François Brugel et Marc Dujon : faire du chantier durant le concours

Rédigé par Maryse QUINTON
Publié le 01/12/2022

Façade du bâtiment

Dossier réalisé par Maryse QUINTON
Dossier publié dans le d'A n°303

Boulevard Soult à Paris, François Brugel et Marc Dujon ont transformé 106 logements pour Paris Habitat. Les architectes ont fait bon usage du marché de conception-réalisation remporté avec Genere pour tester leurs hypothèses in situ, sur un autre chantier que menait l’entreprise.

À Paris dans le 12e arrondissement, François Brugel, associé pour l’occasion à Marc Dujon, a transformé un bâtiment existant de 106 logements1 sur le boulevard Soult, une réalisation récompensée lors de l’édition 2022 du Prix d’architectures 10+1. Avec l’entreprise Genere, les architectes ont tâché de tirer profit du marché de conception-réalisation auquel a recouru Paris Habitat, maître d’ouvrage, pour mener cette opération dite « Montera-Gabon » en site occupé.
Le programme portait sur des travaux d’amélioration énergétique des deux bâtiments édifiés en 1958, la création de 38 balcons avec intégration des loggias existantes, l’ajout de deux ascenseurs mais également la requalification des parties communes et des espaces extérieurs. Un cahier des charges ne laissant a priori que très peu de place à l’architecture, mais dont François Brugel et Marc Dujon ont su s’emparer pour en faire une réalisation exemplaire.

Tester les hypothèses
François Brugel est convaincu de la nécessité d’être présents sur le chantier, a fortiori dans le domaine de la réhabilitation où l’aléa et la surprise sont, encore plus qu’ailleurs, inévitables. « Le chantier fait partie intégrante de notre mission, je le considère comme une phase hyper active du projet, dit-il. Il nous faut le reconquérir. Il faut aussi faire comprendre aux étudiants, qui ont peu d’appétence sur cette question de la mise en Å“uvre, que notre plus-value est réelle sur le chantier. » 
Boulevard Soult, il a poussé plus loin encore le curseur de ses convictions en profitant d’une situation singulière. Spécialiste de la réhabilitation, l’entreprise Genere menait un autre chantier en parallèle qui a permis aux architectes de « faire du chantier pendant le concours ». Et de ne pas travailler à partir de compétences présupposées de l’entreprise, mais de mobiliser des savoir-faire spécifiques et de tester les hypothèses avant même de démarrer les travaux. « Lorsque nous avons travaillé sur le concours, nous nous sommes demandé de quelle façon nous pourrions fabriquer un socle consistant, solide, qui renverrait à une culture à la Perret, du travail de la main. Nous avons essayé de rendre compte physiquement de ce que nous avions en tête. Nous avons ainsi fait du chantier pendant le concours, dans une démarche assez singulière d’inversion des choses. »

Rendre les découvertes heureuses
Des prototypes de soubassement en béton de mignonnettes ont ainsi été réalisés sur l’autre chantier de Genere, pour tester la fabrication du support, de la contre-maçonnerie, de façon à obtenir un rendu satisfaisant d’un point de vue architectural. « L’idée était d’avoir une dimension très pragmatique de ce que nous étions capables de faire de mieux et de nous adapter, et de ne pas partir sur un univers trop poétique qui se serait heurté à la réalité de mise en œuvre. » Les effets de grains dans le béton ont été travaillés pour trouver la juste rugosité, donnant à ce soubassement une matérialité qui participe de l’identité du projet. De la même manière que travailler dans l’existant nécessite une adaptation constante au gré des découvertes. « Ce sont des découvertes dont on ne peut pas avoir la maîtrise en amont mais qu’il faut absolument rendre heureuses dans le cadre du projet. Sans la présence de l’architecte, seule la question économique va compter dans la prise de décision. Il faut être en capacité d’interagir rapidement avec l’entreprise, condition essentielle pour fabriquer une culture de chantier », résume François Brugel.

[ Maître d’ouvrage : Paris Habitat OPH – AMO : PIBA – Maître d’œuvre conception-réalisation : Genere, entreprise générale mandataire ; FBAA et Marc Dujon Architecture, architectes – BET TCE : CADENCE – SDP : 6 602 m2 – Coût : 6,5 millions d’euros HT – Livraison : mars 2022 ]

1. « Assumer la discrétion », voir le n° 297 de d’a, avril 2022.

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