Tribunal de Caen, projet de l’agence Hauvette Champenois et associés repris par l’agence Baumschlager Eberle, architecte mandataire atelier d’architecture Pierre Champenois, architecte associé |
S’exporter : l’injonction à chercher fortune hors de nos frontières, en démontrant au passage une qualification bien française, s’est faite particulièrement pressante avec la crise économique. Particulièrement visées, les PME, censément plus innovantes, plus mobiles du fait de leur taille réduite. Ils se trouvent que les grandes agences françaises s’approchent de cette catégorie d’entreprises. Elles n’ont pas de technologies à vendre mais des compétences reconnues sur certains sujets – l’hospitalier, le transport, l’éducation, le grand aménagement – qui leur permettent d’avoir voix au chapitre dans le secteur ultra concurrentiel de la |
conception architecturale internationale. Occasionnellement embarquées dans les valises de la diplomatie économique, les grandes agences doivent le plus souvent développer seules les stratégies qui les aideront de prendre pied à l’étranger, où les risques sont nombreux : retards de règlements, abandons de projets, aléas politiques… Pour assurer leurs positions, elles peuvent partir dans les valises de grandes entreprises nationales désireuses, elles aussi, de profiter des opportunités mondiales. La sécurité juridique et financière s’obtient alors au prix d’un mariage entreprise/agence souvent controversé au sein de nos frontières. Ce n’est pas la seule entorse à la maîtrise d’oeuvre telle qu’elle est défendue en France depuis la loi MOP : participations non rémunérées aux concours, offre globale de maîtrise d’oeuvre, missions d’études rarement prolongées par le chantier… C’est aussi en acceptant ces conditions que les agences françaises peuvent faire partie d’un village d’architecture global déjà très peuplé, y compris d’agences qui n’hésitent pas à s’implanter en France. Espérons qu’au-delà de l’économie, l’architecture pourra aussi profiter de ces échanges de savoir-faire multilatéraux.
EXPORT 
Les agences françaises dans l’arène mondiale
À l’étranger, les agences françaises doivent
d’abord vendre un savoirfaire : rien de simple dans un secteur ultra
concurrentiel recelant de multiples embûches.
Face à la
morosité de la construction en France, grande est la tentation de chercher fortune
hors de l’Hexagone. Avec raison, puisqu’en 2015-2017 l’herbe sera plus verte ailleurs,
indiquent les chiffres fournis par un rapport d’Euroconstruct. Avec une
prévision d’évolution de 1,4 % de l’activité construction, la France
arrive quatorzième sur les 19 pays européens mentionnés dans l’enquête, la
lanterne rouge revenant à l’Autriche (1 %), l’Allemagne (0,6 %) et la
Suisse, qui connaîtra même une involution de son secteur de construction,
avec une involution de moins 0,5 %. En tête du classement, la République
tchèque, la Pologne et enfin l’Irlande, qui s’accorde la première place avec
une croissance de 10,8 % due à une bonne santé du secteur résidentiel et non résidentiel,
et dans une moindre mesure des activités de génie civil1. Reste que ce qui vaut
pour le BTP ne l’est pas forcément pour l’architecture : certains pays, comme
la Norvège, vont connaître de grands besoins en infrastructures et en
travaux à forte valeur ajoutée (tunnel, ponts), qui ne concernent que de
loin l’architecture. Majors, PME, BET, agences d’architecture : toutes les
branches nationales du BTP partagent un même travers, celui de rarement
s’aventurer hors de notre marché domestique, alors que la législation y
invite, tout au moins en Europe, et que le climat mondialisé devrait
donner des ailes à qui cherche de nouvelles opportunités. Plusieurs facteurs expliquent,
selon Le Moniteur, ce manque d’engouement2 : mauvaise organisation des PME, absence
de service « international » dédié, mauvaise maîtrise des langues étrangères et
notamment de l’anglais, mais surtout un marché intérieur longtemps vigoureux qui
dispensait d’aller tenter l’aventure loin de nos frontières. Le rétrécissement des
marchés publics incite les architectes à sauter le pas et à chercher des
commandes sous d’autres cieux.
Les
agences internationales exportent d’abord une compétence – pour les
Français, l’éducation, les équipements sportifs et l’hospitalier –
face à des concurrents anglo-saxons bénéficiant souvent d’un cadre réglementaire
plus familier.
