Séquence architecturale qui reflète une interprétation des étapes participant à la construction d’une identité |
Dossier réalisé par Stéphanie DADOUR Queeriser l’espace : sensibiliser le grand
public et les politiques Olivier Vallerand, cofondateur du
laboratoire de création 1x1x1, professeur d’architecture à l’université Arizona
State, Canada/États-Unis |
Impliqué depuis plus de vingt ans dans les organismes communautaires LGBT, architecte-chercheur, Olivier Vallerand croise ces deux parcours. Ce qui l’intéresse est l’architecture, comprise dans ses aspects humains et sociaux, « un lieu plutôt qu’une forme », dit-il. Son travail consiste à rendre compte de l’impact de l’architecture sur la vie des gens, notamment les personnes homosexuelles ou trans. Des réflexions à ce sujet sont entamées depuis des années, mais invisibilisées, selon lui. Au canada et aux États-Unis où il travaille, les questions croisant architecture et sexualité sont aujourd’hui plutôt bien reçues, jugées pertinentes par le grand public et par le milieu architectural. C’est dans cette perspective que son approche consiste à rendre visible ce qui ne l’est pas encore tout à fait, et plus particulièrement ce qui a tendance à être mis à la marge.
Rendre visible
« Il y a ceux qui découvrent les effets de l’architecture sur les personnes LGBT ; et il y a de plus en plus d’architectes souhaitant œuvrer dans le bon sens », explique l’architecte. L’objectif d’Olivier Vallerand est de s’assurer que l’impact de l’architecture sur les personnes homosexuelles n’est pas discriminant, voire nuisible à la santé ; et ce, afin de trouver des façons d’améliorer les espaces de vie et de remettre en question certains réflexes d’architectes, d’outiller les enseignants et étudiants en architecture pour intégrer et prendre conscience de ces questions :
Qui a le pouvoir de faire de l’architecture ?
Qui a la possibilité de se faire entendre
?
Qui est ignoré, mis de côté ?
Qui ne fait pas partie des réflexions ?
D’un autre côté, son travail de médiation
sensibilise le grand public à prendre conscience de l’importance de
l’environnement bâti et de la nécessité de leur implication dans la prise de
décision de certains aspects. Son activité passe donc par l’éducation et
l’enseignement afin de faire de ces questions un intérêt citoyen : un guide est
en cours de réalisation. Cette dimension politique est à la base des réflexions
et passe par une pensée et une pratique queer. Dans le monde anglophone,
l’usage du terme ne se réduit pas à l’orientation sexuelle mais porte une
revendication politique qu’il est possible d’expliquer à trois niveaux. Il
s’agit tout d’abord de représenter les personnes LGBT tant dans la conception
architecturale que dans l’histoire de l’architecture. À un deuxième niveau, la
théorie queer permet de porter un regard critique, de remettre en question les
acquis et les catégories. Enfin et de manière plus militante, de prendre
conscience que l’architecture est conçue dans un contexte capitaliste,
politique. Pour Vallerand, il n’est pas tant nécessaire d’avoir un expert en
féminisme dans chaque institution que d’interroger continuellement la
profession et de trouver les façons de réellement fabriquer des villes
inclusives. Le queer est un point d’entrée permettant d’envisager des solutions
qui s’appliquent à tout le monde et qui ne sont pas spécifiques à des identités
particulières. C’est une approche qui permet de réfléchir, de déconstruire
certains acquis, une démarche ouverte qui rend les spatialités accessibles pour
tout le monde.
Un exemple courant de réflexion sur la
question revient aux toilettes publiques : dans quelles toilettes les
transgenres doivent-ils se rendre ? La démarche de Vallerand consiste Ã
procéder par une lecture historique afin de saisir la conjoncture autour des
premières toilettes publiques. La séparation sexuée des toilettes peut ainsi
être mise en cause et repensée… plutôt que de forcer certaines personnes Ã
entrer dans une case, sexuée.
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