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Dossier réalisé par Karine DANA Très ouverte sur l’extérieur et constitutive d’une nouvelle centralité urbaine, la tour Trinity démontre que les nouvelles attentes des espaces de travail en termes de vie collaborative et de diversité d’usage rejoignent les réflexions sur la ville dense, que l’on souhaite toujours plus appropriable et habitable. |
Implantée sur un espace routier délaissé, au pied de l’A14 et des voies connexes, du CNIT et entre deux quartiers très distincts que sont Courbevoie avec ses trois IGH et La Défense, la tour Trinity est issue d’un contexte très singulier de construction architecturale à partir de réhabilitation urbaine. Les concepteurs ont en effet dû inventer sa place et créer sa constructibilité à partir du tissu complexe existant, sans consommer de foncier. En étudiant la capacité du site en termes de fondations, d’assises et d’appuis, ils imaginent ainsi des grands pieds droits de 200 mètres de long qui permettent d’asseoir la future tour et créent un socle – telle une « gaufre structurelle » – qui profite de la différence d’altimétrie de 5 mètres entre les deux quartiers qui se chevauchent. Ce dénivelé sera notamment l’occasion de repenser fondamentalement le pied de la tour. En collaboration avec le paysagiste Bas Smets, les architectes fabriquent ici 3 500 m2 de nouvelles liaisons urbaines tout à fait inattendues entre les deux quartiers, auparavant déconnectés et simplement rattachés par une passerelle. Cette démarche rejoint la politique d’aménagement urbain en cours qui consiste à recoudre La Défense avec son sol naturel. Cet enjeu fort appuyé de concertations a rendu possible ce projet qui dépasse le seul champ de l’architecture.
Élevée sur 150 mètres et 32 étages, segmentée en trois volumes, la tour Trinity est constituée d’une structure béton. Enveloppée de murs-rideaux vitrés et d’une double peau côté sud, elle profite d’une visibilité et de dégagements profonds dus à sa position de premier rang de la skyline nord. Sa géométrie, sa transparence et ses inclinaisons sont le résultat là aussi d’intentions urbaines. Alors que sa hauteur et son emprise auraient pu s’étendre davantage, ce qui a présidé à sa découpe tient à la proximité de la tour Areva dont elle laisse libre les perspectives, au même titre que celles de la chapelle Notre-Dame-de-la-Pentecôte et du quartier de la Coupole.
La condition urbaine s’impose dans ce projet comme un parti pris, une valeur active. Si la ville est invitée au plus près de l’architecture, réciproquement, l’architecture échange avec elle et s’y confronte. Ainsi, les architectes ont déporté l’habituel noyau central en façade afin qu’il devienne un vecteur de vie. Une batterie de deux ascenseurs panoramiques indépendants est ainsi donnée à la vue des passants et participe activement à l’image de la tour, donnant sur la Grande Arche. De même, des terrasses extérieures plantées protégées d’un garde-corps de verre de 180 cm de hauteur sont aménagées tous les quatre niveaux. Des boîtes suspendues lisibles en façades participent également de cette volonté d’animation. Augmentées d’un balcon, elles contiennent des salles de réunion, autant de petites unités de travail directement connectées aux parties communes des plateaux, pouvant également abriter une bibliothèque ou une cuisine. Imaginée comme une tour en blanc, la tour Trinity puise ses qualités d’usage et d’espace dans l’architecture. Chaque plateau bénéficie en effet de 2,80 mètres de hauteur libre sous plafond, chaque palier d’ascenseur profite de vues panoramiques sur la ville derrière de grands panneaux vitrés, facilitant l’orientation des usagers. Toutes les parties communes, dont la mission a été confiée à l’agence Cro&Co, ont été abordées dans une continuité de traitement, qu’il s’agisse des circulations horizontales communes (CHC), relevant de la sécurité incendie, ou des espaces non réglementaires. Tous les plateaux de travail bénéficient d’un espace extérieur et profitent de ventilation naturelle. Un hall intermédiaire a été installé au 15e étage, tandis que le hall principal, très monumental, a fait l’objet d’un soin particulier. Des grandes coques en aluminium fabriquées avec un charpentier naval proposent des assises collectives et informelles. En ce qui concerne le programme dédié aux usages collectifs, une salle de sport, des salles de réunion en rooftop, un auditorium au 25e étage et un socle contenant un restaurant d’entreprise disposé sous les liaisons urbaines et deux restaurants publics, sont à la disposition des futurs usagers.
Quelques années après son intervention fine et contextuelle avec la même maîtrise d’ouvrage sur le bâtiment du CNIT, dont on a pu redécouvrir la voûte ultramince en béton de Bernard Zehrfuss, l’agence Cro&Co Architecture déploie ici une même approche, très à l’écoute des potentiels existants dans leur capacité à se prolonger et à porter un nouveau projet.
[ Maîtrise d’ouvrage : SCI Trinity Défense (Unibail Rodamco Westfield) – Maîtrise d’œuvre : Cro&Co Architecture, Jean-Luc Crochon ; chefs de projets : Francesca Benente, Federica Bestonso, Daniel Durassier, David Lefrant, Benjamin Liatoud – Architecture d’intérieur : espace de restauration, Saguez & Partners ; CHC, hall et mobilier du hall : Cro&Co Architecture – Paysagiste : Bureau Bas Smets, Phytoconseil – MOEX : Artelia BI – BET structure : Setec tpi – BET fluides : Barbanel – Économiste : AE75 – Acoustique : Tisseyre & Associés – Éclairage : Les Ateliers de l’Éclairage – Environnement : ALTO Ingénierie – Façades : Arcora – Ascenseurs : ARUP – Entreprise générale : Bateg (Vinci Construction France) – Superficie SHON/Superficie SDP : 49 400 m2 SDP ]
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