Destinations réduites
Peu
présent à l’export, le BTP français ne peut qu’augmenter ses parts de marché. Pas
de miracle immédiat, cependant, à attendre d’une telle démarche. Le secteur est très
concurrentiel : à l’étranger, les agences françaises se retrouvent face à des
structures provenant de pays moins bien lotis en termes de commande
publique, qui de ce fait arpentent les marchés extérieurs depuis de
nombreuses années. Souvent anglosaxonnes, ces agences évoluent dans des
contextes réglementaires proches du leur. Les destinations changent aussi.
Après avoir beaucoup construit, la Chine n’est plus aussi porteuse qu’il y
a quelques années. L’empire du Milieu connaît une récession et une
augmentation des qualifications qui rendent moins nécessaire la présence
d’opérateurs étrangers. « Le marché chinois est saturé, à l’exception de
la Chine du Sud autour de Canton, Shenzhen – moins Hong Kong, déjà très
pourvu en intervenants locaux – ou la Chine de l’intérieur – Chongqing,
Chengdu… relève Madeleine Houbart, de l’Association française des
architectes à l’export (AFEX). Nous privilégions les pays manifestants un
besoin d’architecture arrivé à maturité. Aujourd’hui, nous nous intéressons
à des pays d’Afrique subsaharienne que nous avions encore peu regardés, qui
connaîtront sans doute une forte croissance. Nous avons l’atout d’une culture
commune, même si nous ne nous intéressons pas qu’aux pays francophones. Le
hic, c’est qu’il y a de l’argent, mais une faible partie est affectée aux
projets. Les travaux sont financés par des grandes banques de
développement liant des critères d’attribution à une gouvernance correcte,
une corruption limitée, un bon traitement des populations locales. » En
2016, l’AFEX compte aussi se rendre en Birmanie. « D oté d’une gouvernance plus
démocratique, le pays va s’ouvrir. Nous comptons prendre position sur les infrastructures
touristiques et comprendre les circuits de financement des projets », poursuit
Madeleine Houbart, quitte à faire escale en Thaïlande, où se trouvent des investisseurs
susceptibles de s’intéresser à ce pays. En dernier lieu, le projet désigne la destination
: « Nous n’avons pas d’objectifs géographiques, mais plutôt programmatiques et
contractuels, souligne Mathieu Cabannes, architecte-ingénieur directeur du développement
à l’international chez SCAU. Nous sommes intéressés par les grands projets
de stades et d’universités, donc par le Qatar, les Émirats, la Côte d’Ivoire. » Avant
d’exporter une signature – privilège réservé aux starchitectes –, on exporte d’abord
une compétence. Pour les Français, l’éducation, les équipements sportifs et l’hospitalier
sont des domaines de prédilection. Spécialiste des hôpitaux, Jérôme Brunet a
remporté le concours du Trauma Center et Canceropôle de l’hôpital Meilahti du
Helsinki University Central Hospital (HUCH) en Finlande, en association avec
trois autres agences d’architecture locales.
Partenaires
particuliers
Après avoir déterminé la destination, reste Ã
comprendre comment l’atteindre. La diplomatie économique est un canal
possible, mais pour certains la voie la plus sûre est de faire équipe avec
une grande entreprise. « Nous recherchons des partenaires dont nous
pourrions être sous-traitant ou cotraitant – des grands constructeurs, des ensembliers
qui peuvent être des entreprises françaises comme Vinci ou Bouygues, ou
des entreprises belges. Tout est fonction des sujets et des destinations,
résume Mathieu Cabannes. Nous avons également noué des partenariats avec
des BET qui ont une envergure internationale, comme Tractebel Engineering.
» Les relations sont affaires de personnes et de stratégies croisées
d’entreprises. Pour l’agence d’architecture, le partenariat avec une
entreprise limite les risques juridiques et économiques. La probabilité
qu’un client disparaisse dans la nature étant loin d’être nulle, s’appuyer sur une
société ayant déjà développé un réseau de partenaires relativement fiable est
un atout. Autre partenariat possible : les confrères. « La grande leçon de
l’international, c’est que tes concurrents en France peuvent être des
partenaires à l’export, constate Frédéric Nantois, responsable du
développement international chez AIA (voir entretien p. 154). Il serait
idiot que, sur un concours rassemblant cinq agences, deux agences françaises
se mettent des bâtons dans les roues. » Dernier canal à ne pas négliger : les
collaborateurs souhaitant retourner dans leur pays. L’ouverture de l’antenne
vietnamienne de Baumschlager Eberle s’explique en partie par ces
évolutions des relations de travail. L’ouverture d’une agence sur place
est le stade ultime de l’export, elle permet souvent le développement dans
une nouvelle aire géographique. Lauréat du concours ouvert pour la
construction de la National Gallery de Singapour, Jean-François Milou a créé
une antenne dans la ville-État. Depuis cette base, il traite des projets singapouriens,
mais aussi vietnamiens.
