30 juin 2022, crématorium du cimetière de Baikove, Kyiv (Avraham Miletski architecte, construit entre 1968 et 1981). Des membres de la brigade d'Azov assistent aux funérailles d’un soldat de leur unité tué pendant le siège de Marioupol |
Dossier réalisé par DEPINCE ANNE CHARLOTTE ET ESSAÏAN ELISABETH La guerre menée par la Russie contre l’Ukraine est arrivée depuis plus d’un an dans nos quotidiens. Cette « guerre au présent » – pourtant commencée en 2014, et précédée par celles de Tchétchénie, Géorgie et Syrie – nous est apparue, de par notre impréparation, d’une grande soudaineté. Elle est présente de plusieurs manières : par l’ampleur des destructions, des exactions et crimes de guerre ; par l’intensité du flux d’information ; par la diversité des formes que prend cette information. L’on a pu un temps penser que la guerre serait désormais différente. C’est ce que la couverture occidentale de la guerre du Golfe offrait à voir : des images techniques de « bombes intelligentes », de « frappes chirurgicales », sans hommes ni destructions, déréalisant et aseptisant le conflit, jusqu’à effacer la trivialité du réel. Mais à peine six mois plus tard allaient commencer les guerres d’ex-Yougoslavie… Si la campagne de frappes aériennes russes en Ukraine réactive des visions de destructions passées, parmi les images que nous croyions appartenir résolument au passé, il y a aussi celles de la campagne sur le front. Une guerre de position qui, depuis 2014, ravive nos imaginaires de tranchées de la Grande Guerre. Parler de la guerre en Ukraine, c’est donc aussi questionner la pertinence et les limites des comparaisons historiques. Dans quelle mesure convoquer les destructions, puis les reconstructions de Londres, de Varsovie, de Dresde, du Havre, ou plus récemment de Sarajevo, aiderait à penser le présent ? Parler de la guerre, c’est aussi questionner le rapport à la mémoire ou plutôt aux multiples mémoires, c’est questionner les formes et les conditions de leur expression et de leur cohabitation et, de ce fait, c’est élargir les définitions mêmes des notions de patrimoine et d’identité. |
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