Anastasia Elrouss |
Dossier réalisé par Stéphanie DADOUR Sensibilisation Et formation :
l’empowerment des femmes
Anastasia Elrouss, fondatrice de l’agence
ANA et de l’ONG Warch(ée), Liban |
Ayant grandi à tripoli, au Liban, au sein d’un ménage de sept femmes, sans figure masculine, Anastasia Elrouss poursuit des études d’architecture à l’American University of Beirut. Diplômée en 2005, elle travaille dans plusieurs agences avant de s’engager auprès d’une jeune équipe où elle deviendra associée en 2008. En 2017, elle fonde sa propre agence, ana, ainsi qu’une ONG, Warché(e). C’est à son arrivée dans la grande ville, à l’université, qu’elle découvre les spatialités d’une société patriarcale. Et c’est lors de ses premières expériences professionnelles, à Beyrouth comme à paris, qu’elle réalise les différences genrées planant dans les agences.
Une femme n’est pas une « représentation »
d’un homme
Elle a moins de 30 ans lorsqu’elle est
associée à une agence en vogue et responsable de grands projets. En dehors du
lieu de travail, elle est entourée d’hommes : lors de consultations, avec les
décisionnaires, à la banque, sur le chantier. Dans ces circonstances et de
manière récurrente, lorsque les femmes sont en minorité, les hommes se
permettent des remarques portant sur des stéréotypes de genre ou sur le
physique. Aussitôt qu’elle doit émettre des directives quant à l’avancement du
projet, « j’use de tactiques afin d’être réellement écoutée », explique
Anastasia. L’une d’entre elles consiste à énoncer les directives comme émanant du
fondateur de l’agence, soit une manière de donner de la crédibilité à ses
dires, à ses propres décisions et de conforter, en même temps, le patron. En
effet, et avec le recul, elle se rend compte que l’ambiguïté autour de la
hiérarchie (elle et le patron étant en réalité égaux) explique cette manière de
se représenter : se rendre invisible. Près de dix ans plus tard, elle décide de
fonder sa propre agence, ANA, qu’elle accompagne d’une ONG, Warch(ée)1. À
nouveau, on la fustige de questions : alors que tu as un bon salaire, des
projets de rêve, l’équipe, bientôt des enfants… que veux-tu de plus ? Et de
répondre : « Je veux exister. » Pour qu’une femme soit prise au sérieux, elle
doit faire ses preuves et sans cesse prouver qu’elle est au niveau. Lorsqu’elle
décide de se mettre à son compte, on dira qu’elle a « des couilles », et non
pas qu’elle est architecte.
Ana + warch(ée) : être responsable de ce
qu’est être une femme architecte
« Je voulais raconter et dire aux femmes
de ne pas faire comme moi » : je me suis cachée derrière un homme à cause de la
pression. Et c’est une véritable pression : sociale et professionnelle. Pour
qu’une femme soit entendue, il faut qu’elle acquière, qu’elle « gagne » les
caractéristiques d’un homme. « Or, être femme et féminine peut rimer avec
réussite et carrière. Avec vie familiale aussi. » Warch(ée) ne se limite pas Ã
une campagne de sensibilisation. Le projet vise à former des femmes aux métiers
de la construction afin de décloisonner ce milieu, et participer concrètement Ã
la fabrication de milieux bâtis : maçonnerie, menuiserie, électricité,
plomberie. Des modules mobiles seront mis à disposition des femmes, in situ sur
les chantiers. De l’empowerment, diront les Anglo-Saxons, pour que les femmes
soient visibles à tous les niveaux et pour qu’elles occupent plus de place dans
l’espace public.
Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :
Vous n'êtes pas identifié. | |||
SE CONNECTER | S'INSCRIRE |
> Questions pro |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 4/6
L’apparente exhaustivité des rendus et leur inadaptation à la spécificité de chaque opération des programmes de concours nuit bien souvent à l… |
Quel avenir pour les concours d’architecture ? 3/6
L’exigence de rendus copieux et d’équipes pléthoriques pousse-t-elle au crime ? Les architectes répondent. |