Aléas moraux
La
sécurité des paiements et l’identification des interlocuteurs et des
partenaires fiables font partie, on l’a vu, des premiers risques de
l’export. Ce ne sont pas les seuls : il faut aussi compter avec les aléas,
les soubresauts de géopolitique qui peuvent re- © SCAU architectes.
Perspective : PPC. mettre en cause la réalisation d’un projet. De
l’abaissement du cours du pétrole à un changement imprévu de gouvernement,
en passant par des scandales financiers ou l’évolution d’une sensibilité
aux droits de l’homme, tout est envisageable. Récemment, Zaha Hadid à la
BBC et Jean Nouvel sur France Inter ont été interrogés sur les conditions
de travail des ouvriers sur les chantiers de stades de la Coupe du monde. Et
le Qatar fait partie des pays partenaires suspectés de soutien au terrorisme.
Comment gérer ces questions éthiques qui interpellent directement
l’architecte et peuvent le placer au rang des complices d’un régime
autoritaire ? « Nous avançons pas à pas, explique Mathieu Cabannes, dont
l’agence, SCAU, est engagée dans la construction d’équipements pour la
Coupe du monde de 2020, au Qatar. Trois critères pourraient permettre de
définir si l’on s’engage ou pas dans un projet : le programme, la façon dont
il est réalisé et les commanditaires. Nous travaillons sur des projets de
stades et d’universités, qui ont une certaine portée sociétale, nous
intervenons plutôt sur les phases d’études que de réalisations, et nos
clients sont souvent des entreprises européennes, poursuit Cabannes. Nous
restons très loin du client final. » L’architecte doit emprunter une voie
étroite entre l’esthétique et l’éthique, dirait-on pour paraphraser le motto
de l’édition 2000 de la biennale de Venise.
L’export changera-t-il la pratique nationale, pour les agences globales comme pour celles qui restent locales ? Groupements d’entreprise-architecte, missions sans exé et concours non rémunérés y sont monnaie courante.
Remises
en questions
« Avec des
montants de travaux supérieurs mais des honoraires plus bas divisés entre plusieurs
partenaires, l’export n’est pas l’Eldorado », constate Jérôme Brunet à partir de
son expérience finlandaise. Au-delà des aspects économiques, quels
enseignements architecturaux tire-t-on de ces projets ? À Helsinki, Brunet
a pu faire évoluer sa typologie d’hôpital à patio développée dans
plusieurs établissements en France. Le système en nappe s’est transformé
en jeu de blocs découpés pour ne pas masquer la lumière et les vues au
reste du site hospitalier. L’export invite d’abord à se remettre en question :
« Le système des concours publics indemnisés permet de dédier beaucoup de moyens
à un projet, remarque encore Mathieu Cabannes. Sur un concours à l’étranger, la
faiblesse de l’indemnité conduit à repenser la méthode de travail : moins de
temps et moins de personnes vont réfléchir au projet. Moins de problèmes
seront résolus en phase concours. Nous devons nous montrer frugaux et
mettre l’effort sur des points différents. » Frugalité, suivi du projet
limité en phase exé, éloignement des acteurs, changement des relations
avec les partenaires : un architecte français n’exerce pas à l’export
comme il exerce chez lui. On est en droit de se demander jusqu’où l’export changera
la pratique nationale, pour les agences qui voyagent comme pour celles qui restent
sur notre sol. L’export, un laboratoire où s’élabore l’agence d’architecture de demain,
pour le meilleur et pour le pire ? Une enquête diligentée par l’Ordre national des
architectes, l’université de Bordeaux et le ministère de la Culture devrait
bientôt apporter des éléments de réponses3.
1. Voir «
Europe : cinq pays à conquérir pour le BTP français », Le Moniteur, 3 juillet
2015, p. 13.
2. Ibid.
3.
www.archibat.com/blog/architectes-votre-avis-nous-interesse-linternational-transforme-t-il-la-professiondarchitecte
IMPORT
Dans un monde guidé par les flux, les grandes
agences françaises partent à l’étranger, les grandes agences étrangères
viennent en France. Quel est le profil des structures investissant
l’Hexagone ? Réponse à travers trois cas particuliers.
