Ouverture de la galerie de l'histoire du Château de Versailles

Architecte : Agence d’architecture Projectiles
Rédigé par les architectes
Publié le 17/07/2012

À quoi ressemble Versailles avant Louis XIV ? Comment le petit relais de chasse de Louis XIII devient-il le plus grand palais d'Europe ? Quels sont les embellissements voulus par le jeune roi Soleil dans son palais des fêtes et des plaisirs ? Saviez-vous que la Galerie des Glaces était à l'origine une terrasse donnant sur les jardins ?
Le château de Versailles est un lieu unique, à la fois résidence royale, musée d'histoire et palais de la république. Mais connaissez- vous toutes les étapes qui ont jalonné son histoire ? Pour mieux comprendre son évolution dans le temps et accompagner les six millions de visiteurs du monde entier qui le découvrent chaque année, le Château de Versailles, en partenariat avec Google, a décidé de créer la galerie de l'Histoire du Château.
Le projet de la galerie de l'histoire du château a été remporté par l'agence Projectiles suite à un concours restreint organisé entre février et avril 2010. Il a notamment été salué pour sa dimension contemporaine et son audace à vouloir écrire une nouvelle phase de l'histoire architecturale du château. Le projet pose un paysage intérieur qui rompt avec celui du palais, tout en donnant une continuité aux principales caractéristiques. esthétiques et géométriques.

LE PROJET ARCHITECTURAL
La Galerie de l'Histoire du Château de Versailles se déploie sur une surface de 700 m² à travers des salons en enfilade situées dans l'aile Nord. Elle présente l'histoire de la construction du château de manière chronologique à travers onze salles et évoque en parallèle le règne des bourbons.
Le paysage intérieur est défini par un système d'aménagement en trois strates superposées. La strate basse explique l'Histoire et protège les oeuvres : les lambris Louis Philippe sont conservés mais entièrement repeints, supportant des extrusions lumineuses contemporaines en Corian. La strate du milieu supporte les oeuvres : les parois en tenture sont remplacées par une peau spécifique et contemporaine. La strate haute contrôle la lumière : création d'un monobloc de lumières, en Corian, suspendu au centre des salles.

     - Strate basse : la médiation
Les lambris bas des salles du château présentent une modénature que le projet met en volume. Les surépaisseurs rectangulaires, au centre du motif géométrique quasi bicentenaire, sont extrudées en volumes parallélépipédiques réalisés en Corian dont la face supérieure est rétroéclairée. Les extrusions accueillent l'ensemble des textes de la galerie. Elles jouent également le rôle de mises à distances pour l'ensemble des oeuvres picturales. Afin d'épouser précisément les contours du « panneau » du lambris Louis Philippe, chaque extrusion générée présente un volume différent.

     - Strate médium : les oeuvres
L'ensemble des murs a été ré-habillé avec une peau en Corian gravée avec un motif spécifique pour chaque salle, correspondant à une époque historique différente. Ils ont été discrètement réinterprétés afin de fabriquer une fresque continue sur les parois. La réadaptation graphique des motifs a été réalisée par les graphistes Change Is Good. Le motif a été gravé en partie haute des parois et en graduation de profondeur de haut vers le bas, jusqu'à sa disparition. Un outil spécifique a été réalisé afin d'obtenir précisément l'aspect désiré. L'effet de la disparition est obtenu en agissant à la fois sur la profondeur et sur la largeur de la gravure. En se relevant progressivement, la pointe de gravure, conique, laisse une trace de moins en moins profonde et de moins en moins large. Cette technique de gravure inédite présente une grande précision. L'inconvénient est l'extrême lenteur du processus : un mètre linéaire du mur gravé en une demi-journée, soit quatre mois en continu pour la gravure de l'ensemble de la peau.
Les panneaux muraux en Corian ont une épaisseur de huit mm. Ils sont posés sur une ossature en aluminium fixée sur les murs du château. Ce sont des panneaux de taille maximum 1m x 2m, usinés et gravés en atelier et assemblés sur site. Les panneaux sont collés sur place puis poncés pour obtenir une surface continue sur toutes les parois, sans joint apparent. La colle est issue de la même matière.
L'un des avantages de ce matériau réside dans sa flexibilité lors des changements d'oeuvres. Les anciens trous sont facilement bouchés avec une patte spécifique. Après une minute de ponçage la trace du trou disparaît totalement.
L'assemblage sur site est un moment délicat, puisque deux mondes se rencontrent. La richesse des traitements et la profusion d'ornements manuels et bicentenaires du palais rencontrent la planéité millimétrique de la nouvelle parure subtilement ornementée et contemporaine. L'arbre généalogique des Bourbons, gravé dans l'habillage de la salle d'introduction côtoie un motif complexe sculpté dans le marbre d'une corniche historique.
Mêler ces deux univers porte à la fois la complexité du projet et sa dimension poétique.

