliste qui est si largement dominante (quasi exclusive) dans nos pratiques. Nous avons un pied dans le milieu universitaire, mais nous ne sommes liés à aucune institution en ce moment. Nous nous déplaçons également entre la vie urbaine de Stockholm et une campagne peu peuplée, à Östergötland, où nous nous engageons dans la communauté locale et dans un mode de vie proche de la nature et des espèces associées.


 

D’a : à quel moment de votre vie (personnelle/ professionnelle) votre travail en architecture a-t-il croisé les approches queer et pourquoi ?


Nous avons toutes compris assez rapidement que les structures patriarcales créaient des conditions et possibilités différentes selon les personnes ; déterminées par le sexe, la sexualité, la couleur de la peau, les capacités physiques, l’âge, etc. Les besoins et les désirs de chacun ne sont pas considérés de la même manière, ni équitablement. En commençant à s’engager dans l’architecture et la conception, les structures patriarcales se sont avérées toutes aussi présentes. Pour certaines d’entre nous, ce constat s’est effectué dès notre entrée à l’école d’architecture : nous avons trouvé que nos intérêts architecturaux et esthétiques n’étaient pas représentés dans l’histoire architecturale ou dans les pratiques enseignées à l’école. En creusant un peu, nous avons compris qu’il existait une grande variété d’histoires architecturales, et que l’architecture ne pouvait pas être séparée de l’espace – ce qui englobe également les aspects sociaux et environnementaux de notre environnement bâti. En s’intéressant à la théorie féministe, et plus tard à la théorie queer, nous avons saisi les mécanismes d’oppression et les manières de les contrer. Et aussi les modèles – historiques et actuels – existants : nous ne cherchons pas à réinventer la roue, mais à continuer le travail antérieur des féministes.


 

D’a : qu’est-ce que l’architecture peut faire changer ?


L’architecture peut nous aider à vivre la vie que nous souhaitons vraiment vivre. Pour ce faire, nous devons savoir quelles vies nous souhaitons mettre de l’avant ; qu’est-ce qui est important, que voulons-nous être en mesure de réaliser, quelles relations voulons-nous créer et comment doivent-elles fonctionner ? Dans le cadre de  MYCKET, nous aspirons à un environnement bâti où il y a de la place pour nous tous, et non pour les uns aux dépens des autres. Créer zéro déchet, réutiliser autant que possible, être intelligent avec les ressources matérielles et immatérielles (comme le temps) est important pour nous.

 


D’a : comment définissez-vous votre pratique, aujourd’hui ?


Notre pratique, peu importe sa forme, consiste à faire les choses à plusieurs, en mode collaboratif, voire participatif. Nous avons même un mot pour cela, nous l’appelons D-I-G, Doing In Groups. Notre travail en tant qu’architectes, designers, artistes et chercheurs consiste à créer des espaces avec des personnes, à permettre l’expérimentation à plusieurs, sans a priori. Notre société, marquée par la haine et la peur de l’autre, a tendance à oublier que nous dépendons les uns des autres. Nous tentons ainsi de faire autrement.

 

 


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