Elles sont
parfois italiennes, espagnoles, plus souvent japonaises, hollandaises,
allemandes ou autrichiennes. Elles construisent régulièrement en France,
lorsqu’elles n’y ont pas ouvert une antenne. Les agences européennes
profitent de la mobilité, qu’elles soient poussées par la crise ou bien
portées par un tropisme des maîtrises d’ouvrage pour tout ce qui traverse
nos frontières. Indéniablement, le système des rémunérations des concours
fait de la France une destination de choix pour l’activité architecturale,
ce qui ne va pas sans faire grincer quelques dents. À l’heure où les
concours se font rares, les architectes français ont pu voir d’un mauvais
oeil la xenomania conduisant à recruter hors de nos frontières quatre des cinq
participants à une consultation nationale. Malgré les dissymétries, « on ne peut
pas défendre une dynamique d’export en interdisant à tous les architectes étrangers
de venir en France, souligne Madeleine Houbart, secrétaire générale de
l’AFEX » (www8.archi.fr/AFEX). L’association avec des architectes français, un passage
obligé pour les lauréats étrangers des concours organisés sur notre territoire, atténue
sans doute le préjudice. La compréhension du contexte réglementaire et la
nécessité d’avoir une personne sur place rendent ce partenariat quasi obligatoire.
Partenariat parfois initié par des agences françaises elles-mêmes, alors qu’elle
cherchait à étoffer une équipe pour se porter candidates à des concours auxquels
elles n’auraient pas accès si elles se présentaient seules. Dans certains pays,
comme l’Allemagne, des structures dédiées promeuvent l’exportation de l’architecture
nationale (comme le NAX, créé en 2002 par la Chambre fédérale des
architectes allemands). Mais souvent, les architectes sont précédés d’une notoriété
et d’une compétence bien établie, qui devrait profiter, ne serait-ce qu’à la
marge, à la qualité architecturale sur le territoire. Aux maîtrises d’ouvrage
de veiller à ce que ces agences d’abord choisies sur leur réputation
soient à la hauteur de leurs promesses !
Auer Weber, Projet par projet
En cette
année 2015, le journal Competitionline a décerné à Auer Weber le titre de première
agence d’Allemagne en termes d’attractivité et de qualité de projet
(Competitionline, ranking 2015). L’agence se classait première parmi 30
autres structures, à l’issue d’un vote des pairs : signe d’une grande
popularité outre-Rhin, à mettre en parallèle avec la notoriété de l’agence
sur le territoire français où elle reste peu connue malgré la
participation à une quarantaine de concours en France depuis huit ans, avec huit
projets gagnés, livrés ou en cours de chantier. Le premier concours a pour
cadre le Carreau du Temple, la conversion d’un marché en centre
d’animation, projet finalement remporté par le studioMilou. « Nous avions
décidé de tenter l’aventure des dossiers administratifs français, avec une
certaine naïveté. À notre grande surprise, notre candidature a été
retenue, nous avons découvert les règles du jeu français, la loi MOP et
ses rendus beaucoup plus lourds qu’en Allemagne, se remémore Karine
Leroy-Masson, française mais expatriée de longue date en poste chez Auer
Weber. En Allemagne, nous faisons rarement des budgets, on ne produit pas
de pièces écrites. La tendance est au rendu des détails constructifs et Ã
l’expression des ambiances plutôt qu’aux descriptifs philosophiques ou aux
analyses telles qu’on les demande en France. » Cette première approche
suscite pour l’agence l’envie de s’ouvrir au monde francophone, et on va
la retrouver sur des projets de centres aquatiques, d’université ou de stade
Arena. Les projets sont gérés depuis l’agence de Munich – Auer Weber possède également
un bureau à Stuttgart et totalise sur deux sites 140 collaborateurs – par des
architectes français ou francophone. L’équipe se complète d’un architecte
français associé, sur place, choisi dans un réseau qui s’est constitué au
fil du temps. Ainsi, Auer Weber est associée à Christophe Gulizzi sur
l’Arena d’Aix-en-Provence, à Arodie Damian sur un pôle universitaire Ã
Lyon, ou encore Studio Arch sur le centre aquatique de Courchevel. Aucune
ouverture de succursale française n’est au programme. L’agence souhaite
garder le contrôle architectural – qu’elle aurait peur de perdre en dispersant son
personnel. Ce qui ne l’empêche pas de réfléchir à d’autres horizons : si
l’agence continue à déposer entre trois et cinq candidatures par mois,
elle regarde aussi vers le Chili, la Chine, le Luxembourg, la Suisse,
l’Autriche, et même l’Angleterre. Tout sera piloté depuis l’Allemagne : «
On ne lâche pas nos projets dans la nature », résume Karine Leroy-Masson.