     - Strate haute : les lumières
Un ensemble de « lustres » est suspendu aux plafonds dans chaque espace. Ce sont des blocs en Corian gravé. Ces volumes suspendus sont de véritables architectures. Leurs gabarits, variant la perception spatiale de chaque salle, ont été soigneusement calculés en fonction des dimensions de l'oeuvre majeure trônant dans chaque pièce. La massivité des volumes est fortement contrastée par la légèreté que procure leur suspension au plafond et la douceur lumineuse des faces inférieures. Ces micro-architectures dissimulent en partie supérieure, sous le plafond, l'ensemble des projecteurs, nécessaires à la mise en lumière des oeuvres picturales et à l'éclairage homogène du plafond. Elles intègrent également les vidéo-projecteurs des salles multimédias.
Elles sont en partie amovibles. Leurs faces inférieures sont rétroéclairées, projetant une lumière diffuse sur les socles et vitrines situés en aplomb. Les sous-faces sont escamotables. Elles coulissent vers le bas avec un mouvement motorisé afin de permettre la maintenance des sources posées à l'intérieur (les lampes et les projecteurs, les appareils audiovisuels et les équipements de sécurité).
L'ensemble des sources lumineuses est intégré aux luminaires. Composées de différentes températures de couleur, elles sont entièrement pilotables depuis une console numérique dirigée par Philippe Collet, le concepteur lumière. En périphérie, les tableaux sont éclairés avec une lumière de rehaut, plutôt chaude, alors que le plafond baigne dans une lumière froide afin de rappeler celle du jour. Cette différenciation de la température de couleur en fonction des strates apporte un relief aux paysages intérieurs.
Enfin, grâce aux cellules photovoltaïques implantées discrètement le long de la façade, l'ensemble des lumières artificielles s'adapte aux variations de la lumière du jour apportée depuis les grandes fenêtres donnant sur le jardin, afin de maintenir une luminosité constante dans les salles, tout au long de la journée.
Des rideaux sont posés sur les fenêtres. Ce sont des toiles de protection solaire traitées avec une colorimétrie spécifique et imprimées avec un dégradé dans les mêmes tonalités que le Corian.


EN CHIFFRES :
- La surface de Corian : plus de 1000 m2
- Le temps de gravure : quatre mois
- La dimension de la plus grande cloche vitrée: 240cm x 320cm
- Le poids d'un lustre : plus de 500 kg
- Le nombre de km de câbles : quelques km
- Le nombre de prototypes de rideau : 9 prototypes
- Le nombre de motifs dessinés : plus de 50 motifs



Maitrise d'ouvrage : Établissement Public de Versailles
Maitrise d'œuvre : Agence d'architecture Projectiles, architecte mandataire, Reza Azard, Hervé Bouttet - Daniel Meszaros + Charlotte Billon, chef de projet - Abraxas Concept (Philippe Collet), conception lumière - Change Is Good, graphisme - Nobles Ingénierie, bureau d'études fluides - Bureau Michel Forgue, économiste, - Ouest Coordination, OPC
Entreprises : CREA Diffusion, agenceur parois et mobilier en Corian - Chapelle et Compagnie, maçonnerie et plâtrerie - Duval et Mauler, peinture - Prodesign, menuiserie - Edmond Petit, toiles et rideaux - Big Bang, éclairage - SDEL, électricité - Cristal Sérigraphie, signalétique - Soft, audiovisuel - Inéo, mise en Sécurité
Surface :
700 m² - Coût : 1,5 millions d'euros HT - Calendrier : Durée phases études : 10 mois - Durée phase chantier : 12 mois - Lauréat du concours en mai 2010

Salon de l'Aile Nord réaménagé en Corian © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Plan général © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Coupe © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Salon aile Nord de Versailles © Agence d’architecture Projectiles Salons en enfilade sur l'histoire de Versailles © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Salon de l'Aile Nord réaménagé en Corian © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Dessins du Corian © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Inscriptions au mur © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Médaillons © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR  Médaillon gravé © Agence d’architecture Projectiles<br/> Crédit photo : DR

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