[Les matériaux naturels au secours du climat ?] À la recherche d'une alternative constructive

Rédigé par Stéphane BERTHIER
Publié le 03/09/2023

Dossier réalisé par Stéphane BERTHIER
Dossier publié dans le d'A n°310

par Stéphane Berthier

Serge Joly et une équipe d’ingénieurs viennent de terminer les études d’une construction écologiquement exemplaire, pour la Ville de Paris. Cet édifice de 3 000 m2 situé dans le lotissement des Messageries, près de la gare de Lyon, accueillera en 2025 une école polyvalente et une crèche de 68 berceaux. Élaborée à partir d’une palette de matériaux alternatifs au béton armé, cette expérience est riche d’enseignements pour la connaissance de la construction décarbonée.

Lauréate d’un dialogue compétitif en 2019, l’équipe de maîtrise d’œuvre emmenée par Serge Joly s’est attachée à explorer les conditions de faisabilité d’une construction décarbonée qui fait la part belle aux matériaux bio et géosourcés. Cette opération a été lancée juste avant l’entrée en vigueur de la RE2020, mais le maître d’ouvrage tenait à anticiper ces nouvelles exigences en fixant un objectif très performant tant en termes de maîtrise des consommations d’usages qu’en termes d’émissions de gaz à effet de serre (E4C2). Selon les conclusions de l’expérimentation E+C- lancée par le ministère de l’Écologie pour préfigurer la réglementation, à peine 10 % des bâtiments parvenaient à atteindre le seuil C2 en 2020. En revanche, la sobriété des consommations d’énergie était plus facile à atteindre parce qu’elle bénéficiait des fruits d’une quinzaine d’années de développement de bâtiments basse consommation.

L’équipe de maîtrise d’œuvre retenue est réputée expérimentée en matière de construction écologique : Serge Joly travaille de longue date sur le thème des matériaux naturels, comme en témoignent de nombreuses réalisations menées avec son ex-associé Paul-Emmanuel Loiret. Laurent Mouly, ingénieur en charge de la structure et du bilan carbone, est lui aussi reconnu dans la profession pour ses recherches, notamment sur le béton de chanvre. Enertech est quant à lui un bureau d’études à la pointe des questions énergétiques. La ville de Paris a financé cette démarche expérimentale en modulant les honoraires d’un taux de complexité élevé et en confiant des missions complémentaires, notamment sur l’analyse de cycle de vie et la maîtrise du risque incendie. Sont donc ici réunies les conditions de volonté politique, de compétences des acteurs et de moyens financiers d’une opération sérieuse dont on peut considérer comme significatives les conclusions. Dit autrement, on peut espérer ne pas se payer de mots, comme trop souvent dans ce domaine quand on se raconte que la parole est performative.

Le programme soumis aux architectes est toutefois assez conventionnel dans la mesure où il confirme les exigences de confort et les dispositifs programmatiques habituels pour ce type d’équipement. La transition écologique porte donc ici sur la seule matière de nos édifices mais ne reconsidère pas (encore) les usages à l’aulne de la crise climatique. Le cadre normatif et réglementaire de la construction est celui hérité de la modernité, qui s’est constitué à l’époque du béton roi. Il a été aggravé en 2021 par la publication de la « Doctrine pour la construction des immeubles en matériaux biosourcés et combustibles Â» rédigée par la Préfecture de police après que les pompiers se sont inquiétés d’un risque accru d’incendies suite à leurs analyses de nombreux immeubles en bois, réalisées ces dix dernières années. Ce texte donne de nouvelles recommandations pour une interprétation plus exigeante des règles de sécurité. Pour intégrer les contraintes de cette nouvelle doctrine, (...) 

Abonnez-vous à D'architectures
.

Réagissez à l’article en remplissant le champ ci-dessous :

Vous n'êtes pas identifié.
SE CONNECTER S'INSCRIRE
.

> L'Agenda

Novembre 2024
 LunMarMerJeuVenSamDim
44    01 02 03
4504 05 06 07 08 09 10
4611 12 13 14 15 16 17
4718 19 20 21 22 23 24
4825 26 27 28 29 30  

> Questions pro

Quel avenir pour les concours d’architecture ? 4/6

L’apparente exhaustivité des rendus et leur inadaptation à la spécificité de chaque opération des programmes de concours nuit bien souvent à l…

Quel avenir pour les concours d’architecture ? 3/6

L’exigence de rendus copieux et d’équipes pléthoriques pousse-t-elle au crime ? Les architectes répondent.

Quel avenir pour les concours d’architecture publique 2/5. Rendu, indemnité, délais… qu’en d…