Dietrich-Untertrifaller
, Les hommes du bois
Du local au global : la formule
pourrait résumer le parcours de l’agence fondée en 1994 par Helmut
Dietrich et Much Untertrifaller dans une région inconnue de l’ouest de
l’Autriche qui allait connaître une renommée internationale : le Vorarlberg.
Disciples d’Ernst Hiesmayr, les deux associés réalisent plusieurs
bâtiments remarqués dans le domaine de la conception environnementale – le
collège de Klaus, par exemple. En 2004, l’agence ajoute au site de Bregenz
un bureau à Vienne, puis en 2005 à St. Gallen en Suisse. Totalisant 60
employés sur ses différentes antennes, Dietrich Untertrifaller est une des
10 premières agences autrichiennes. Au départ, elle n’avait pas forcément
de velléité d’export, mais a fini par répondre positivement aux
sollicitations d’agences françaises recherchant un partenaire compétent dans la
construction bois. Associée à différentes agences françaises, elle a remporté
des concours à Lyon (Centre sportif dans la ZAC Bon lait, avec Tekhnê),
Longvic (Côte-d’Or, avec Sénéchal-Auclair), Broons (Côtes-d’Armor, collège
Jean-Monnet, avec Colas-Durand). Dernièrement lauréate d’un deuxième
collège avec Colas-Durand, elle termine l’École des beaux-arts de Nancy,
projet piloté depuis l’antenne de Bâle. Le critère retenu pour participer
au concours français était le montant de travaux, qui ne devait pas
descendre en dessous des 10 millions d’euros sous peine de ne pas être
rentable. Much Untertrifaller ouvrira en 2016 une antenne à Paris.
L’agence vise des concours dans ses spécialités – sport, éducation – du
Vorarlberg avec un goût de France !
Baumschlager-Eberle (be) Une antenne
parisienne dans une constellation d’agences
Avec
Dietrich Untertrifaller, Baumschlager-Eberle (be) est la deuxième agence du
Vorarlberg active en France. Pour décrire la structure créée par Dietmar Eberle et
Carlo Baumschlager en 1985, mieux vaut employer le mot « agence » au pluriel. Outre
Lustenau, en Autriche, des antennes de be sont implantées à Vienne, Vaduz,
en Suisse à St. Gallen et Zurich, à Berlin et Hambourg en Allemagne, à Hanoi
et Hong Kong. Le bureau parisien, inauguré en 2013 suite au rachat de l’agence
de Christian Hauvette, disparu en 2011, est le dernier ouvert. Chaque pôle
rassemble 10 à 20 collaborateurs, un nombre jugé optimal pour un contrôle du
projet. En plus de l’architecture, chaque antenne possède une spécialité : le paysage,
par exemple, pour Zurich, Paris étant spécialisé dans… la communication !
Si les règlements de concours et les circonstances du projet le permettent, la
constellation be peut être mise à contribution pour le développement des projets
français. Mais ce n’est pas systématique. « Nous attachons beaucoup d’importance
à la compréhension du contexte local, ce qui explique que nous préférons
ouvrir une agence plutôt que de gérer des projets depuis l’Autriche », affirme
Ulli Grassmann, gérant du bureau de St. Gallen, régulièrement présent Ã
Paris. Une question se pose : comment s’assurer de la cohérence des
propositions architecturales lorsque l’on est dispersé sur 10 sites ? Des
réunions régulières entretiennent une marque de fabrique, explique Anne
Speicher, responsable du bureau parisien. De fait, on retrouve bien le
style rigoureux de l’agence dans les projets de concours gagnés qui ont
ouvert la voie à l’implantation en France : l’immeuble de bureaux Ardeko,
à Boulogne-Billancourt, par exemple, emblématique pour Speicher de
l’hybridation entre Autriche et local – ici Haussmann – que l’agence veut
développer sur tous ses sites. En 2016, be va livrer le tribunal de Caen,
un projet dont elle a hérité lors du rachat de l’agence de Christian Hauvette.
Un autre hybride : « La conception était déjà très avancée lorsque nous
sommes intervenus, se rappelle Grassmann, et de nombreux détails déjà fixés.
» Aux visiteurs avertis, le soin de déterminer ce que le bâtiment doit à la France
et ce qu’il doit à l’Autriche. Le débat a déjà commencé !
Il
est difficile d’encourager l’exportation sans accepter que des architectes
étrangers viennent construire en France, d’autant que la
réglementation européenne favorise la mobilité.
