crédit photo : Ismaïl TOUIRSSA |
Dossier réalisé par Guillemette MOREL-JOURNEL |
Alors, une razzia
féminine sur le métier ? Des hordes d’amazones dans les agences et sur les
chantiers ? Que nenni. Rassurez-vous, le patriarcat, ou plutôt les bons
vieux schémas de genre et autre plafond de verre veillent : à la sortie de
l’école, elles sont déjà moins nombreuses. À monter leur propre agence, moins
de 30 %. Et pour les revenus, restons calmes : en moyenne, ceux des
femmes architectes plafonnent à 60 % de ceux de leurs confrères1 !
Dans les écoles
d’architecture, il n’y a pas que des étudiantes (et un peu moins d’étudiants).
Il y a aussi des personnels administratifs, enseignants et chercheurs. On
aurait pu croire que, corrélativement à la féminisation des futurs architectes,
la proportion de femmes dans le corps enseignant augmenterait. LÃ encore, que
nenni ! Et la réforme de 2018 n’y a rien changé. Comme pour tout concours
de recrutement des agents de la fonction publique, les décrets rappellent
pourtant que les jurys locaux doivent tendre à la parité (on dit « tendre
à » par pudeur, car on sait que dans les professions à dominante masculine
la stricte parité est parfois impossible à atteindre, selon les disciplines et
les grades). Or le bilan des recrutements effectué par le collectif Architoo2 montre,
entre 2018 et 2021 (soit trois années de départs à la retraite et deux années
de concours, puisque l’année de la réforme fut « blanche », sans
concours), une stagnation, voire une légère régression. En somme, toutes
disciplines confondues, moins d’un tiers des enseignants sont des enseignantes
(29,79 %, mais elles ne représentent qu’un quart des effectifs dans le
champ du projet). En trois ans, ce pourcentage a même baissé de 1 % !
Cette stagnation interroge, alors que la féminisation des jurys de recrutement
est imposée. Une hypothèse serait que, en devenant locaux, ils tendent Ã
reproduire le paysage existant, lequel est majoritairement masculin. Et les
femmes-alibis parviennent-elles toujours à se faire entendre ?
GMJ
1. Chiffres Cipav, 2018, cités par Stéphanie Dadour, « Architecture et
féminisme. De la théorie critique à l’action », Re-vue Malaquais,
n° 6, 2020, p. 9.
2. Ce collectif
d’enseignantes-chercheuses des ENSA compte au moins une représentante pour
chacun des 20 établissements. L’étude, sortie en septembre 2021, a
été effectuée à partir des données établies par le ministère de la Culture.
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