Dans un coin de l’agence, une table est recouverte de plans sortis des archives, de diagnostics matériau et de tuiles mécaniques moussues. Au mur figurent de nombreuses synthèses graphiques présentant gisements et destinations des éléments de réemploi qui seront déployés sur l’intégralité de la réhabilitation de l’îlot Blanchemaille à Roubaix. Le bâtiment Pollet – nommé d’après les fondateurs de La Redoute – retrace dans sa composition chaotique l’histoire du siège de la marque. Simple maison de maître à proximité des usines de laine, les bureaux de la direction se sont agrandis au fil des années. L’extension de 1928 est la plus emblématique. Surnommé « Hollywood » en raison de l’enseigne géante sur son toit, ce bâtiment est délaissé par La Redoute lors d’une restructuration de l’entreprise. La métropole de Lille hérite du foncier et lance une consultation pour la transformation de ce lieu emblématique de l’histoire des filatures industrielles du Nord. Le bâtiment sera « reconverti » en incubateur de start-up dédiées au commerce en ligne, dignes héritières de La Redoute et de son catalogue de commande à distance.
Anticiper les craintes
L’agence SAA est lauréate de la consultation et propose dès le concours de faire du réemploi le fil rouge de leur projet. Ils lancent dès les premières études un diagnostic complet visant à identifier les gisements de matériaux et d’équipements. Tout y passe : plaques de plâtre acoustiques, radiateurs, parquets, cloisons vitrées… Les architectes iront eux-mêmes chercher des cuvettes de toilettes les plus sales possibles afin de prouver à la maîtrise d’ouvrage que, avec une bonne remise en état, il est possible de faire du neuf avec du vieux. Pour pallier les difficultés habituelles d’approvisionnement en temps et en heure des matériaux de réemploi, ils proposent au maître d’ouvrage de l’immeuble voisin vide – d’autres anciens locaux de La Redoute en attente de requalification – d’y installer les stocks de matériaux sur les plateaux vides en échange d’une participation au démontage de plaques de plâtre suspendues. Déjà rompue à l’exercice du réemploi lors de précédents projets de l’agence SAA et en tant que présidente de Bellastock, Marie-Emmanuelle Pion fonde au cours de ses études le bureau d’études spécialisé en économie circulaire Circé. Ce BET intégré à SAA réalise les diagnostics pour les démarches portant sur le réemploi au sein de l’agence. De quoi rassurer les maîtrises d’ouvrage encore frileuses, en particulier vis-à -vis de la réglementation. L’étude concentrée sur le réemploi a notamment permis de scinder le lot entre la fourniture des matériaux et la pose. Selon cette répartition, le temps qui aurait pu être