«
Intervenir dans des secteurs à haute valeur ajoutée »
Entretien avec Pacôme Bommier et Frédéric
Nantois
DéjÃ
implantée en Chine, AIA se cherche de nouveaux horizons. Pacôme Bommier,
associé, et Frédéric Nantois, directeur du développement international,
nous expliquent la stratégie de l’agence à l’export.
DA : Pour AIA, l’étranger est-il un nouvel horizon ?
Pacôme
Bommier et Frédéric Nantois : Nous dirions plutôt que ce
qui est récent, c’est la place que prend l’export dans l’activité de
l’agence. Nos premières expériences significatives à l’étranger remontent
à 2006, lorsque nous remportons notre premier concours pour l’hôpital de
Beijing. Nous l’avions vu alors comme une parenthèse exotique. Nous avons
ensuite répondu à différentes sollicitations, venant par exemple de
contacts dans le milieu médical en quête d’architectes, pour la conception
d’une clinique à Abou Dhabi, mais n’avions pas de stratégies ni
d’objectifs définis. D’abord parce que l’activité française nous suffisait et
que, malgré les injonctions à aller voir hors de nos frontières,
s’exporter, voire s’installer à l’étranger, est loin d’être simple. En
2011, un nouveau concours gagné nous a incités à nous implanter
durablement en Chine.
DA : Langues, distance, système politique… vue d’Europe, la Chine peut paraître compliquée. Pourquoi ce pays ? Quels y sont vos atouts ?
Le
contexte chinois n’est pas d’une simplicité limpide, mais il offre des
opportunités de projets attrayantes pour les agences françaises, qui s’y
installent en priorité : une population nombreuse, une croissance
économique soutenue, un rattrapage de construction d’équipement, de
logements, une échelle attractive. En Chine, 1,3 milliard d’habitants
vivent avec un seul système, une seule règle, tandis qu’en Inde, la même
population est régie par une myriade de systèmes régionaux, souvent
incompréhensibles pour nous. Le système chinois reste finalement assez accessible
comparé à d’autres pays du monde, ou d’Asie du Sud-Est.
DA
: Vous ouvrez donc l’agence en 2011. N’était-ce pas trop tard ?
On
nous a dit que nous arrivions dix ans trop tard. Sans doute pour faire des hôtels,
sauf que nous souhaitions atteindre des projets hospitaliers. Notre expertise
du secteur nous donnait une légitimité et identifiait plus clairement notre
plusvalue dans un contexte concurrentiel. Nous n’avons pas vocation à nous
implanter partout, nous préférons intervenir dans des secteurs à haute
valeur ajoutée.
DA
: Quelles leçons tirez-vous de ces quatre années ?
L’ouverture
de l’agence chinoise nous a permis de mesurer l’importance d’être sur le
terrain, de ne pas gérer le développement à distance. Ce que nous en retenons est
assez simple : en matière de développement international, quelle que soit l’activité,
il faut être sur place, proche de ses clients, travailler avec les locaux, entretenir
des partenariats, créer des réseaux, des proximités, connaître les autorités… Nous
observons beaucoup plus de similitudes que de différences entre les pays
dans lesquels nous travaillons sur des projets. Les différences régionales tiennent
dans le grossissement de certains traits.
DA
: Par exemple ?
En
France, nous avons tendance à nous réfugier derrière le contrat, élément qui
est secondaire dans de nombreux pays. Que faire quand un maître d’ouvrage
chinois n’honore pas son contrat ? L’attaquer au tribunal de Shanghai ?
Évidemment, non ! Dans le contexte chinois, le contrat n’est qu’un
paravent, la relation de confiance est de loin beaucoup plus importante
dans l’évolution des affaires que le pur contractuel. Nous avons beaucoup
appris sur les méthodes, l’offre, le positionnement, les marchés qui
étaient les nôtres ou non…
DA
: Que vous apporte l’expérience chinoise ? Va-t-elle aider à vous développer
ailleurs ?
Grâce
à la Chine, nous acquérons des références qui contre toute attente nous légitiment
sur notre propre marché ! Inédites en France, les grandes échelles des hôpitaux
chinois nous ont aidés sur le concours pour l’hôpital Princesse-Grace, Ã
Monaco. L’international est un des axes de développement de l’AIA, car une agence
comme AIA ne peut plus compter uniquement sur le marché français, public
ou privé. Elle a des expertises qu’elle peut proposer à l’étranger, sous différentes
formes, et possède de plus cette particularité de proposer la conception
architecturale, l’ingénierie et le management de projet : un profil atypique en
France, mais tout à fait recevable et compréhensible dans de nombreux pays
de culture anglo-saxonne.
