Architecte : Sou Fujimoto Architects – Nicolas Laisné – Dimitri Roussel – Oxo Architectes Rédigé par Richard SCOFFIER Publié le 04/10/2019 |
« L’Arbre Blanc » est la seconde et dernière opération de l’ambitieux programme de Folies, lancé par l’ancienne municipalité et abandonné par la nouvelle. Une opération d’envergure qui cherchait à essaimer de nouveaux repères le long des lignes de tramway d’une ville, devenue métropole, pour mieux en mesurer l’étalement. Si la « Folie Divine » de Farshid Moussavi édifiée à proximité des îles construites par Christian de Portzamparc dans les jardins de la Lironde a rapidement été absorbée par son contexte malgré ses étranges strates en anches de guitare, on peut parier qu’il n’en sera pas de même pour la tour hérissée de balcons de Sou Fujimoto et de ses associés français. Par sa position comme par sa forme, elle risque de rester longtemps figée dans son jaillissement. Elle sait s’imposer comme un pôle centrifuge en marge des vides néoclassiques de l’axe monumental conçu par Ricardo Bofill pour relier l’Hôtel de région à la place de la Comédie. Et, plus qu’une simple intervention plastique, elle tente de s’affirmer comme un nouveau générateur de vie sociale en suivant les thèses développées par l’architecte japonais dans ses courts manifestes.
Car s’il n’a finalement que peu construit, Sou Fujimoto a rapidement été remarqué par ses projets théoriques, ses petites réalisations très radicales et ses installations. Ainsi, le projet « Future Primitive House » dont les plateaux en hélice réactualisaient la spirale en donnant à cette figure essentielle du métabolisme une échelle plus humaine. Ou ses maisons tokyoïtes, encore plus jusqu’au-boutistes que celles de ses confrères, et notamment la « Maison N », composée de petites boîtes vitrées accessibles par des échelles et déployées en arborescence. Ou encore, le temps d’un été, les très fines trames métalliques composant un nuage flottant au-dessus du tapis vert de la Serpentine Gallery à Londres. Une composition arachnéenne capable de produire sa propre opacité, sa propre inertie.
Des structures qui se déploient en spirale ou en arborescence, des compositions qui s’ouvrent vers le ciel, la transparence qui produit de l’opacité, les escaliers qui se croisent comme dans les perspectives impossibles d’Escher : des thèmes que l’on retrouve dans cette première œuvre française.
L’espace et son double
Appelé par de jeunes architectes – Nicolas Laisné, Dimitri Roussel et Manal Rachdi – en phase avec une nouvelle génération de promoteurs cherchant à faire bouger les lignes, Sou Fujimoto a su parfaitement opérer le passage d’une architecture d’art et d’essai à une production plus commerciale, sans rien perdre de l’intensité de son propos. Et son projet est un succès : des appartements achetés dès le début du chantier ont déjà été revendus avec de substantiels bénéfices. Ils sont occupés par des cadres supérieurs actifs dans les grandes entreprises de cette région très dynamique, par des retraités qui ont abandonné leur jardin, trouvant l’équivalent dans les immenses balcons ouverts sur le paysage, par des personnalités de la ville voyant dans ces logements des scènes à leur mesure et par quelques autres, plus rares, qui ont investi dans cet immobilier hors normes comme on investit dans l’achat d’une œuvre d’art.
Une œuvre plastique qui ne doit pas faire oublier la structure sismique complexe composée de noyaux stables intégrant les circulations verticales et d’un système de poteaux périphériques plus flexibles pour encaisser les éventuelles secousses de cette zone sensible. Les longs balcons, qui s’élancent vers l’extérieur, sont solidement arrimés aux dalles inférieures et supérieures par d’épais profilés métalliques. Un système d’équerres qui reste masqué par le carénage de la façade. Quant aux tirants qui apparaissent derrière les garde-corps, ils sont surtout nécessaires pour résister au soulèvement en cas de grands vents.
Le fait que les plateaux en porte-à -faux ne se superposent pas accorde à cet édifice un mouvement hélicoïdal qui rappelle l’œuvre antérieure et permet d’éviter tout effet de vertige. Ainsi où que l’on soit, même au dernier étage, la perspective plongeante est toujours rapidement stoppée par des plateaux plus bas. Rien de sublime ou de piranésien dans ce dispositif architectural, mais plutôt une impression d’immersion dans un tissu d’intimités croisées. Une organisation parfaitement réglée par les subtils décalages mettant en phase les balcons, l’organisation des plans, la structure et la pondération des vis-à -vis par des jardinières afin d’éviter une trop grande promiscuité.
Variations saisonnières
Le projet repose sur l’opposition de deux séries d’espaces essentiels : les protégés, où la cellule familiale peut s’isoler, et les exposés, où elle se projette vers l’extérieur et se met en scène pour participer au grand jeu social où tout le monde peut se voir et s’interpeller. Chaque appartement intra-muros trouve ainsi presque son double extra-muros. Les plus spectaculaires étant les duplex, dont les extensions extérieures sont reliées par des escaliers lancés dans le vide.
Un dispositif qui permet de rêver à un nomadisme immobile – à rebours des variations saisonnières des sociétés eskimos décrites par Marcel Mauss – où, chaque hiver, les membres de la communauté de l’Arbre Blanc s’isoleraient dans leur chambre pour mieux se rassembler et communiquer d’un balcon à l’autre, une fois les beaux jours revenus.
Maître d’ouvrage : Opalia,
Promeo Patrimoine, Evolis Promotion et Crédit Agricole Immobilier
Languedoc-Roussillon, GSA Réalisation (maîtrise d’ouvrage déléguée) –
Maitre d'oeuvre : Sou Fujimoto Architects, Nicolas Laisné, Dimitri Roussel, OXO
Architectes Marie-Laure Coste-Grange (direction de projet)
Programme : résidentiel
(113 logements), galerie d’art, restaurant et bar panoramique 17 étages,
3 niveaux de parkings
Maître d’œuvre d’exécution : CAP Conseil,
icK
Paysagiste : Now Here
Studio
BET structure :
André Verdier
BET fluides : ARGETEC
BET HQE : Franck Boutté Consultants
BET économie :
VPEAS
Surface (SHON) : 10 225 m²
Coût : 20,5 millions
d’euros HT
Calendrier : inauguration le 19 juin 2019
Maîtres d’œuvre : Amas (architectes mandataires), FBAA (architecte associé), Sara de Gouy (arch… [...] |
Maîtres d’œuvre : Guinée*Potin (architectes), TUAL (BET fluides, environnement), ESTB (structur… [...] |
Maîtres d’œuvre : tact (architectes) ; PLBI (BET structure)Maîtres d’ouvrage : SNCF Gares &am… [...] |
Maîtres d’œuvre : DATA (architectes mandataires), Think Tank (architectes associés), EVP (ingé… [...] |
[ Maître d’ouvrage : Groupement local de coopération transfrontalièreArchitectes : Devaux &… [...] |
Clermont-Ferrand[ Maître d’ouvrage : client privé – Maître d’œuvre : Récita architecture … [...] |
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