DA : AIA
Chine a-t-elle vocation à s’autonomiser ?
L’antenne
chinoise est autonome au quotidien, mais elle prolonge notre modèle d’agence.
Il n’est pas question qu’elle prenne son indépendance, car elle tire son savoir
de l’expertise française. Il y a donc forcément un dialogue et une passerelle. L’enjeu
est de porter les mêmes valeurs et le même message, de conserver notre cohérence
sans faire le grand écart. Le positionnement sur des niches programmatiques facilite
cette cohérence. Nous réalisons qu’on peut parfaitement vendre une
expertise lorsqu’elle est forte, et ce malgré les écarts de langues et de
culture. Nous comprenons les attentes et les demandes. Nous ne venons pas
avec des recettes, mais une expérience, une capacité, une méthodologie qui
permet de s’adapter au contexte, et cela fonctionne : les chinois nous
confient la conception d’hôpitaux de 200 000 m2, contre 50 000 m2 en
France. On pourrait se dire que les Chinois peuvent les faire sans nous –
pour autant, ils veulent les faire avec nous, car nous apportons un plus
qu’ils n’ont pas. Ils l’auront peut-être, dans quelques années, mais nous
aurons également progressé.
DA :
Quelles nouvelles destinations après la Chine ?
La Chine
reste un très beau laboratoire, nous avons actuellement six projets en études
et comptons pérenniser la structure. L’expérience reste très chinoise, elle n’est
pas reproductible, car les autres pays n’ont pas la même population, les mêmes
besoins, les mêmes moyens. L’Afrique subsaharienne et l’Amérique du Sud nous
intéressent, mais la question est finalement celle de l’offre, des partenaires, du
montage… Notre approche n’est pas celle du one shot, opportuniste, bien trop coûteuse
en moyens et qu’une agence ne capitalise pas. Nous sommes dans une démarche
de moyen terme, en priorité dans les domaines de la santé et ses extensions, même
si ce n’est pas exclusif. Quoi qu’il en soit, les projets internationaux doivent
s’inscrire dans la logique de développement de l’entreprise : le but n’est pas
de planter des drapeaux sur toute la mappemonde !
À
propos de cette enquête
Le tableau
des 300 premières agences de France est établi à partir des chiffres fournis
par la société Archiliste, qui a sélectionné 1 000 agences d’architecture parmi
les 20 000 recensées dans sa base de données. Une recherche sur Infogreffe
doublée d’un courrier adressé aux agences a renseigné la colonne « chiffre
d’affaires ». C’est ce critère, à l’exclusion de tout autre, qui établit ce
classement ne prétendant nullement constituer un palmarès de la qualité architecturale.
Les agences qui n’ont pas publié leurs comptes ni souhaité répondre au
questionnaire d’Archiliste sont absentes d’un tableau où elles auraient
leur place. Plus d’informations sur www.archiliste.fr.
Cardete
Huet + Amsycom : l’union pour une offre globale
Plutôt que
d’unir sa destinée à une autre agence d’architecture, l’agence Cardete
Huet mise sur la complémentarité en rejoignant un groupe spécialisé dans
l’immobilier d’entreprise.
La
stratégie de la fusion séduit les agences en quête de croissance :
mutualisation des moyens, partage des références, structure plus solide
propre à inspirer confiance aux maîtres d’ouvrage… Plusieurs structures de
taille moyenne ont opté ces dernières années pour la fusion ou
l’association, afin de croître pour faire face à la crise aussi bien qu’Ã
la complexification du métier d’architecte. Quant aux agences déjÃ
importantes, elles ont pu absorber des agences de dimensions plus
réduites, pourvu qu’elles apportent des références et des savoir-faire
qu’elles ne possédaient pas encore. A26, MAP et Sud Architectes sont
quelques-unes des agences qui ont franchi le pas de l’association ou de la cooptation.
À Toulouse, l’agence Cardete Huet a connu en 2014 une croissance spectaculaire,
voyant son chiffre d’affaires passer de 8 à 15 millions d’euros. Ce que ne
disent pas les chiffres, c’est le caractère atypique de l’opération qui a
permis ce résultat : plutôt que de s’associer à une autre agence, Cardete Huet a
rejoint Amsycom, un groupe spécialisé dans le conseil, le management et la
programmation d’espaces tertiaires et industriels. L’agence d’architecture devient
un pôle projet intégrant les activités d’architecture du groupe, présidée par
David Habrias, diplômé de l’École supérieur de commerce de Bordeaux devenu
directeur général d’Amsycom en 2013. Gérard Huet et Francis Cardete ont
été nommés directeurs généraux du pôle architecture en 2014. La nouvelle société
rassemble près de 160 personnes. Le montage juridique tient compte des
contraintes légales, qui prévoient qu’une société privée ne peut détenir la majorité
des parts d’une société d’architecture. Avant de s’unir, les deux groupes
se sont côtoyés à l’occasion de différents projets. Le nouveau groupe
apporte une offre globale et élargit son champ d’intervention de projets
immobiliers et tertiaires à tout type de programme. Inédite en France, la
nouvelle structure est un atout face à des clients privés comme Ã
l’international : « Nous pouvons répondre sur toute la chaîne du projet –
programmation, expertise, conception –, ce qui correspond aux besoins des
clients habitués à un management à l’anglo-saxonne », explique Gérard Huet.
Une offre globale que n’aurait pu proposer une structure née de la fusion avec
une autre agence d’architecture.
Arte
Charpentier opiniâtre à Alger
Selon les
économistes, les prochains relais de croissance se trouveront en Afrique.
Un continent qui réclamera de la persévérance, si l’on en croit l’exemple
d’Arte Charpentier en Algérie.
Implantée dès les années 1980 en Chine, où elle continue d’être active – l’agence a livré récemment un opéra au Shanxi et travaille sur l’aménagement d’un quartier d’affaires à Guangzhou, développé par son antenne de Shanghai –, Arte Charpentier regarde de l’autre côté de la Méditerranée, vers l’Afrique. L’agence, qui espère à terme réaliser 30 % de son chiffre d’affaires à l’export, contre 10-15 % aujourd’hui, prospecte du côté de la Guinée, du Sénégal et en Algérie. Cahier de commande d’un retour au pays natal puisque, parmi la vingtaine d’associés, deux au moins ont des liens avec ce poids lourd du Maghreb. Pierre Clément, président de la structure, a même grandi dans le village qui borne le réaménagement de la baie d’Alger, un projet d’urbanisme étiré sur plus de 50 kilomètres de bande littoral, remporté en 2007 par l’agence. Avec les années, le schéma de cohérence territorial s’est étendu d’encore 20 kilomètres, tout en gagnant en profondeur vers les terres. Un travail d’urbanisme multidimensionnel, envisageant non seulement le réaménagement d’un front de mer aujourd’hui occupé par des infrastructures portuaires et des routes, mais aussi le traitement des eaux, le rapport de la ville à la mer, le développement urbain après le déplacement du port, la préservation d’espaces naturels, etc. Au terme de huit ans de labeur et de recherches, les architectes auront produit une série de projets sur la baie, un schéma directeur rassemblé dans 18 volumes, en travaillant souvent à l’aveugle. « Nous aurions voulu au préalable disposer d’un atlas rassemblant les données démographiques, économiques et urbaines du site, se rappelle Marie-France Bouet, associée et responsable du projet. C’est finalement notre rendu qui remplit ce rôle… » Après avoir répondu à plusieurs appels d’offres, Arte Charpentier s’est finalement vu retirer le projet au profit d’autres équipes d’architectes. Des changements politiques aussi obscurs qu’imprévisibles ont écarté l’agence du SCOT du littoral, et plus tard d’un écoquartier qui devait se développer sur le site de Bateau cassé, dans la baie d’Alger. Elle n’est pas non plus arrivée lauréate du concours du grand musée de l’Afrique, également implanté dans la baie. Ces déconvenues n’ont pas découragé l’agence, qui réalise actuellement le second centre commercial d’Afrique (en taille) à Sétif et décline les logements expérimentaux composant l’écoquartier algérois pour les villes de Mascara et Biskra, aux portes du désert. Développé en partenariat avec Lafarge, le projet veut adapter la typologie du patio à l’immeuble collectif. Une alternative aux immeubles R + 3 à quatre logements par niveaux construits à des millions d’exemplaires dans le pays avec le concours d’entreprises chinoises. « Si elle se diffuse, cette typologie pourrait intéresser des milliers de ménages de la classe moyenne qui ne trouvent pas leur place dans l’habitat de masse émergeant à travers le pays », explique Marie-France Bouet. Un défi et un pari qui pourra s’avérer payant, s’il trouve son chemin dans les méandres de la maîtrise d’ouvrage locale.
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